20 mai 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-12.278

Première chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2020:C100315

Titres et sommaires

SANTE PUBLIQUE - Alcoolisme - Lutte contre l'alcoolisme - Propagande ou publicité - Publicité en faveur de boissons alcooliques - Licéité - Conditions - Détermination

Si la publicité pour les boissons alcooliques est licite, elle demeure limitée aux seules indications et références spécifiées à l'article L. 3323-4 du code de la santé publique et présente un caractère objectif et informatif, lequel ne concerne pas seulement les références relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit

Texte de la décision

CIV. 1

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 mai 2020




Cassation


Mme BATUT, président



Arrêt n° 315 FS-P+B

Pourvoi n° P 19-12.278










R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 MAI 2020

L'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie, dont le siège est [...], a formé le pourvoi n° P 19-12.278 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 2), dans le litige l'opposant à la société Kronenbourg, société par actions simplifiée, dont le siège est [...], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Duval-Arnould, conseiller, les observations de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de l'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Kronenbourg, et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 mars 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Duval-Arnould, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Mornet, Chevalier, Mme Kerner-Menay, conseillers, Mme Canas, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, Kloda, M. Serrier, Mmes Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Chaumont, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2018), l'Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie (l'ANPAA), reconnue d'utilité publique, a, par acte du 6 octobre 2015, assigné la société Kronenbourg (la société) afin que soit déclarée illicite la diffusion de deux films intitulés « La légende du Phoenix » et « Les territoires d'une légende », d'un jeu dénommé « Le jeu des territoires » et de publicités comportant le slogan « L'intensité d'une légende » et que soit ordonné leur retrait du site français http://www.grimbergen.fr. Elle a sollicité, en outre, l'allocation de dommages-intérêts.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

2. L'ANPAA fait grief à l'arrêt de rejeter l'ensemble de ses demandes, alors « que la loi indique explicitement les limites auxquelles est soumise la publicité pour les boissons alcooliques pour être licite ; que les indications figurant à l'intérieur de ces limites sont toutes informatives et objectives ; qu'il en est ainsi de l'indication du degré volumique d'alcool, de l'origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l'adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d'élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit, comme aussi, possiblement, des références relatives aux terroirs de production et aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine ou aux indications géographiques ainsi qu'aux références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit ; que, pour exclure que l'exigence d'objectivité des indications énumérées par la loi soit générale, comme condition de licéité de la publicité pour les boissons alcooliques, la cour a retenu que « les mentions ne doivent être purement objectives que lorsqu'elles sont relatives à la couleur, aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit, ce qui laisse la place à l'imagination des concepteurs des messages publicitaires lorsque la communication porte sur d'autres éléments de communication, tels que l'origine, la dénomination ou la composition du produit » ; que, cependant, en indiquant que les références à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit devaient être « objectives », la loi n'a nullement introduit une distinction entre ces références, qui devraient être objectives, et les autres indications ou références qui pourraient ne pas l'être ; qu'elle n'a fait que souligner la nécessité, pour ces références olfactives et gustatives, d'être elles-mêmes objectives, comme les autres, parce qu'elles étaient plus exposées à ne pas l'être ; qu'en se déterminant dès lors comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 3323-4 du code de la santé publique. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3323-2 et L. 3323-4 du code de la santé publique :

3. Selon le premier de ces textes, la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques dont la fabrication et la vente ne sont pas interdites, sont autorisées sur les services de communications en ligne à l'exclusion de ceux qui, par leur caractère, leur présentation ou leur objet, apparaissent comme principalement destinés à la jeunesse, ainsi que ceux édités par des associations, sociétés et fédérations sportives ou des ligues professionnelles au sens du code du sport, sous réserve que la propagande ou la publicité ne soit ni intrusive ni interstitielle.

4. En application du second, la publicité autorisée pour les boissons alcooliques est limitée à l'indication du degré volumique d'alcool, de l'origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l'adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d'élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit. Cette publicité peut comporter des références relatives aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine telles que définies à l'article L. 115-1 du code de la consommation ou aux indications géographiques telles que définies dans les conventions et traités internationaux régulièrement ratifiés. Elle peut également comporter des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit.

5. Il en résulte que, si la publicité pour les boissons alcooliques est licite, elle demeure limitée aux seules indications et références spécifiées à l'article L. 3323-4 précité, et présente un caractère objectif et informatif (1re Civ., 1er juillet 2015, pourvoi n° 14-17.368, Bull. 2015, I, n° 166), lequel ne concerne donc pas seulement les références relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit.

