3 décembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-20.790

Troisième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:C300918

Texte de la décision

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 3 décembre 2020




Cassation partielle


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 918 F-D

Pourvoi n° R 19-20.790




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 3 DÉCEMBRE 2020

La société d'HLM toit et joie, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° R 19-20.790 contre l'arrêt rendu le 4 juin 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 4), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société ML Conseils, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en la personne de M. X..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société See Simeoni,

2°/ à Mme N... I...,

3°/ à M. Q... V...,

domiciliés tous deux [...],

4°/ à Mme LH... UV... H..., domiciliée [...] ,

5°/ à M. A... J..., domicilié [...] ,

6°/ à M. M... T...,

7°/ à Mme O... Y..., épouse T...,

domiciliés tous deux [...],

8°/ à Mme S... F..., domiciliée [...] ,

9°/ à Mme R... E..., épouse K..., domiciliée [...] ,

10°/ à M. P... U..., domicilié [...] ,

11°/ à Mme O... B..., domiciliée [...] ,

12°/ à Mme N... C..., épouse G..., domiciliée [...] ,

13°/ à M. D... W..., domicilié [...] ,

14°/ à Mme L... AO..., domiciliée [...] ,

15°/ à M. WE... KH... , domicilié [...] ,

16°/ à Mme FN... QG..., épouse WC..., domiciliée [...] ,

17°/ à M. BF... WC..., domicilié [...] ,

18°/ à Mme BP... OG..., domiciliée [...] ,

19°/ à M. KU... MH...,

20°/ à Mme DO... MH...,

domiciliés tous deux [...],

21°/ à Mme OG... OC...,

22°/ à M. LG... EH...,

domiciliés tous deux [...],

23°/ à Mme L... VK..., domiciliée [...] ,

24°/ à M. UD... E..., domicilié [...] ,

25°/ à Mme O... AY..., domiciliée [...] ,

26°/ à Mme EB... VQ..., veuve JO..., domiciliée [...] ,

27°/ à Mme MU... QF..., domiciliée [...] ,

28°/ à Mme OK... HN..., domiciliée [...] ,

29°/ à Mme WL... HN..., domiciliée [...] ,

30°/ à Mme OG... BC..., domiciliée [...] ,

31°/ à Mme OG... RH..., domiciliée [...] ,

32°/ à Mme S... XY..., domiciliée [...] ,

33°/ à Mme UV... CC..., domiciliée [...] ,

34°/ à M. RT... EM..., domicilié [...] ,

35°/ à Mme LH... VY..., domiciliée [...] ,

36°/ à Mme LH... H..., domiciliée [...] ,

37°/ à M. YG... JX..., domicilié [...] ,

38°/ à Mme CC... YQ..., épouse JX..., domiciliée [...] ,

39°/ à Mme GJ... QN..., épouse B..., domiciliée [...] ,

40°/ à Mme EE... LS..., épouse UC..., domiciliée [...] ,

41°/ à Mme XG... OU... XU... , domiciliée [...] ,

42°/ à Mme VD... JI..., domiciliée [...] ,

43°/ à Mme MW... JT..., domiciliée [...] ,

44°/ à Mme SF... AA..., épouse CR...,

45°/ à M. JW... CR...,

domiciliés tous deux [...],

46°/ à Mme VU... RK..., domiciliée [...] ,

47°/ à Mme KB... VE..., domiciliée [...] ,

48°/ à Mme QV... IL... WY..., domiciliée [...] ,

49°/ à Mme BG... YS..., domiciliée [...] ,

50°/ à Mme XG... XA..., domiciliée [...] ,

51°/ à M. SC... ME..., domicilié [...] ,

52°/ à Mme SF... AW..., domiciliée [...] ,

53°/ à Mme KC... BW..., épouse YI..., domiciliée [...] ,

54°/ à M. IC... QT..., domicilié [...] ,

55°/ à Mme RA... FF... JM... , épouse FZ..., domiciliée [...] ,

56°/ à Mme UP... IF..., domiciliée [...] ,

57°/ à M. KP... PZ..., domicilié [...] ,

58°/ à Mme UV... FR... épouse KL..., domiciliée [...] ,

59°/ à M. KP... NT... KL..., domicilié [...] ,

60°/ à Mme TD... WC...,

61°/ à M. RG... TK... NT...,

domiciliés tous deux [...],

