11 décembre 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-11.792

Chambre sociale - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2019:SO01695

Titres et sommaires

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - employeur - pouvoir de direction - etendue - contrôle et surveillance des salariés - procédés de contrôle - validité - conditions - applications diverses - portée

Selon l'article L. 2323-32 du code du travail, antérieur à la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, le comité d'entreprise est informé et consulté, préalablement à la décision de mise en oeuvre dans l'entreprise, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés. Ayant constaté que l'outil de traçabilité d'un établissement bancaire, destiné au contrôle des opérations et procédures internes, à la surveillance et la maîtrise des risques, permettait également de restituer l'ensemble des consultations effectuées par un employé et était utilisé par l'employeur afin de vérifier si le salarié procédait à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille, une cour d'appel en déduit exactement que l'employeur aurait dû informer et consulter le comité d'entreprise sur l'utilisation de ce dispositif à cette fin et qu'à défaut, il convenait d'écarter des débats les documents résultant de ce moyen de preuve illicite

Texte de la décision

SOC.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 décembre 2019




Cassation partielle


M. CATHALA, président



Arrêt n° 1695 FS-P+B sur le 1er moyen

Pourvoi n° Q 18-11.792




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) du Nord Est, société coopérative de crédit, dont le siège est [...],

contre l'arrêt rendu le 6 décembre 2017 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. K... V..., domicilié [...],

2°/ à Pôle emploi Champagne Ardenne, dont le siège est [...],

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 novembre 2019, où étaient présents : M. Cathala, président, Mme Richard, conseiller rapporteur, Mme Leprieur, conseiller doyen, MM. Maron, Pietton, conseillers, Mmes Depelley, Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Marguerite, conseillers référendaires, M. Weissmann, avocat général référendaire, Mme Lavigne, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Richard, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Nord Est, de la SCP Didier et Pinet, avocat de M. V..., l'avis de M. Weissmann, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 1er octobre 1976 par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel, (CRCAM), du Nord Est en qualité de prospecteur et au dernier état de la relation contractuelle en qualité de formateur, M. V..., convoqué à un entretien préalable à son licenciement et mis à pied à titre conservatoire le 6 décembre 2012, a été licencié pour faute grave le 20 décembre 2012 ; qu'il a contesté son licenciement devant la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la CRCAM du Nord Est fait grief à l'arrêt de dire le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen, qu'un établissement de crédit est libre, sans avoir à en informer préalablement le comité d'entreprise, d'utiliser un système informatique destiné à assurer la sécurité des données bancaires et une maîtrise des risques, serait-il doté d'un système de traçabilité, pour vérifier si un salarié a procédé à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que l'employeur était un établissement de crédit tenu de se doter d'un système interne de vérification des opérations et procédures internes, de surveillance et de maîtrise des risques ; qu'en affirmant ensuite que cet « outil » permettait aussi de restituer l'ensemble des consultations effectuées par un employé et que dès lors, l'employeur aurait dû informer et consulter le comité d'entreprise avant d'utiliser le dispositif litigieux pour vérifier si le salarié procédait à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille, sans mieux caractériser que le système informatique et sa traçabilité avaient été introduits dans l'entreprise avec pour objectif de contrôler l'activité des salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2323-22 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, ensemble les articles 9 du code civil et 9 du code de procédure civile ;

Mais attendu que selon l'article L. 2323-32 du code du travail, antérieur à la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, le comité d'entreprise est informé et consulté, préalablement à la décision de mise en oeuvre dans l'entreprise, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés ;

Et attendu qu'ayant constaté que l'outil de traçabilité GC45, destiné au contrôle des opérations et procédures internes, à la surveillance et la maîtrise des risques, permettait également de restituer l'ensemble des consultations effectuées par un employé et était utilisé par l'employeur afin de vérifier si le salarié procédait à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille, la cour d'appel en a exactement déduit que l'employeur aurait dû informer et consulter le comité d'entreprise sur l'utilisation de ce dispositif à cette fin et qu'à défaut, il convenait d'écarter des débats les documents résultant de ce moyen de preuve illicite ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que pour condamner la CRCAM du Nord Est à payer au salarié la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral la cour d'appel retient que le salarié justifie d'un préjudice résultant des circonstances entourant la rupture de son contrat de travail, puisqu'il a été appelé au siège rémois pour se voir remettre en main propre sa convocation à l'entretien préalable, assortie de sa mise à pied ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans caractériser une faute dans les circonstances de la rupture de nature à justifier l'allocation d'une indemnité distincte des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que pour condamner la CRCAM du Nord Est à payer au salarié la somme de 10 000 euros au titre de la perte de chance de percevoir l'indemnité de fin de carrière, l'arrêt retient qu'en l'absence de licenciement, le salarié aurait pu prendre sa retraite en septembre 2015, et prétendre à une indemnité de retraite, calculée sur la base de 1/10e par année de présence et qu'en raison de son licenciement abusif, il a perdu une chance élevée de percevoir une telle indemnité alors qu'il se trouvait à moins de trois ans de la retraite ; qu'au vu de ces éléments, il lui sera octroyé une somme de 10 000 euros en réparation de ce préjudice, distinct des dommages-intérêts alloués au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemnité de licenciement ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité de départ à la retraite ne pouvant se cumuler avec l'indemnité de licenciement, la cour d'appel, qui a condamné l'employeur au paiement d'une somme à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, ne pouvait retenir l'existence d'une perte de chance d'obtenir le paiement de l'indemnité conventionnelle de mise à la retraite, et a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la CRCAM du Nord Est à payer à M. V... les sommes de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et de 10 000 euros au titre de la perte de chance de percevoir l'indemnité de fin de carrière, l'arrêt rendu le 6 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne M. V... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Nord Est.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur K... V... est dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord Est à payer à M. V... les sommes de 10 927 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis, outre celle de 1092,70 euros bruts au titre des congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 19 février 2013, 77 731,03 euros bruts au titre de l'indemnité de licenciement, 80 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 2 549 euros bruts au titre du salaire de la période de mise à pied, outre celle de 254,90 euros bruts au titre des congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 19 février 2013, 1 214 euros bruts au titre du rappel de congés payés 2011, avec intérêts au taux légal à compter du 19 février 2013, 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel et d'AVOIR condamné la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord Est à rembourser à l'organisme intéressé, dans la limite de six mois, les indemnités chômage versées au salarié, du jour de son licenciement à celui de la décision.