6. Pour rejeter les demandes de l'ANPAA, l'arrêt retient que les mentions ne doivent être purement objectives que lorsqu'elles sont relatives à la couleur, aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit, ce qui laisse la place à l'imagination des concepteurs des messages publicitaires lorsque la communication porte sur d'autres éléments, tels que l'origine, la dénomination ou la composition du produit. Il ajoute, lors de l'examen du contenu des films et du jeu litigieux, que la communication sur les origines et la composition du produit n'a nullement à être objective et peut parfaitement être hyperbolique.

7. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne la société Kronenbourg aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Kronenbourg et la condamne à payer à l'Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour l'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie

Le pourvoi fait grief à l'arrêt informatif attaqué d'AVOIR débouté l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et en Addictologie de ses demandes,

AUX MOTIFS QU'il ressort des articles L. 3323-2 et L. 3323-4 du code de la santé publique que la publicité, lorsqu'elle est faite en faveur des boissons alcooliques, est autorisées sous les conditions énoncées ci-dessus ; que la publicité se définissant comme toute forme de communication faite dans le cadre d'une activité commerciale industrielle, artisanale ou libérale dans le but de promouvoir la fourniture de biens ou services, il ne saurait être retenu que la publicité pour l'alcool est illicite au seul motif qu'elle serait attractive ou qu'elle inciterait à l'achat ou à la consommation de boissons alcoolisées, seule l'incitation à une consommation excessive contrevenant à l'objectif de santé publique de lutte contre l'alcoolisme défini par le législateur ; que, s'agissant du contenu du message publicitaire qui, par nature, ne saurait être purement informatif, le texte sus-mentionné, dont il convient de rappeler qu'il constitue une incrimination pénale, n'autorise que l'indication du degré volumique d'alcool, de l'origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l'adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d'élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit, ainsi que des références relative aux terroirs de production et aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine ou aux indications géographiques ainsi que des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit ; qu'il s'ensuit que les mentions ne doivent être purement objectives que lorsqu'elles sont relatives à la couleur, aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit, ce qui laisse la place à l'imagination des concepteurs des messages publicitaires lorsque la communication porte sur d'autres éléments de communication, tels que l'origine, la dénomination ou la composition du produit, ainsi que le relève l'appelante ; qu'enfin, l'ouverture des services de communications en ligne à la publicité pour les boissons alcoolisées autorise le recours à toutes les formes de communication possibles sur ce média, à l'exclusion des publicités intrusives ou interstitielles, dès lors que seul le contenu du message est réglementé, ce qui, au surplus, impose qu'il soit construit autour des éléments de communication autorisés ; que l'ANPAA ne peut pas limiter son analyse à des membres de phrases, dont l'un est qualifié de slogan, isolés du texte et du contenu visuel qui leur donnent sens ; qu'elle ne peut pas plus critiquer le fait qu'il s'agisse d'une oeuvre de création et non d'une information objective ; que le film La légen de du phoenix est décrit comme suit, au procès-verbal de constat dressé le 17 septembre 2015 à la demande de l'ANPAA : « Est alors présenté un film d'animation musicale d'une durée de 1,22 mm en sept épisodes à partager sur Facebook avec accès à tweeter et des bonus siglés sous le signe + permettant de découvrir des secrets à travers les civilisations perse, grecque et romaine. Il est fait un parallèle avec l'histoire de l'abbaye de Grimbergen depuis son incendie en 1128, sa destruction en 1566, son démantèlement en 1798 (...). Au fur et à mesure que le film se déroule, sept épisodes sont accessibles en cliquant sur le menu apparaissant. Le texte complet est le suivant : "Le Phoenix a marqué les civilisations à travers les âges" apparition menu épisode I LES PERSES, "les Perses contaient sa longévité légendaire" apparition menu épisode 2 LES GRECS "les Grecs vénéraient sa régénération mythique" apparition menu épisode 3 LES ROMAINS "les romains puisaient dans ses forces infinies" apparition menu épisode 4 1142 "les hommes épris de liberté voyaient en lui la promesse d'une nouvelle vie. Fondée en 1128, l'abbaye de Grimbergen fut ravagée dans un terrible incendie en 1142, puis détruite en 1566". Apparition menu épisode 5 1566 "lors des guerres de religion" et apparition épisode 6 1798 "démantelée en 1798 A chaque destruction elle fut rebâtie. Le Phoenix devint son emblème et lui inspira sa devise « Ardet nec consumitur » (elle brûle mais ne se consume pas) "apparition menu épisode 7+ La bière "Une bière au caractère unique est née de cette abbaye et de son histoire légendaire". Episode 1 LES PERSES. Apparaît après l'introduction un menu épisode 1 intitulé "Les Perses" apparaît, je clique dessus, on accède à un nouveau film d'animation musicale présentant le Phoenix survolant des paysages symbolisant la civilisation perse avec le message vocal suivant : "les Perses croyaient en l'existence d'un oiseau capable de renaître toujours plus fort. Le Phoenix leur donnait l'espoir que chaque jour pouvait être meilleur "Un bandeau indique « Félicitations vous avez découvert 1/7 secret du Phoenix. Épisode 2 LES GRECS Je clique sur "reprendre le film" retournant ainsi sur le film initial la légende du phoenix apparaît alors un menu Episode 2 intitulé "Les Grecs" je clique dessus j'accède à un nouveau film d'animation musicale avec le message vocal suivant : "Pour les Grecs, Seul le Phoenix pouvait vaincre le temps. Selon eux il apportait la renaissance matérielle et spirituelle à qui l'honorait de sa croyance" Un bandeau indique "Félicitations. Vous avez découvert 1/7 secrets du Phoenix" ; que le constat se poursuit par la description des cinq autres épisodes ouverts et fermés ainsi qu'il est indiqué