62°/ à Mme ET... GL..., domiciliée [...] ,

63°/ à Mme BR... IP...,

64°/ à M. AP... IP...,

domiciliés tous deux [...],

65°/ à Mme AC... NL... PI... ,

66°/ à M. BF... VH...,

domiciliés tous deux [...],

67°/ à Mme FK... VF..., domiciliée [...] ,

68°/ à Mme YU... OM..., domiciliée [...] ,

69°/ à M. M... RB..., domicilié [...] ,

70°/ à Mme WA... XV..., domiciliée [...] ,

71°/ à Mme YC... ML..., domiciliée [...] ,

72°/ à Mme WD... BN... LW..., domiciliée [...] ,

73°/ à Mme WA... BA..., domiciliée [...] ,

74°/ à Mme OG... OT...,

75°/ à M. DM... S... OT...,

domiciliés tous deux [...],

76°/ à Mme ES... JW..., épouse GQ...,

77°/ à M. IM... GQ...,

domiciliés tous deux [...],

78°/ à Mme UY... DQ..., domiciliée [...] ,

79°/ à Mme SB... HQ..., domiciliée [...] ,

80°/ à M. TM... TO..., domicilié [...] ,

81°/ à M. IM... DM... MY... EL..., domicilié [...] ,

82°/ à Mme AX... BO..., domiciliée [...] ,

83°/ à M. UL... YB..., domicilié [...] ,

84°/ à Mme GG... QP... SQ..., domiciliée [...] ,

85°/ à la société [...] , société civile professionnelle, dont le siège est [...] , pris en qualité d'administrateur judiciaire de la société See Simeoni,

86°/ à la société MMA IARD, dont le siège est [...] , venant aux droits de Covea Risks,

87°/ à la société Brezillon, société anonyme, dont le siège est [...] ,

88°/ à la société d'assurances Areas Dommages, dont le siège est [...] ,

89°/ à l'union départementale de la consommation du logement et du Cadre de Vie du Val-de-Marne, dont le siège est [...] ,

90°/ à Mme DH... J..., domiciliée [...] ,

91°/ à M. VV... UC..., domicilié [...] ,

92°/ à M. NG... VE..., domicilié [...] ,

93°/ à Mme YH... SX..., épouse ME..., domiciliée [...] ,

94°/ à Mme SF... QS..., domiciliée [...] ,

95°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [...] , assureur de Cferm,

96°/ à la société Ordonnancement général du bâtiment, Omega Alliance, dont le siège est [...] ,

97°/ à la société Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est [...] ,

98°/ à la société l'Auxiliaire, dont le siège est [...] , assureur de la société Ordonnancement général du bâtiment - Omega Alliance,

99°/ à la société Agence ND...-IS... et associés, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

100°/ à la société Qualiconsult, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

101°/ à la société BTP Consultants, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

102°/ à la société MJA Selafa, société d'exercice libéral à forme anonyme, dont le siège est [...] , pris en la personne de M. GP... , en qualité de liquidateur de la société Contrôle de fonctionnement études de réalisations et de maintenance Cferm SAS,

103°/ à la société Ascagne AJ, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [...] , prise en la personne de Mme UY... UR..., en qualité d'administrateur judiciaire de la société Contôle de fonctionnement études de réalisations et de maintenance,

104°/ à la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [...] , en qualité d'assureur de la société See Simeoni,

105°/ à la société MMA IARD assurances mutuelles, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La société MMA IARD, venant aux droits de la société Covea Risks et la société MMA IARD assurances ont formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt ;

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Les demanderesses au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de leur recours, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt ;

