19 novembre 2020
Cour d'appel de Paris
RG n° 19/12547

Pôle 6 - Chambre 2

Texte de la décision

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 2



ARRET DU 19 NOVEMBRE 2020



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/12547 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAFOT



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mai 2019 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 18/14222







APPELANTES



Fédération FEDERATION DES TRAVAILLEURS DE LA METALLURGIE CGT Prise en la personne de Monsieur [N] [Z], dument mandaté

[Adresse 1]

[Localité 7]



Représentée par Me Marie-laure DUFRESNE-CASTETS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1485



Syndicat CGT INTERIM Pris en la personne de son secrétaire général

[Adresse 1]

[Localité 7]



Représentée par Me Marie-laure DUFRESNE-CASTETS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1485 et par Maître JORQUERA, du Barreau de Grenoble, avocat plaidant







INTIMEES



Syndicat L'UNION DES INDUSTRIES ET MÉTIERS DE LA MÉTALLURGIE (UIMM) Union de syndicats représentée par son Président, M. [I] [F],

[Adresse 4]

[Localité 5]



Représentée par Me Bruno REGNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050



Syndicat UNION DES INDUSTRIES ET MÉTIERS DE LA MÉTALLURGIE (UIMM) union de syndicats représentée par son président, M.[I] [F],

[Adresse 4]

[Localité 5]



Représentée par Me Bruno REGNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050



FEDERATION DES CADRES, DE LA MAITRISE ET DES TECHN ICIENS DE LA METALLURGIE CFE-CGC Prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représentée par Me Florence GUARY, avocat au barreau de PARIS, toque : R271



Syndicat FEDERATION DES CADRES, DE LA MAITRISE ET DES TECHN ICIENS DE LA METALLURGIE CFE-CGC

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représentée par Me Florence GUARY, avocat au barreau de PARIS, toque : R271



Syndicat FEDERATION CONFEDEREE FO DE LA METALLLURGIE

[Adresse 6]

[Localité 5]



Représentée par Me Florence GUARY, avocat au barreau de PARIS, toque : R271



Syndicat FEDERATION DE LA METALLURGIE CFE-CGC CFDT

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représentée par Me Florence GUARY, avocat au barreau de PARIS, toque : R271



Syndicat FEDERATION GÉNÉRALE DES MINES ET DE LA MÉTALLURGIE CFDT

[Adresse 3]

[Localité 5]



Représentée par Me Florence GUARY, avocat au barreau de PARIS, toque : R271





COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 24 Septembre 2020, en audience publique et en double rapporteur, les parties ne s'y étant pas opposées, devant madame Mariella LUXARDO présidente, chargée du rapport et Monsieur Didier MALINOSKY, magistrat honoraire.



Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de



Mme Mariella LUXARDO, Présidente

M. François LEPLAT, Président

M. Didier MALINOSKY, magistrat honoraire





Greffier, lors des débats : M. Olivier POIX







ARRET :



- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mariella LUXARDO, Présidente et par Catherine CHARLES, Greffier.




EXPOSÉ DU LITIGE



Le 29 juin 2018, l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie (UIMM), la Fédération des cadres, de la maîtrise et des techniciens de la métallurgie CFE-CGC, la Fédération confédérée FO de la métallurgie, la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT ont signé un accord de branche national "relatif au contrat de travail à durée déterminée et au contrat de travail temporaire dans la métallurgie".



Le 29 juin 2018, un exemplaire original de l'accord a été notifié au représentant de chacune des organisations syndicales représentatives signataires, ainsi qu'à la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT (FTM-CGT).



Le 16 juillet 2018, l'UIMM a adressé par lettre recommandée avec avis de réception l'accord à la direction générale du travail, aux services centraux du ministre chargé du travail ainsi qu'au greffe central du conseil de prud'hommes de Paris.



Le 15 septembre 2018, le ministère du travail a publié le fascicule 2018/35 au bulletin officiel des conventions collectives (BOCC), comportant en page 76 l'accord du 29 juin 2018.



Autorisée par ordonnance, la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT a, par acte du 29 novembre 2018, fait assigner à jour fixe devant le tribunal de grande instance de Paris l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie (UIMM), la Fédération de la métallurgie CFE-CGC, la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT et la Fédération confédérée FO de la métallurgie aux fins principalement de voir annuler l'accord national du 29 juin 2018 relatif au contrat de travail à durée déterminée et au contrat de travail temporaire dans la métallurgie.



La CGT Intérim est intervenue volontairement à l'instance, au soutien de la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT.