ci-dessus et dont les messages vocaux sont les suivants : - Chez les romains le Phoenix symbolisait les cycles de mort et de résurrection. Il protégeait ainsi les hommes à chaque étape de leur vie (épisode 3) ; - La Guerre de Grimbergen opposant les seigneurs à leur suzerain dura presque 20 ans et s'acheva par la destruction de l'abbaye dans un terrible incendie (épisode 4) ; - Au fil des siècles le calme revint à Grimbergen et l'abbaye fut reconstruite, mais les guerres de religion mirent fin à cette période de prospérité (épisode 5) ; - l'abbaye de Grimbergen fut restaurée et agrandie mais quand les domaines religieux devinrent biens nationaux, les pères durent quitter leur abbaye qui fut démantelée (épisode 6), - la recette de la bière a su elle aussi résister au fil des siècles pour faire ressurgir aujourd'hui encore les saveurs inattendues que l'on découvre à chaque dégustation (épisode 7) ; qu'il convient d'ajouter que ce message prend la forme d'un récit narratif commentant le film dont les premières images consistent en l'ouverture d'un manuscrit enluminé à l'emblème de la brasserie, dont s'envole le phoenix qui va survoler des animations en ombres chinoises évocatrices des civilisations perse, grecque et romaine, les constructions et destructions successives de l'abbaye et la fabrication de la bière ; que ce livre ouvert apparaît lorsque le narrateur évoque la première destruction de l'abbaye, puis le choix de son emblème et il est refermé à la fin du film ; considérant qu'il en ressort que la société Kronenbourg communique, ainsi que le conclut le texte accompagnant son film publicitaire (une bière au caractère unique est née de cette abbaye et de son histoire légendaire), sur l'origine de ses produits, au travers de l'abbaye de Grimbergen dont la devise et l'emblème, le phoenix, sont des éléments distinctifs de sa marque figurant sur son produit sans que l'ANPAA en conteste la légalité ; qu'en effet, l'origine du produit peut être historique ou géographique et ne peut pas être limitée à son territoire actuel de production ; que, contrairement aux allégations de l'ANPAA, l'appelante justifie non seulement des liens historiques de son produit avec l'abbaye Grimbergen, mais également de ses liens actuels, le Père K... N... de l'Abbaye de Grimbergen (pièce 12 de l'appelante) attestant le 18 octobre 2018, qu'une licence de brasseur a été accordée par l'abbaye à la famille X... en 1958, de la transmission de celle-ci, de l'implication des Pères de l'abbaye dans le développement et l'approbation des recettes des bières Grimbergen, et que la bière est brassée conformément aux anciennes recettes de l'abbaye de Grimbergen et sous la supervision de l'abbaye ; que dès lors, le film de la société Kronenbourg ne peut encourir de critique lorsqu'il décrit l'histoire de l'Abbaye de Grimbergen et vient expliciter le choix qu'elle a fait de son emblème et de sa devise, du fait de ses renaissances successives après de multiples destructions ; que le choix de recourir à un récit narratif évoquant, en premier lieu, ce qu'a été, à travers les âges, le phoenix, emblème de la marque et dont la société Kronenbourg peut faire usage dans sa communication, n'altère nullement le fait que le contenu du message porte sur l'origine du produit ; que, contrairement aux allégations de l'ANPAA, le message publicitaire rappelé ci-dessus lorsqu'il évoque le phoenix à travers les âges ne fait référence qu'aux croyances liées à cet animal mythique sans parer la bière Grimbergen des vertus supposées attribuées au Phoenix et rendues ainsi accessibles à celui qui consommera cette bière ni laisser croire que cette boisson alcoolisée est dotée de propriétés thérapeutiques ou améliorant les performances physiques ou psychiques ou intellectuelles en laissant espérer une renaissance matérielle ou spirituelle ; que d'ailleurs, le septième épisode de ce film (intitulé la bière) associe cette notion de renaissance non aux propriétés du produit mais à sa recette qui a su résister au fil des siècles ; que l'ANPAA se contente d'évoquer la notion de message subliminal, c'est à dire conçu pour être perçu à un niveau au-dessous du niveau de conscience, sans développer la moindre argumentation tendant à caractériser l'existence d'un tel message ; qu'enfin, la conclusion de ce message publicitaire : une bière au caractère unique est née de cette abbaye et de son histoire légendaire, qualifiée de slogan, met en avant la spécificité des origines du produit, étant rappelé que la communication sur les origines n'a nullement à être objective et peut parfaitement être hyperbolique ; que la cour ne peut retenir, en l'absence de démonstration pertinente en ce sens, que la formule employée, qui plus est extraite de son contexte, viendrait valoriser la consommation de cette boisson en la présentant comme un mode de vie élitiste lié aux pouvoirs extraordinaires du phoenix ou que cette publicité présente la consommation d'alcool comme une aide pour surmonter la normalité et ses problèmes ; que dès lors, l'ANPAA échoue dans la preuve qui lui incombe de l'illégalité de ce film publicitaire, La légende du phoenix ; que, l'huissier instrumentaire décrit comme suit, le film publicitaire dénommé sur le site Grimbergen - Le film et intitulé par les parties les territoires d'une légende : Ce film d'animation de 57 secondes s'ouvre sur un blason au nom de Grimbergen sur lequel un rapace pose lourdement sa patte. Apparaît en gros plan l'oeil de cet oiseau qui s'envole ait-dessus d 'une carte représentant des territoires. Au fur et à mesure de l'envol de cet oiseau, les décors se construisent les uns à la suite des autres, sous forme de paysage ou de monuments, pour présenter quatre verres de bière de couleurs différentes (rouge, brune, blanche, jaune) portant le blason de Grimbergen agrémenté du phoenix jaune, chacun dans un décor particulier. Un territoire survolé porte le nom de "la cascade blanche". Le film se termine par la sortie de terre de cette abbaye, dans lequel vol un phoenix qui se pose en criant et en déployant ses ailes au pied d'un verre de bière au nom de Grimbergen. La scène finale présente quatre bouteilles de bière blanche, rouge, blonde et ambrée avec un verre empli de bière. Sur le côté apparaissent une bougie et de vieux manuscrits ainsi qu'un appareil astronomique et il est proposé de "tester la