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Parneix, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société d'HLM Toit et joie, de la SCP Boulloche, avocat de la société Mutuelle des architectes français, de la société Agence ND...-IS... et associés et de la société BTP Consultants, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD, de la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat de Mme I..., M. V..., Mme H..., M. J..., M. et Mme T..., Mmes F..., E..., M. U..., Mmes B..., C..., M. W..., Mme AO..., M. KH... , M. et Mme WC..., de Mme OG..., M. et Mme MH..., Mme OC..., M. EH..., Mme VK..., M. E..., Mmes VQ..., QF..., HN..., HN..., BC..., RH..., XY..., CC..., M. EM..., Mmes VY..., H..., M. JX..., Mmes YQ..., QN..., LS..., XU..., JT..., AA..., M. CR..., Mmes RK..., VE..., IL... WY..., YS..., XA..., M. ME..., Mmes AW..., BW..., M. QT..., Mmes FF... JM..., IF..., M. PZ..., Mme FR..., M. KL..., Mme WC..., M. TK... NT..., Mmes GL..., M. et Mme IP..., Mme NL... PI..., M. VH..., Mmes VF..., OM..., M. RB..., Mmes XV..., ML..., BN... LW..., BA..., M. et Mme OT..., M. et Mme GQ..., Mmes DQ..., HQ..., MM. TO..., MY... EL..., Mme BO..., M. YB..., Mme QP... SQ... , de l'union départementale de la Consommation du Logement et du Cadre de Vie du Val-de-Marne, Mme J..., MM. UC..., VE... et de Mmes SX... et QS..., de Me Le Prado, avocat de la société MMA IARD, de la société d'assurances Areas Dommages et de la société MMA IARD assurances mutuelles, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Brezillon, de la société Ordonnancement général du bâtiment - Omega Alliance et de la société l'auxiliaire, après débats en l'audience publique du 20 octobre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Parneix, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

1. Il est donné acte à la société Toit et Joie du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mmes ML..., FF... JM... et XY....

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris 4 juin 2019), la société d'habitations à loyer modéré Toit et Joie (la société Toit et Joie) est propriétaire d'un immeuble construit en 1962 qu'elle a entrepris, courant 2012, de réhabiliter entièrement tant dans ses parties communes que dans ses logements privatifs.

3. Les travaux devaient être réalisés alors que les lieux demeuraient occupés et concernaient à la fois la structure de l'immeuble (changement des menuiseries extérieures, ravalement des façades, remplacement des canalisations, démolitions des séchoirs situés en terrasse pour les transformer en logements, incorporation des balcons) et ses équipements collectifs (chauffage, ascenseurs, électricité, plomberie).

4. Se plaignant de retards importants et de désordres graves et répétés subis pendant le déroulement du chantier, l'Union départementale de la consommation, du logement et du cadre de vie du Val-de-Marne (l'UDCLCV) et plusieurs locataires ont assigné la société Toit et Joie en consignation des loyers et réparation de leur préjudice.

5. La société Toit et Joie a appelé en garantie ses assureurs, la société Areas Dommages et la société Covea Risks, aux droits de laquelle se trouvent les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, ainsi que les sociétés Brezillon, en charge du lot démolition, gros-œuvre, maçonnerie, couverture, plomberie, chauffage et See-Simeoni, en charge du lot échafaudages, menuiseries, façades, isolation.

6. La société Brezillon a appelé à son tour en garantie la société Agence RVA ND...-IS... & Associés, architecte maître d'œuvre, et son assureur, la Mutuelle des architectes français (la Maf), la société Contrôle de Fonctionnement Etudes de Réalisation et de Maintenance, chargée des études techniques, et son assureur, la société Axa France Iard, ainsi que la société Ordonnancement général du Bâtiment-Oméga Alliance, chargée de la coordination des travaux, et son assureur, la société l'Auxiliaire.

