2 décembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-14.468

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:SO01146

Texte de la décision

SOC. / ELECT

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 2 décembre 2020




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 1146 F-D

Pourvoi n° U 19-14.468




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 DÉCEMBRE 2020

1°/ le syndicat CFE-CGC ferroviaire, dont le siège est [...] ,

2°/ M. A... W..., domicilié [...] ,

ont formé le pourvoi n° U 19-14.468 contre le jugement rendu le 15 mars 2019 par le tribunal d'instance de Paris (contentieux des élections professionnelles), dans le litige les opposant :

1°/ au syndicat UFCAC CFDT (Union fédérale des cheminots et activités complémentaires), dont le siège est [...] ,

2°/ à Mme S... H..., domiciliée [...] ,

3°/ à Mme MW... Y..., domiciliée [...] ,

4°/ à Mme N... Q..., domiciliée [...] ,

5°/ à M. X... LO..., domicilié [...] ,

6°/ à M. E... K..., domicilié [...] ,

7°/ à M. P... B..., domicilié [...] ,

8°/ à M. LP... I..., domicilié [...] ,

9°/ à la société SNCF voyageurs, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de l'EPIC SNCF mobilités, établissement public à caractère industriel et commercial,

10°/ au syndicat CGT, dont le siège est [...] ,

11°/ à l'union UNSA ferroviaire, dont le siège est [...] ,

12°/ au syndicat FO, dont le siège est [...] ,

13°/ à M. E... V..., domicilié [...] ,

14°/ à Mme D... M..., domiciliée [...] ,

15°/ à M. C... O..., domicilié [...] ,

16°/ à Mme R... JC... , domiciliée [...] ,

17°/ à M. A... G... J..., domicilié [...] ,

18°/ à Mme T... L..., domiciliée [...] ,

19°/ à M. U... TZ..., domicilié [...] ,

20°/ à Mme QW... YO..., domiciliée [...] ,

21°/ à M. NR... LJ..., domicilié [...] ,

22°/ à M. DR... FQ..., domicilié [...] ,

23°/ à M. SN... JG..., domicilié [...] ,

24°/ à Mme QN... OQ..., domiciliée [...] ,

25°/ à M. TL... F..., domicilié [...] ,

26°/ à M. JJ... KV..., domicilié [...] ,

27°/ au syndicat SACS, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

L'UFCAC CFDT, Mmes H..., Y..., Q..., MM. LO..., K..., B... et I... ont formé un pourvoi incident contre le même jugement.

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Les parties ou leurs mandataires ont produit des mémoires.

Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat du syndicat CFE-CGC ferroviaire et de M. W..., de la SCP Colin-Stoclet, avocat de la société SNCF voyageurs, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de l'UFCAC CFDT, de Mmes H..., Y..., Q... et de MM. LO..., K..., B... et I..., après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Reprise d'instance

1. Il est donné acte à la société SNCF voyageurs, qui vient aux droits de l'EPIC SNCF mobilités, de ce qu'elle reprend l'instance.

Faits et procédure

2. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris, 15 mars 2019), le scrutin de l'élection des membres du comité social et économique de l'établissement Transilien lignes HBK de l'EPIC SNCF mobilités s'est déroulé le 22 novembre 2018.

3. Par déclaration au greffe du 13 décembre 2018, le syndicat Union fédérale des cheminots et activités complémentaires CFDT (UFCAC-CFDT) a saisi le tribunal d'instance de diverses contestations.

Sur le moyen du pourvoi principal du syndicat CFE-CGC ferroviaire et de M. W..., ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen du pourvoi incident du syndicat UFCAC-CFDT, de Mme H... et six autres salariés, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

5. Il est fait grief au jugement de dire que la demande d'annulation des élections dans le troisième collège de la délégation du personnel au sein du CSE de l'établissement Transilien lignes HBK de l'EPIC SNCF mobilités, à raison de l'exclusion de certains cadres des listes électorales, est irrecevable, alors « que le point de départ du délai de contestation sur l'électorat est la publication de la liste électorale ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans rechercher, ainsi qu'il y était invité, si la liste modifiée avait été publiée et, dans l'affirmative, à quelle date, le tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article R. 2314-24 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article R. 2314-24 du code du travail :

6. Pour déclarer irrecevable la demande d'annulation des élections des membres de la délégation du personnel, pour le troisième collège, du comité social et économique de l'établissement Transilien lignes HBK de l'EPIC SNCF mobilités, le jugement retient que la contestation porte exclusivement sur la composition de l'électorat et devait être portée devant le tribunal dans les trois jours et que ce bref délai n'a pas été respecté.