bière Grimbergen" ; qu'il convient, au préalable, de relever que l'huissier instrumentaire est peu disert dans sa description, et que la consultation du cd-rom annexé à son procès-verbal permet de constater d'une part, que ce qu'il qualifie dans un premier temps de rapace est l'une représentation traditionnelle du phoenix soit un héron pourpré (la pièce 35 de l'intimée) oiseau pourvu de serres, l'éclat doré lorsqu'une serre vient frapper le blason, puis ce même éclat autour de l'oeil excluant toute confusion entre un rapace et cet animal mythique, emblème de la marque Grimbergen qui se rattache à ses origines et qui s'envole dès la quatrième seconde du film ; que, de même, la description du dernier plan est incomplète, celui-ci, ainsi qu'il ressort de l'arrière-plan et des éléments de décors non cités (fenêtres, rayonnage de livres, plumes et instruments d'écriture), évoque la bibliothèque d'une abbaye, monument qui figure au plan précédent ; qu'il renvoie donc à la contribution monastique dans la conception du produit ; que l'abbaye représentée de manière stylisée dans ce film (sur la carte des territoires puis dans les derniers plans) est, sans contestation possible, celle de l'abbaye Grimbergen ainsi que la cour peut s'en convaincre à l'examen des photographies de l'édifice reproduites dans les conclusions de l'appelante ; que les autres éléments ne sont critiqués par l'ANPAA (la carte représentant les territoires, les décors sous forme de paysage ou monuments, un territoire survolé portant le nom de la cascade blanche) que pour en conclure que le film n'a d'autre objectif que d'inciter le consommateur à croire aux vertus légendaires de la bière Grimbergen en s 'inspirant de la série à succès Game of Thrones ; qu'en conclusion, force est de constater que le film, s'ouvre sur le blason de la marque et l'un de ses éléments distinctifs, le phoenix, suit le vol de celui-ci au-dessus d'une maquette en mouvement sur laquelle figure l'abbaye de Grimbergen, puis des décors et paysages qui se construisent les uns à la suite des autres, autour de certains des ingrédients entrant dans la composition ou venant parfumer les différentes bières ; qu'il ne développe son message qu'autour d'éléments licites : les origines et la composition du produit pour lesquelles aucune objectivité n'est requise ; qu'enfin, l'allégation d'une inspiration tirée du générique d'une série télévisée célèbre, que l'ANPAA n'établit pas, faute d'apporter aux débats des éléments de comparaison, n'est pas, à la supposer prouvée, illicite dès lors que le message publicitaire se rapporte à des contenus autorisés par la loi, qu'il n'incite pas l'internaute à une consommation excessive et qu'il ne s'adresse pas aux mineurs, l'accès au site leur étant refusé ; que le constat du 17 septembre 2015, se poursuit par l'évocation de la vidéo Le jeu des territoires ; qu'il est reproduit une impression d'écran de la carte ouvrant ce message intitulé Grimbergen - les territoires d'une légende sur laquelle figure, entourant l'abbaye du phoenix surmontée de la silhouette de l'abbaye de Grimbergen et du phoenix, son emblème plusieurs "territoires", dont La cascade blanche et La crête enneigée ; que l'huissier écrit je clique sur la Cascade blanche, un bandeau annonce apparaît : comment jouer ? Cliquer sur un maximum de fleurs dans le temps imparti. Je clique sur je joue. Le décor : plusieurs cascades et un verre de bière au milieu de l'écran. Des fleurs apparaissent au fur et â mesure et disparaissent lorsque (je) clique dessus. Un score de points acquis apparaît et on me propose de retenter ma chance pour améliorer mon score. On me propose de m'inscrire pour sauvegarder mon score. Je reviens ensuite sur la carte, je clique sur la "crête enneigée" Apparaît un fond montagneux et au milieu un verre de bière Grimbergen. On me propose d'appuyer le plus vite possible sur la barre espace pour tenter de retire le calice du rocher, Je clique sur "Je joue" et utilise ma barre d 'espacement pour faire monter le verre de bière. On me précise qu'il me reste deux essais que je peux publier sur mon mur Facebook ou découvrir le site Grimbergen ; que les autres décors du jeu ne sont pas décrits au constat d'huissier, mais qu'il ressort des conclusions de l'ANPAA qu'ils s'organisent tous sur un arrière-fond permettant de découvrir, reconstruire des verres de bière ou reconstituer des paires identiques de verres, de bouteilles ou de packs de bières ; que l'ANPAA qui supporte la charge de la preuve de l'illicéité du message, n'apporte aux débats aucun élément permettant de démentir les affirmations de la société Kronenbourg quant à la référence dans les arrières fonds à l'origine, la composition des bières de la gamme Grimbergen ou à leur couleur ou à leur goût ; qu'ainsi qu'il est dit ci-dessus, la forme de la communication en ligne n'est pas réglementée au-delà de certaines formes (publicité intrusive ou interstitielle) et dès lors, il ne peut être fait grief à la société Kronenbourg du caractère ludique de cette communication qui permet seulement au consommateur d'accumuler des points, sans d'autre objectif d'obtenir un ou le meilleur score ; qu'il s'ensuit qu'en l'absence de démonstration de référence subjective aux couleurs ou aux caractéristiques gustatives ou olfactives du produit et dès lors qu'il ne constitue pas une incitation à une consommation excessive d'alcool, le jeu incriminé n'est pas illégal, le fait que la société Kronenbourg ait dénommé ses territoires (la cascade blanche, le plateau de Kriek, c'est-à-dire de bière, la réserve de Grimbergen etc.) n'étant pas suffisant pour constituer l'incitation illicite à la consommation qu'y voit l'ANPAA ; qu'il ressort de ce qui précède que L'ANPAA échoue dans la preuve qui lui incombe du caractère illicite des messages publicitaires qu'elle incrimine, la décision déférée devant être infirmée en ce qu'elle interdit leur usage et en ordonne le retrait ; que l'ANPAA doit également être déboutée de sa demande de voir étendre l'interdiction du slogan l'intensité d'une légende à la presse écrite ; que l'infirmation de la décision dans ses dispositions susmentionnées exclut que l'ANPAA puisse prétendre obtenir des dommages et intérêts du fait de la diffusion des messages incriminés, la décision devant être confirmée en ce qu'elle déboute l'ANPAA de sa demande indemnitaire ;

