27 février 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-25.160

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2020:C200247

Titres et sommaires

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Surendettement - Déchéance - Causes - article L. 761-1 du code de la consommation - Enumération limitative - Portée

Selon l'article L. 761-1 du code de la consommation, est déchue du bénéfice des dispositions du livre VII dudit code : 1° Toute personne qui a sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts ; 2° Toute personne qui a détourné ou dissimulé ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens ; 3° Toute personne qui, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, a aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou aura procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel ou pendant l'exécution du plan ou des mesures prévues à l'article L. 733-1 ou à l'article L. 733-4. Il résulte de ces dispositions que les causes de déchéance sont limitativement énumérées par la loi. Encourt par conséquent la cassation l'arrêt qui, pour confirmer un jugement ayant déchu les débiteurs du bénéfice de la procédure de surendettement, se fonde sur la négligence des débiteurs à informer la commission de leur changement d'adresse, puis de leur divorce, et sur leur désintérêt, ces éléments ne caractérisant pas l'une des causes de déchéance limitativement énumérées par l'article L. 761-1 du code de la consommation

Texte de la décision

CIV. 2

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 février 2020




Cassation partielle


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 247 F-P+B+I

Pourvoi n° V 18-25.160

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. S....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 26 septembre 2018.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 FÉVRIER 2020

M. U... S..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° V 18-25.160 contre l'arrêt rendu le 15 février 2018 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre D), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme G... W..., épouse S..., domiciliée [...] ,

2°/ à M. H... P..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire judiciaire et liquidateur judiciaire de M. U... S... et Mme G... S..., née W...,

3°/ à la société CIC Sud-Ouest, société civile de construction vente, dont le siège est [...] ,

4°/ à la société Heineken entreprise, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

5°/ à la société April assurances santé prévoyance, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

6°/ à la société CIC Banque Cio-Bro Crédit industriel de l'Ouest, société anonyme, dont le siège est [...] ,

7°/ au RSI Auvergne régime social des indépendants SICC secteur Sud, dont le siège est [...] ,

8°/ à la société CA Consumer finance ANAP, société anonyme, dont le siège est [...] ,

9°/ à la société CA France, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

10°/ à la société Crealfi, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. S..., et l'avis de M. Girard, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 janvier 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 761-1 du code de la consommation ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que les causes de déchéance sont limitativement énumérées par la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite du dépôt par M. et Mme S... d'une demande tendant au traitement de leur situation financière, le juge d'un tribunal d'instance a ouvert, par jugement du 23 février 2015, une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire ; que par un jugement du 19 octobre 2016, les débiteurs ont été déchus du bénéfice de la procédure de surendettement ;

Attendu que pour confirmer ce jugement, l'arrêt relève, d'une part, que M. et Mme S... ont quitté Montpellier en décembre 2015 et sont partis vivre en Haute-Savoie sans en informer les organes de la procédure de sorte que le mandataire judiciaire n'a pas été en mesure d'élaborer un bilan économique et social et que, de plus, ils n'ont pas informé la commission de l'introduction d'une procédure de divorce en juillet 2016, qui a donné lieu à une ordonnance de non-conciliation du 22 décembre 2016 entraînant une modification notable de leur situation respective et retient, d'autre part, qu'une telle négligence, à laquelle s'ajoute le désintérêt manifeste dont ont fait preuve les débiteurs, s'apparente à une erreur grossière équivalente à la mauvaise foi dès lors qu'elle a retardé, pendant deux ans, la mise en œuvre de la procédure et le règlement, fût-il partiel, des créanciers ;

Qu'en statuant ainsi, en fondant cette déchéance sur la négligence de M. et Mme S... à informer la commission de leur changement d'adresse, puis de leur divorce, et sur leur désintérêt, ces éléments ne caractérisant pas l'une des causes de déchéance limitativement énumérées à l'article L. 761-1 du code de la consommation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement rendu le 19 octobre 2016 par le juge du tribunal d'instance de Montpellier et condamné M. et Mme S... aux éventuels dépens d'appel, l'arrêt rendu le 15 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvant avant ledit arrêt et, pour être fait droit les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;

Condamne les sociétés CIC Sud-Ouest, Heineken entreprise, April assurances santé prévoyance, Banque CIC Ouest, CA consumer finance ANAP, CA France, Crealfi et l'URSSAF Auvergne, venant aux droits du RSI Auvergne, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. S....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la déchéance de la procédure de surendettement à l'encontre des époux S... et dit qu'en conséquence ils supporteront les frais afférents à la rémunération du mandataire judiciaire ;

AUX MOTIFS QUE les époux S..., alors qu'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire était ouverte à leur bénéfice le 23 février 2015, ont de leur propre aveu, quitté Montpellier en décembre 2015 et sont partis vivre en Haute Savoie sans en informer les organes de la procédure de sorte que Me P..., mandataire judiciaire, n'a pas été en mesure d'élaborer un bilan économique et social ; que de plus, les époux S... n'ont pas informé la commission de l'introduction d'une procédure de divorce en juillet 2016 qui a donné lieu à une ordonnance de non conciliation du 22 décembre 2016 entraînant une modification notable de leur situation respective ; que la cour considère qu'une telle négligence et le désintérêt manifeste dont ont fait preuve les débiteurs s'apparente à une erreur grossière équivalente à la mauvaise foi, dès lors qu'elle a retardé, pendant deux ans, la mise en oeuvre de la procédure et le règlement fût-il partiel des créanciers ;

1/ ALORS QUE l'article L. 761-1 du Code de la consommation prévoit la déchéance du bénéfice de la procédure de traitement du surendettement pour « 1° Toute personne qui a sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts ; 2° Toute personne qui a détourné ou dissimulé ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens ; 3° Toute personne qui, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, a aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou aura procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel ou pendant l'exécution du plan ou des mesures prévues à l'article L. 733-1 ou à l'article L. 733-4 » ; qu'en fondant cette déchéance en l'espèce sur la seule négligence des époux S... à informer la commission de leur changement d'adresse, puis de leur divorce, et leur prétendu désintérêt, la Cour d'appel a violé la disposition susvisée ;

2/ ALORS QU'en s'abstenant, en toute hypothèse, de préciser si le défaut d'information de la commission quant au déménagement et au divorce des époux S... était délibéré, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 761-1 du Code de la consommation.

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