AUX MOTIFS QUE « Sur la faute grave : Monsieur K... V... reproche aux premiers juges de ne pas avoir écarté la faute grave. Il appartient à la caisse régionale de crédit agricole mutuel du nord est de prouver dans les termes de la lettre de licenciement la faute grave invoquée. Sur la prescription : Monsieur K... V... soutient que la plupart des faits qui lui sont reprochés sont prescrits, ce que conteste à raison la caisse régionale de crédit agricole mutuel du nord est. En effet, celle-ci établit qu'elle n'a eu une connaissance exacte et complète des faits qu'à la date du 16 octobre 2012, date à laquelle elle a obtenu la restitution de demande de A... I... permettant de voir à quelle date Monsieur K... V... s'est connecté sur le serveur informatique pour consulter les comptes de clients ne faisant pas partie de son portefeuille pendant les vacances et sur son lieu de travail entre le 12 juillet 2012 et le 16 octobre 2012. En engageant les poursuites disciplinaires le 28 novembre 2012, la caisse régionale de crédit agricole mutuel du nord est a donc agi dans le délai légal de deux mois. Sur le fond : La charge de la preuve de la faute grave pèse exclusivement sur l'employeur de sorte qu'il n'y a pas lieu d'accueillir la demande d'injonction de production de pièce faite avant dire droit par Monsieur K... V.... La caisse régionale de crédit agricole mutuel du nord est entend établir la faute grave de Monsieur K... V... au moyen de sa pièce 35 qui est la restitution de demande de A... I... sur laquelle apparaissent les consultations par Monsieur K... V... des comptes de 33 clients qui ne faisaient pas partie de son portefeuille entre le 12 juillet 2012 et le 16 octobre 2012, et de sa pièce 34 qui est la synthèse de cette consultation. Monsieur K... V... lui oppose que ces éléments n'ont pas été recueillis au moyen de preuve licite. La caisse régionale de crédit agricole mutuel du nord est répond que l'unité de contrôle périodique de Reims a recueilli ces données au moyen de l'outil de traçabilité GC45. Or, si tout établissement de crédit doit se doter d'un système de contrôle interne à des fins de contrôle des opérations et procédures internes, de surveillance et de maîtrise des risques, un tel outil permet aussi de restituer l'ensemble des consultations effectuées par un employé. La caisse régionale de crédit agricole mutuel du nord est qui utilise l'outil de traçabilité afin de vérifier si son salarié procède à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille aurait dû informer et consulter le comité d'entreprise sur l'utilisation du dispositif à cette fin, en application de l'article L. 2323-47 du code du travail, ce qu'elle n'a pas fait. En effet, si la caisse régionale de crédit agricole mutuel du nord est écrit que 'le comité d'entreprise a bien évidemment été informé dès le 28 janvier 2012 de la mise en place de cette traçabilité', la lecture du procès-verbal de la réunion dudit comité à cette date ne permet pas de retrouver une telle information comme le souligne Monsieur K... V.... En effet le compte-rendu relatif à la politique de lutte contre la fraude ne donne que des informations générales et aucune sur le contrôle du travail des salariés. Un tel moyen de preuve en ce qu'il est illicite doit donc être écarté. L'employeur échoue dans ces conditions à rapporter la preuve de la faute grave qu'il invoque. Le licenciement doit donc être déclaré sans cause réelle et sérieuse et le jugement doit être infirmé en ce sens. Sur la période de mise à pied : Le licenciement étant déclaré sans cause réelle et sérieuse, Monsieur K... V... est bien-fondé en sa demande en paiement d'une somme de 2.549 euros au titre de la période de mise à pied outre celle de 254,90 euros au titre des congés payés y afférents. Sur les indemnités : Monsieur K... V... est bien-fondé en sa demande en paiement : - d'une somme de 10.927 euros représentant 3 mois de salaire au titre de l'indemnité de préavis, outre la somme de 1.092,70 euros au titre des congés payés, - d'une somme de 77.731,03 euros au titre de l'indemnité de licenciement calculée en application de l'article 26 de la convention collective nationale de la banque du 10 janvier 2000, sur la base d'1/13ème du salaire des 12 derniers mois d'exercice, soit la somme de 46.962,59 euros, dans la limite du plafond prévu pour un cadre de 24 x (13/14,5) d'une mensualité. Au vu de son âge, de son ancienneté, de la baisse justifiée de ses revenus salariaux au vu de ses avis d'imposition 2014 et 2015, Monsieur K... V... sera entièrement rempli du préjudice résultant de la rupture abusive de son contrat de travail par l'octroi d'une somme de 80.000 euros à titre de dommages-intérêts. [
] Sur le rappel de congés payés 2011 : La caisse régionale de crédit agricole mutuel du nord est ne justifie pas avoir soldé la totalité des congés payés 2011 de Monsieur K... V... de sorte qu'elle sera condamnée à lui payer la somme réclamée, soit la somme de 1.214 euros. Les créances de nature salariale sont assorties des intérêts au taux légal à compter de l'accusé de réception de la convocation devant le conseil de prud'hommes. Les conditions s'avèrent réunies pour condamner l'employeur fautif, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, à rembourser à l'organisme intéressé les indemnités chômage versées au salarié, du jour de son licenciement au jour de la décision judiciaire, dans la limite de six mois » ;