1° ALORS QUE l'alcoolisme étant la deuxième cause de mortalité évitable en France et ayant un coût social extrêmement élevé, les pouvoirs publics utilisent différents moyens de le combattre, notamment des restrictions légales apportées à la publicité des boissons alcooliques ; que la publicité autorisée pour ces boissons est « limitée à » l'indication du degré volumique d'alcool, de l'origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l'adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d'élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit, encore qu'elle puisse comporter des références relatives aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine ou aux indications géographiques, ainsi que des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit ; qu'ainsi, si la publicité des boissons alcooliques entre dans le genre des formes de communication promotionnelle de biens ou services, elle y est néanmoins soumise à de strictes limitations, déterminées par sa spécificité, pour des raisons de santé publique, comme la publicité pour les armes, en sa propre espèce, est strictement limitée pour des raisons de sécurité publique ; que la publicité pour les boissons alcooliques n'est dès lors légale que si elle se limite aux indications explicitement prévues par la loi, c'est-à-dire si elle a un caractère rigoureusement objectif, informatif et technique ; qu'en jugeant dès lors, d'une part, que le contenu d'un message publicitaire en faveur de ces boissons ne peut pas être purement informatif et, d'autre part, que l'incitation à leur consommation ne suffit pas à rendre le message publicitaire illégal, au motif que cette publicité est une forme comme une autre de communication faite dans le but de promouvoir la fourniture d'un bien, la cour a violé l'article L. 3323-4 du code de la santé publique ;