Par jugement entrepris du 14 mai 2019 le tribunal de grande instance de Paris a:

Déclaré recevable la CGT Intérim en son intervention volontaire ;

Déclaré la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et la CGT Intérim irrecevables en leur action ;

Condamné la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT à verser à la Fédération de la métallurgie CFE-CGC, la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT et la Fédération confédérée FO de la métallurgie la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT à verser à l'union des Industries et Métiers de la Métallurgie la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Débouté les parties du surplus des demandes ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

Mis les dépens à la charge de la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et de la CGT intérim.



Le 19 décembre 2018, le ministre du travail a pris un arrêté d'extension de l'accord, publié au JO du 23 décembre 2018.



PRÉTENTIONS DES PARTIES



Vu l'appel interjeté le 7 juin 2019 par la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT ;



Vu l'appel interjeté le 11 juin 2019 par la CGT Intérim du même jugement et l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 4 juin 2020 de jonction des procédures ;



Vu les dernières écritures signifiées le 8 juin 2020 par lesquelles la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT demande à la cour de :



Vu les articles L.2262-14, L.2231-5-1, L.1242-1, L.1244-4, L.1251-5 et L.1251-37 du code du travail,

Recevoir la fédération des travailleurs de la métallurgie CGT en son appel et le dire bien fondé.

En conséquence,

Infirmer le jugement rendu le 14 mai 2019 par le tribunal de grande instance de Paris ;

Déclarer recevable l'action en nullité intentée par la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT à l'encontre de l'accord national du 29 juin 2018 relatif au contrat de travail à durée déterminée et au contrat de travail temporaire dans la métallurgie ;

Annuler l'accord national du 29 juin 2018 relatif au contrat de travail à durée déterminée et au contrat de travail temporaire dans la métallurgie ;

Mettre à la charge de l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie, de la Fédération des cadres, de la maîtrise et des techniciens de la métallurgie CFE-CGC, de la Fédération confédérée FO de la métallurgie et de la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT le paiement à l'organisation syndicale appelante d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Mettre à la charge de l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie, de la Fédération des cadres, de la maîtrise et des techniciens de la métallurgie CFE-CGC, de la Fédération confédérée FO de la métallurgie et de la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT les entiers dépens.



Vu les dernières écritures signifiées le 24 juin 2020 au terme desquelles l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie (UIMM) demande à la cour de:



La recevoir en ses écritures et les dires bien fondées ;

Dire les appels de la CGT Intérim et de la FTM-CGT mal fondés et

les débouter de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

Confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a déclaré la FTM-CGT et la CGT intérim irrecevables en leur action ;

En conséquence,

In limine litis,

Constater l'irrecevabilité de l'assignation et de la demande de la FTM-CGT ;

En tout état de cause,

Débouter la CGT intérim et la FTM-CGT de l'intégralité de leurs demandes ;

A titre subsidiaire,

Limiter la nullité de l'accord aux seuls articles 1.2 et 4.2 ;

Condamner la CGT intérim et la FTM-CGT à verser chacune à l'UIMM une somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



Vu les dernières écritures signifiées le 18 octobre 2019 par lesquelles la Fédération de la métallurgie CFE-CGC, la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT et la Fédération confédérée FO de la métallurgie demandent à la cour de :



Vu les articles L.2262-14, L.2231-5-1 du code du travail et 122 du code de procédure civile,

Vu les articles L.1244-3, L.1244-4, L.1251-36, L.1251-37, L.1242-1, L.1248-11 et L.1255-9 du code du travail,

Vu l'article 34 de la Constitution,



Confirmer le jugement entrepris ;

En conséquence,

Juger l'action et les demandes de la Fédération des travailleurs de la métallurgie comme l'intervention volontaire de la CGT Intérim irrecevables car prescrites ;

Juger que sous couvert d'une violation de la loi et de la Constitution par l'accord de branche du 28 (sic) juin 2018 la Fédération des travailleurs de la métallurgie comme la CGT Intérim contestent la constitutionnalité de la loi de ratification du 29 mars 2018 de l'Ordonnance n°2017-1382 du 22 septembre 2017 et qu'elles sont irrecevables à le faire hors question prioritaire de constitutionnalité ;

En toute hypothèse,

Débouter la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et la CGT intérim de l'intégralité de leurs demandes ;

Condamner la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT à payer à la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT, la Fédération des cadres, de la maîtrise et des techniciens de la métallurgie CFE-CGC et la Fédération confédérée FO de la métallurgie la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel;

Condamner la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et la CGT intérim solidairement aux entiers dépens d'appel.