7. En se déterminant ainsi sans rechercher, ainsi qu'il y était invité, si la liste électorale modifiée avait été publiée et, le cas échéant, à quelle date cette publication était intervenue, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen du pourvoi incident, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la demande d'annulation des élections des membres du troisième collège, du comité social et économique de l'établissement Transilien lignes HBK de l'EPIC SNCF mobilités est irrecevable en ce que celle-ci porte sur l'exclusion de certains cadres des listes électorales, le jugement rendu le 15 mars 2019, entre les parties, par le tribunal d'instance de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Paris autrement composé ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour le syndicat CFE-CGC ferroviaire et M. W...

Il est fait grief au jugement attaqué D'AVOIR annulé l'élection, le 22 novembre 2018, de M. A... W..., comme membre titulaire du troisième collège du comité social et économique (Cse) de l'établissement Transilien lignes HBK de l'Epic Sncf Mobilités, en tant qu'élu du syndicat Cfe-Cgc Ferroviaire.

AUX MOTIFS QUE sur l'annulation de l'élection de M. A... W... membre titulaire du syndicat Cfe-Cgc Ferroviaire au troisième collège du Cse ; que l'article L 2314-30 du code du travail prévoit : « Pour chaque collège électoral, les listes mentionnées à l'article L 2314-29, qui comportent plusieurs candidats sont composées d'un nombre de femmes et d'hommes correspondant à la part de femmes et d'hommes inscrits sur la liste électorale. Les listes sont composées alternativement d'un candidat de chaque sexe jusqu'à épuisement des candidats d'un des sexes. » ; qu'en l'espèce, dans le troisième collège, le syndicat Cfe-Cgc Ferroviaire ne conteste pas avoir présenté un seul candidat de sexe masculin, mais que l'annulation entraînerait un préjudice pour les salariés du troisième collège ; que pourtant, la liste du syndicat Cfe-Cgc Ferroviaire aurait dû comporter au moins deux candidats, dont un de chaque sexe, pour respecter les règles posées par l'article L 2314-30, exigeantes, mais de nature à favoriser une réelle égalité hommes-femmes ; que l'article L 2314-32 du code du travail, relatif aux conséquences de la violation de la règle de représentation équilibrée des femmes et des hommes, prévoit « Les contestations relatives à l'électorat, à la composition des listes de candidats en application de l'article L. 2314-30, à la régularité des opérations électorales et à la désignation des représentants syndicaux sont de la compétence du juge judiciaire
La constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l'article L 23 14-30 entraîne l'annulation de l'élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter. Le juge annule l'élection des derniers élus du sexe surreprésenté en suivant l'ordre inverse de la liste des candidats. La constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la seconde phrase du premier alinéa du même article L 2314-30 entraîne l'annulation de l'élection du ou des élus dont le positionnement sur la liste de candidats ne respecte pas ces prescriptions. Le cas échéant, il est fait application des dispositions de l'article L 2314-l0 du code du travail. » ; que la liste du syndicat Cfe-Cgc Ferroviaire ne comportait qu'un seul homme ; que faute d'avoir respecté la règle de parité, l'élection de M. A... W..., membre titulaire du troisième collège du Cse, élu du syndicat Cfe-Cgc Ferroviaire, est annulée ; qu'à défaut de réunion des conditions posées par l'article L 2314-10 du code du travail, le troisième collège étant bien représenté, il n'y a pas lieu d'organiser des élections partielles pour le troisième collège.

1) ALORS QU'il résulte des termes exprès de l'article L 2314-30 du code du travail que l'obligation pour les listes de candidats aux élections du comité social et économique d'être composées d'un nombre de femmes et d'hommes correspondant à la part de femmes et d'hommes inscrits sur la liste électorale et alternativement d'un candidat de chaque sexe ne s'applique qu'aux listes comportant plusieurs candidats ; que, sauf à porter atteinte au principe de la liberté de choix par les syndicats de leurs candidats, un syndicat est donc libre de présenter une liste comportant une unique candidature a fortiori lorsque celle-ci respecte la composition du corps électoral du collège concerné ; qu'en annulant l'élection de M. W... en qualité de membre titulaire du troisième collège du Cse de l'établissement Transilien lignes HBK de l'Epic Sncf Mobilités, qui figurait sur la liste présentée par le syndicat Cfe-Cgc Ferroviaire, du seul fait que cette liste, qui ne comportait qu'un seul homme, aurait dû comporter au moins deux candidats, dont un de chaque sexe, quand cette liste, qui relevait de la liberté du syndicat Cfe-Cgc Ferroviaire, respectait la composition du corps électoral du collège cadres qui présentait une majorité d'hommes (58,70%), telle qu'elle avait été précisée par le protocole d'accord préélectoral du 16 octobre 2018 en son article 5, le tribunal d'instance a violé les articles L 2314-30 et L 2314-32 du code du travail, les articles 3 et 8 de la convention n° 87 de l'OIT, 4 de la convention n° 98 de l'OIT et 5 de la convention n° 135 de l'OIT ainsi que les articles 11-2 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 5 et 6 de la Charte sociale européenne, 28 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