2° ALORS QUE la finalité poursuivie par les pouvoirs publics dans leur lutte contre l'alcoolisme est de limiter la consommation excessive d'alcool ; que les dispositions relatives à la publicité des boissons alcooliques sont un des « leviers » de cette politique générale, actionné pour agir sur l'environnement publicitaire afin de le rendre cohérent avec l'ensemble des mesures de santé publique mises en oeuvre ; que ces dispositions ont cependant un objet propre, qui n'est pas d'empêcher une consommation excessive d'alcool mais de définir les indications et les références objectives auxquelles est soumise la publicité autorisée en faveur des boissons alcooliques ; que, dès lors, est légale la publicité qui respecte ces critères, pour apporter une information objective et technique sur les boissons promues, et est illégale celle qui les dépasse ou les contourne par différents artifices ; qu'en retenant dès lors que seule l'incitation à une consommation excessive était prohibée par la loi, la cour a violé l'article L. 3323-4 du code de la santé publique ;

3° ALORS QUE la cour a retenu que l'article L. 3323-4 du code de la santé publique, qui « constitue une incrimination pénale, n'autorise que l'indication du degré volumique d'alcool, de l'origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l'adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d'élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit, ainsi que des références relatives aux terroirs de production et aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine ou aux indications géographiques ainsi que des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit » ; qu'en retenant dès lors que « le contenu du message publicitaire (...), par nature, ne saurait être purement informatif », quand tous ces éléments sont informatifs et objectifs, la cour n'a pas tiré les conséquences de ses constatations, en violation du texte susvisé ;

4° ALORS QUE la loi indique explicitement les limites auxquelles est soumise la publicité pour les boissons alcooliques pour être licite ; que les indications figurant à l'intérieur de ces limites sont toutes informatives et objectives ; qu'il en est ainsi de l'indication du degré volumique d'alcool, de l'origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l'adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d'élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit, comme aussi, possiblement, des références relatives aux terroirs de production et aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine ou aux indications géographiques ainsi qu'aux références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit ; que, pour exclure que l'exigence d'objectivité des indications énumérées par la loi soit générale, comme condition de licéité de la publicité pour les boissons alcooliques, la cour a retenu que « les mentions ne doivent être purement objectives que lorsqu'elles sont relatives à la couleur, aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit, ce qui laisse la place à l'imagination des concepteurs des messages publicitaires lorsque la communication porte sur d'autres éléments de communication, tels que l'origine, la dénomination ou la composition du produit » ; que, cependant, en indiquant que les références à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit devaient être « objectives », la loi n'a nullement introduit une distinction entre ces références, qui devraient être objectives, et les autres indications ou références qui pourraient ne pas l'être ; qu'elle n'a fait que souligner la nécessité, pour ces références olfactives et gustatives, d'être elles-mêmes objectives, comme les autres, parce qu'elles étaient plus exposées à ne pas l'être ; qu'en se déterminant dès lors comme elle l'a fait, la cour a violé l'article L. 3323-4 du code de la santé publique ;

5° ALORS QUE la publicité autorisée pour les boissons alcooliques est limitée à l'indication du degré volumique d'alcool, de l'origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l'adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d'élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit ; qu'elle peut comporter des références relatives aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine ou aux indications géographiques, et comporter des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit ; que, pour justifier l'illégalité du film publicitaire intitulé « la légende du phoenix », l'ANPAA avait soutenu que cette publicité exaltait les qualités de la bière par une mise en scène sonore et visuelle qui les associait au renouvellement de différentes civilisations, à l'histoire elle-même renouvelée de l'abbaye de Grimbergen et à la puissance régénératrice du phoenix, faisant ainsi participer le produit promu et sa consommation de cette mythologie et de l'imaginaire ainsi magnifiés ; que cette critique mettait ainsi en évidence que le film publicitaire litigieux utilisait des éléments qui étaient étrangers aux seules énumérations légales ; que, pour écarter cette critique, la cour a retenu, sur le fondement du constat d'huissier du 17 novembre 2015, qui décrit dans trois des films litigieux les croyances de différentes civilisations (grecque, perse, romaine) autour du Phoenix et des pouvoirs qui lui sont prêtés, que le film mis en cause rappelait que le produit avait des liens historiques et actuels avec ladite abbaye, laquelle avait connu des reconstructions successives, et que « le choix de recourir à un récit narratif évoquant ce qu'a été, à travers les âges, le Phoenix, emblème de la marque, et dont la société Kronenbourg peut faire usage dans sa communication n'altère nullement le fait que le contenu du message porte sur l'origine du produit » ; qu'en se déterminant ainsi, quand la mise en scène utilisée dans la publicité animée, qui ne se bornait pas à rappeler les origines historiques du produit, mais qui l'associait aux origines d'une légende entourant un oiseau imaginaire aux vertus mythiques, excédait les critères limités de la loi, la cour a violé l'article L. 3323-4 du code de la santé publique ;