Vu les dernières écritures signifiées le 26 août 2019 au terme desquelles la CGT Intérim demande à la cour de:



Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré l'intervention volontaire de la CGT Intérim à la procédure recevable ;

Réformer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré l'action de la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et de la CGT Intérim irrecevable, et en ce qu'elle a condamné la CGT Intérim aux dépens ;

En conséquence,

Déclarer l'action de la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et de la CGT intérim recevable ;

Faire droit aux demandes présentées par la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT;

et en conséquence :

Annuler l'accord national du 29 juin (2018) relatif au contrat de travail à durée déterminée et au contrat de travail temporaire dans la métallurgie ;

Condamner l'UIMM, ou qui mieux le devra, à régler à la CGT Intérim la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.



Vu les observations du Ministère public du 7 mai 2020 qui est d'avis que l'action en nullité diligentée par la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT à laquelle s'est jointe la CGT Intérim doit être déclarée irrecevable.



Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions qu'elles ont déposées et au jugement déféré.




MOTIFS DE LA DÉCISION



Sur la recevabilité de l'action de la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT:



Poursuivant l'infirmation du jugement entrepris, la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT conteste le délai de forclusion de l'article L.2262-14 du code du travail que lui a opposé le tribunal, estimant que le premier juge a dénaturé les dispositions de l'article L.2231-5-1 du même code quant aux modes de publication de l'accord en ajoutant la publication au bulletin officiel des conventions collectives (BOCC), intervenue le 15 septembre 2018, à la seule publication de l'accord dans la base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne, que le texte prévoirait.



Faisant le constat que l'accord querellé n'était pas accessible dans un standard ouvert aisément réutilisable, notamment en recherchant par le mot clé "métallurgie" sur la base www.legifrance.gouv.fr, la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT en déduit que l'accord n'était pas publié à la date de l'assignation du 29 novembre 2018 et qu'elle était donc recevable à le contester en justice.



L'article L.2262-14 du code du travail dispose que : "Toute action en nullité de tout ou partie d'une convention ou d'un accord collectif doit, à peine d'irrecevabilité, être engagée dans un délai de deux mois à compter :

1° De la notification de l'accord d'entreprise prévue à l'article L.2231-5, pour les organisations disposant d'une section syndicale dans l'entreprise ;

2° De la publication de l'accord prévue à l'article L.2231-5-1 dans tous les autres cas.

Ce délai s'applique sans préjudice des articles L.1233-24, L.1235-7-1 et L.1237-19-8 du code du travail."



L'article L.2231-5-1 du même code prévoit quant à lui que : "Les conventions et accords de branche, de groupe, interentreprises, d'entreprise et d'établissement sont rendus publics et versés dans une base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable. Ils sont publiés dans une version ne comportant pas les noms et prénoms des négociateurs et des signataires. (...)".



La cour relève que ce denier article, qui décline les modalités de publication de l'accord mentionnée au 2° de l'article L.2262-14 précité se contente d'énoncer que les accords "sont rendus publics" sans préciser la modalité de cette publicité, la publication, non contestée, de l'accord litigieux au BOCC du 15 septembre 2018 est donc à cet égard parfaitement opposable à la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT comme point de départ du délai de deux mois pour agir en nullité de celui-ci.



Il convient d'observer que l'ajout dans ce même texte d'un versement de l'accord "dans une base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable" n'est qu'une modalité complémentaire de publication, qui n'est ni cumulative, ni alternative, ni exclusive et qu'ainsi les prétendues difficultés à retrouver l'accord du 29 juin 2018 sur le site www.legifrance.gouv.fr dont se prévaut l'appelante et que les pièces qu'elle produit n'illustrent pas vraiment, sont sans influence sur le délai de préfix de deux mois fixé par l'article L.2262-14 du code du travail, qui avait couru quand la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT a fait assigner les intimées en annulation de l'accord devant le tribunal de grande instance de Paris le 29 novembre 2018.



La cour confirmera donc le jugement entrepris dans ses dispositions frappées d'appel.



Sur l'article 700 du code de procédure civile:



Il est équitable d'allouer à l'UIMM, une indemnité de procédure de 4.500 euros et une indemnité de même montant à la Fédération de la métallurgie CFE-CGC, la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT et la Fédération confédérée FO de la métallurgie.



PAR CES MOTIFS



La cour, statuant par arrêt contradictoire,



Confirme, en ses dispositions frappées d'appel, le jugement entrepris,



Et y ajoutant,



Rejette toutes autres demandes,



Condamne la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT à payer à la Fédération de la métallurgie CFE-CGC, la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT et la Fédération confédérée FO de la métallurgie la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT à payer à l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie (UIMM) la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et la CGT Intérim aux dépens d'appel.





LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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