2) ALORS QU'en toute hypothèse, le tribunal d'instance ne peut annuler l'élection d'un salarié en qualité de membre de la délégation du personnel au comité social et économique pour non-respect de la règle de parité sans même s'assurer que, dans un contexte de baisse du militantisme syndical et au regard de la composition du collège concerné, le syndicat qui a présenté une liste comportant une candidature unique était en mesure de présenter d'autres candidatures pour satisfaire à cette règle ; qu'en annulant l'élection de M. W... en qualité de membre titulaire du troisième collège du Cse de l'établissement Transilien lignes HBK de l'Epic Sncf Mobilités, qui figurait sur la liste présentée par le syndicat Cfe-Cgc Ferroviaire, du seul fait que cette liste ne comportait qu'un homme sans même s'assurer que ce syndicat aurait été à même de présenter d'autres candidatures et, en particulier, de femmes en considération de la composition du collège « cadres » composé majoritairement d'hommes (58,70 %) ainsi qu'il résultait du protocole d'accord préélectoral en son article 5, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des articles L 2314-30 et L 2314-32 du code du travail, les articles 3 et 8 de la convention n° 87 de l'OIT, 4 de la convention n° 98 de l'OIT et 5 de la convention n° 135 de l'OIT ainsi que les articles 11-2 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 5 et 6 de la Charte sociale européenne, 28 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

3) ALORS QUE dans leurs conclusions en réponse (p.4), le syndicat Cfe-Cgc Ferroviaire et M. W... avaient fait valoir qu'en cas d'annulation de l'élection de ce dernier en qualité de membre titulaire du troisième collège du Cse de l'établissement Transilien lignes HBK de l'Epic Sncf Mobilités, son siège resterait vacant et qu'il en résulterait un préjudice tant pour les salariés du troisième collège, qui seraient ainsi privés d'une représentation au sein du Cse, que pour le Cse lui-même en raison de la réduction du nombre de ses élus contribuant à son bon fonctionnement ; qu'en omettant de répondre à ces conclusions en réponse des exposants de nature à faire obstacle à l'annulation de l'élection de M. W..., le tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit, au pourvoi incident, par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour l'UFCAC CFDT, Mmes H..., Y..., Q... et MM. LO..., K..., B... et I...

Le moyen fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que la demande d'annulation des élections du troisième collège, au CSE de l'établissement Transilien lignes EBK de l'EPIC SNCF Mobilités, à raison de l'exclusion de certains cadres des listes électorales, est irrecevable.

AUX MOTIFS QUE la contestation de la CFDT porte sur des personnes déclarées inéligibles par l'employeur, non pas en fonction de la catégorie professionnelle à laquelle elles appartiennent (il ne s'agit pas de la non inscription de toute une catégorie d'électeurs, telle que la question de la prise en compte des salariés mis à disposition, Soc. 24 mai 2006, n° 05-60.293), mais du fait qu'elles occupent, pour chacune d'entre elles, des fonctions de nature à les assimiler au chef d'entreprise, alors qu'elles ne peuvent à la fois représenter les salariés auprès de l'employeur et représenter l'employeur auprès des salariés ; la contestation du syndicat UFCAC-CFDT porte donc exclusivement sur la composition de l'électorat, sur le nombre d'électeurs retenus, et devait être portée devant le tribunal, dans les conditions précisées par l'article R2314-24 du code du travail, dans les trois jours ; ce bref délai n‘a pas été respecté.

1° ALORS QUE la contestation portant sur la décision de l'employeur de déclarer des salariés inéligibles porte sur la régularité des élections de sorte que l'action est recevable dans les quinze jours suivant ces élections ; qu'en déclarant l'action irrecevable aux motifs qu'elle aurait dû être portée devant le tribunal dans les trois jours, le tribunal a, par fausse application, violé l'article R2314-24 du code du travail.

2° ALORS QUE la contestation de l'exclusion d'une catégorie entière de salariés de la liste électorale, susceptibles d'affecter la régularité des élections, est recevable dans les quinze jours suivant les élections ; qu'en déclarant l'action irrecevable aux motifs qu'elle aurait dû être portée devant le tribunal dans les trois jours, le tribunal a, par fausse application, encore violé l'article R2314-24 du code du travail.

3° ALORS subsidiairement QUE le point de départ du délai de contestation sur l'électorat est la publication de la liste électorale ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans rechercher, ainsi qu'il y était invité, si la liste modifiée avait été publiée et, dans l'affirmative, à quelle date, le tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article R2314-24 du code du travail

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