6° ALORS QUE la publicité autorisée pour les boissons alcooliques est limitée à l'indication du degré volumique d'alcool, de l'origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l'adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d'élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit ; qu'elle peut comporter des références relatives aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine ou aux indications géographiques, et comporter des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit ; que, pour justifier la légalité contestée du film publicitaire, la cour a retenu que la société Kronenbourg établissait que la devise de l'abbaye de Grimbergen et son « emblème, le phoenix, sont des éléments distinctifs de sa marque figurant sur son produit », sans que l'ANPAA ne le conteste, et que « le phoenix (est un) emblème de la marque (...) dont la société Kronenbourg peut faire usage dans sa communication » ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs étrangers aux critères légaux et impropres à justifier la légalité de la publicité mise en cause, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3323-4 du code de la santé publique ;

7° ALORS, en toute hypothèse, QUE la cour a elle-même retenu que la publicité litigieuse, qu'elle a décrit au travers du procès-verbal du 17 septembre 2015, recourait à une mise en scène de la bière liée à la légende du phoenix et à sa puissance « matérielle et spirituelle » traversant les siècles (p. 5) et transposée à sa propre histoire, de reconstruction en reconstruction de l'abbaye de Grimbergen ; qu'elle a également constaté que le film publicitaire mettait en oeuvre « un manuscrit enluminé (...) dont s'envole le phoenix », qui survole tour à tour l'histoire des civilisations, celle de l'abbaye « et la fabrication de la bière », et qu'il était accompagné d'un slogan faisant référence à « une bière au caractère unique (...) née de cette abbaye et de son histoire légendaire » ; qu'il s'ensuivait que la publicité en question, présentant cette bière comme unique, par une mise en scène fantastique destinée à la magnifier aux yeux du consommateur en s'adressant à son imaginaire, utilisait, pour la promotion de ce produit, des éléments étrangers aux seules indications énumérées par l'article L. 3323-4 du code de la santé publique, ce qui en faisait une publicité illégale ; qu'en jugeant le contraire, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de ce texte ;

8° ALORS QUE, pour être licite, une publicité pour les boissons alcooliques doit se limiter aux indications objectives définies par la loi ; que, pour juger encore que la publicité du film La légende du phoenix était légale, la cour a considéré que le message publicitaire qui l'accompagnait, « une bière au caractère unique est née de cette abbaye et de son histoire légendaire », faisait uniquement référence aux origines historiques du produit, en concédant implicitement que ce message n'était pas objectif, puisque légendaire, mais en le justifiant au motif que « la communication sur les origines n'a nullement à être objective et peut parfaitement être hyperbolique » ; qu'en se déterminant ainsi, quand le constat du caractère hyperbolique et non objectif de ce slogan aurait dû conduire la cour à constater l'illégalité de la publicité litigieuse, la cour a violé l'article L. 3323-4 du code de la santé publique ;

9° ALORS QUE, pour être licite, une publicité pour les boissons alcooliques doit se limiter aux indications objectives définies par la loi ; que, s'agissant du film d'animation Les territoires d'une légende, la cour a constaté avec l'huissier, tout en relevant qu'elle était incomplète et ornithologiquement inexacte, qu'il mettait en scène le vol d'un rapace s'envolant au-dessus d'une carte représentant des territoires où les paysages successifs, de décor en décor, débouchent sur quatre verres de bières ; qu'elle a relevé que ce film s'achevait sur le vol d'un phoenix déployant ses ailes au pied d'un verre de bière Grimbergen, puis sur la présentation finale de quatre bouteilles de bière et d'un verre empli de cette boisson, avec la proposition de "tester la bière Grimbergen" (arrêt, p. 7, § 4) ; que cette mise en scène, suggestive, qui s'achève sur une invitation explicite à la consommation d'alcool, est étrangère aux seules indications énumérées par l'article L. 3323-4 du code de la santé publique ; qu'en la déclarant pourtant légale, la cour a violé le texte susvisé ;