ALORS QU'un établissement de crédit est libre, sans avoir à en informer préalablement le comité d'entreprise, d'utiliser un système informatique destiné à assurer la sécurité des données bancaires et une maîtrise des risques, serait-il doté d'un système de traçabilité, pour vérifier si un salarié a procédé à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a relevé que l'employeur était un établissement de crédit tenu de se doter d'un système interne de vérification des opérations et procédures internes, de surveillance et de maîtrise des risques ; qu'en affirmant ensuite que cet « outil » permettait aussi de restituer l'ensemble des consultations effectuées par un employé et que dès lors, l'employeur aurait dû informer et consulter le comité d'entreprise avant d'utiliser le dispositif litigieux pour vérifier si le salarié procédait à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille, sans mieux caractériser que le système informatique et sa traçabilité avaient été introduits dans l'entreprise avec pour objectif de contrôler l'activité des salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 2323-22 du Code du travail dans sa rédaction applicable au litige, ensemble les articles 9 du Code civil et 9 du Code de procédure civile ;

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR condamné la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord Est à payer à M. V... la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral.

AUX MOTIFS QUE « Sur les dommages-intérêts pour préjudice moral : Monsieur K... V... justifie d'un préjudice moral résultant des circonstances entourant la rupture de son contrat de travail, puisqu'il s'est vu appeler au siège rémois pour se voir remettre sa convocation en main propre à l'entretien préalable, assortie de sa mise à pied. Le préjudice ainsi subi sera réparé par l'octroi d'une somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts ».

ALORS QUE le salarié ne peut prétendre, en sus d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à des dommages-intérêts pour préjudice moral distinct que si les juges caractérisent une faute de l'employeur dans les circonstances entourant la rupture ayant causé au salarié un préjudice moral distinct de celui résultant de son licenciement ; que la remise en main propre d'une convocation à l'entretien préalable et la mise à pied à titre conservatoire d'un salarié dont le licenciement est envisagé ne sont pas en soi des circonstances fautives ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever que M. V... s'était vu appeler au siège rémois pour se voir remettre sa convocation en main propre à l'entretien préalable, assortie de sa mise à pied, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une faute de l'employeur dans les circonstances entourant la rupture, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR condamné la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord Est à payer à M. V... la somme de 10 000 euros au titre de la perte de chance de percevoir l'indemnité de fin de carrière.

AUX MOTIFS QUE « Sur la perte de chance de percevoir l'indemnité de carrière : En l'absence de licenciement, Monsieur K... V... aurait pu prendre sa retraite en septembre 2015, et prétendre à une indemnité de retraite, calculée sur la base d'1/10ème par année de présence. En raison de son licenciement abusif, il a perdu une chance élevée de percevoir une telle indemnité alors qu'il se trouvait à moins de 3 ans de la retraite. Au vu de ces éléments, il lui sera octroyé une somme de 10.000 euros en réparation de ce préjudice, distinct des dommages-intérêts alloués au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemnité de licenciement ».

ALORS QUE l'indemnité de départ à la retraite ne peut pas se cumuler avec l'indemnité de licenciement ; qu'il en résulte que les juges du fond qui ont condamné l'employeur au paiement d'une somme à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ne peuvent pas retenir l'existence d'une perte de chance d'obtenir le paiement de l'indemnité conventionnelle de mise à la retraite ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a condamné l'employeur à payer au salarié une somme de 77 731,03 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'en allouant de surcroit au salarié une somme au titre de la perte de chance de percevoir une « indemnité de carrière » correspondant à l'indemnité conventionnelle de départ à la retraite, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.

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