10° ALORS QUE, pour être licite, une publicité pour les boissons alcooliques doit se limiter aux indications définies par la loi, qui sont toutes objectives ; pour justifier encore la légalité du film publicitaire d'animation Les territoires d'une légende, la cour a admis, implicitement, que les éléments développé dans son message n'étaient pas objectifs ; qu'elle a cependant jugé que cette publicité « ne développe son message qu'autour d'éléments licites : les origines et la composition du produit pour lesquelles aucune objectivité n'est requise » ; qu'en se déterminant ainsi, au motif erroné qu'aucune objectivité ne serait requise par la loi pour les références aux origines et à la composition du produit, la cour a violé l'article L. 3323-4 du code de la santé publique ;

11° ALORS QUE, pour être licite, une publicité pour les boissons alcooliques doit se limiter aux indications définies par la loi, qui sont toutes objectives ; que, s'agissant du jeu Le jeu des territoires, la cour, se rapportant au procès-verbal de l'huissier du 17 septembre 2015, a relevé notamment qu'en cliquant sur la représentation d'une « cascade blanche », le consommateur était invité à cliquer encore sur un maximum de fleurs en un temps imparti, puis qu'un verre de bière apparaissait au milieu de l'écran, puis qu'il était invité à cliquer sur une « crête enneigée », ce qui faisait apparaître un fond montagneux et, au milieu, un verre de bière Grimbergen ; qu'il était ensuite sollicité d'appuyer le plus vite possible sur la barre d'espacement pour tenter de « retirer le calice du rocher », ce qui permettait de faire monter le verre de bière, avant que cette invitation ne soit faite de publier son résultat sur Facebook « ou découvrir le site Grimbergen » ; qu'il résultait de ces constatations que les éléments décrits, tous étrangers aux seules indications prévues par la loi, constituaient une mise en scène instrumentalisant le jeu et l'imaginaire pour focaliser l'attention du consommateur, étape après étape, sur la bière ; qu'en jugeant pourtant que le message publicitaire ainsi délivré était légal, au motif qu'il ne s'agirait que d'une « communication ludique » permettant « seulement au consommateur d'accumuler des points, sans autre objectif que d'obtenir un ou le meilleur score », la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 3323-4 du code de la santé publique ;

12° ALORS QUE la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques dont la fabrication ou la vente ne sont pas interdites sont autorisées exclusivement, en particulier, sur les services de communication en ligne à l'exclusion de ceux qui, par leur caractère, leur présentation ou leur objet, apparaissent comme principalement destinés à la jeunesse, ainsi que ceux édités par des associations, sociétés et fédérations sportives ou des ligues professionnelles au sens du code du sport, sous réserve que la propagande ou la publicité ne soit ni intrusive ni interstitielle : que la publicité autorisée pour les boissons alcooliques est limitée aux indications objectives énumérées par la loi ; que, pour justifier la publicité faite par le jeu Le jeu des territoires, visible sur internet, la cour a retenu que « la forme de la communication en ligne n'est pas réglementée au-delà de certaines formes (publicité intrusive ou interstitielle) », de sorte que l'ANPAA ne pouvait faire grief au message publicitaire véhiculé par le jeu susvisé de son caractère ludique ; qu'en retenant ainsi erronément que la publicité en ligne avait pour seule limite de ne pas être intrusive ou interstitielle, quand elle est également bornée par les indications objectives qui conditionnent la licéité de toute publicité, la cour a violé les articles L. 3323-2 et L. 3323-4 du code de la santé publique ;

13° ALORS QUE la publicité pour les boissons alcooliques, pour être licite, doit respecter les limites des indications prévues par la loi, qui sont toutes objectives ; que, pour justifier encore la légalité du jeu publicitaire Le jeu des territoires, la cour a retenu que l'ANPAA ne démontrait pas qu'il y eût une référence « subjective aux couleurs ou aux caractéristiques gustatives ou olfactives du produit » ; que, ce faisant, la cour a, à nouveau, fondé sa décision sur cette interprétation erronée selon laquelle les seules indications légales qui devraient être objectives seraient la couleur, le goût et le parfum du produit ; qu'en se déterminant ainsi, elle a violé l'article L. 3323-4 du code de la santé publique par fausse application ;

14° ALORS, enfin, QUE la loi sur la publicité des boissons alcooliques a pour objet propre de définir les éléments objectifs et techniques auxquels cette publicité est soumise pour être licite ; que, pour justifier que le jeu publicitaire Le jeu des territoires était licite, bien qu'il ne comportât aucun élément objectif autorisé par la loi, la cour a retenu que ce jeu n'incitait pas à une consommation excessive de l'alcool ; qu'en se déterminait ainsi, par des motifs impropres à justifier sa décision, la cour a violé l'article L. 3323-4 du code de la santé publique par fausse application.

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