7. La société Ordonnancement général du Bâtiment-Oméga Alliance et la société l'Auxiliaire ont appelé à l'instance la société BTP Consultants, contrôleur technique, et la société Qualiconsult, chargée de la protection de la sécurité et de la santé.

Examen des moyens

Sur le quatrième moyen du pourvoi principal, pris en sa troisième branche, ci-après annexé


8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

9. La société Toit et Joie fait grief à l'arrêt de la condamner à payer aux locataires demeurés dans les lieux pendant les travaux la somme de 4 500 euros chacun à titre de dommages-intérêts et d'ordonner la réduction des loyers hors charges à concurrence de 50 % du 15 janvier 2015 au 3 mai 2016, alors « que les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour elle ni perte, ni profit, de sorte que la réparation du préjudice ne saurait être forfaitaire ; qu'en allouant néanmoins aux locataires résidant toujours dans l'immeuble une indemnisation identique de leurs troubles de jouissance résultant des travaux, sans analyser le préjudice individuellement subi par chacun d'entre eux en fonction des circonstances concrètes propres à leur situation personnelle, la cour d'appel, qui a procédé à une indemnisation forfaitaire de leur préjudice, a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime. »

Réponse de la Cour

10. La cour d'appel a relevé que, prévus pour une durée de dix-huit mois, les travaux s'étaient prolongés pendant plus de trois ans et que la plupart des locataires avaient subi des nuisances sonores provoquées par les marteaux-piqueurs, les opérations de démolition et de percement des murs, des infiltrations dues à une protection insuffisante contre les intempéries et à un défaut d'isolation des menuiseries extérieures, un envahissement de leurs logements par la poussière et une réduction durable de leur espace de vie en raison de l'encombrement des lieux.

11. Elle a retenu que ces désordres prolongés avaient causé aux locataires un préjudice de jouissance anormal et d'une particulière gravité constitutif d'un manquement de la bailleresse à son obligation d'assurer la jouissance paisible des lieux donnés à bail.

12. Elle en a souverainement déduit, sans violer le principe de la réparation intégrale du dommage qu'elle n'a pas évalué forfaitairement, que le préjudice subi avait présenté la même nature pour chacun des locataires et devait être réparé par l'allocation d'une somme identique et par la réduction de la moitié du loyer exigible jusqu'à l'achèvement des travaux.

13. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur les deuxième et troisième moyens, réunis

Enoncé du moyen

14. La société Toit et Joie fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à faire juger qu'elle avait opéré le règlement de sa dette par compensation avec les sommes dues par les locataires ou à être autorisée judiciairement à opérer cette compensation, alors :

« 1°/ que la compensation de dettes réciproques, fongibles, liquides et exigibles, s'opère de plein droit ; qu'en se bornant à affirmer, pour débouter la société Toit et joie de sa demande tendant à voir juger qu'elle avait régulièrement opéré le règlement des sommes dues à titre de dommages-intérêts aux locataires en exécution du jugement de première instance par compensation avec les dettes locatives de ceux-ci, qu'elle n'avait pas obtenu devant le premier juge le bénéfice de la compensation judiciaire entre ses dettes indemnitaires et ses créances de loyers, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si le paiement invoqué par la société Toit et joie ne s'était pas réalisé par l'effet de la compensation légale entre les dettes réciproques des parties, qui étaient fongibles, liquides et exigibles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1347 et 1347-1 du code civil ;

2°/ qu'une compensation judiciaire peut intervenir entre deux dettes qui ne remplissent pas les conditions de la compensation légale, dès lors que celles-ci sont connexes ; qu'en se bornant à affirmer, pour débouter la société Toit et joie de sa demande tendant à être judiciairement autorisée à régler les sommes dues à titre de dommages-intérêts aux locataires par compensation avec les dettes locatives de ceux-ci, que la compensation que la société Toit et joie aurait imposé à ses locataires entre sa dette indemnitaire et le loyer, loin de simplifier la gestion de leurs comptes, a rendu difficilement lisibles, même parfois erronés, les avis d'échéance adressés par le bailleur aux locataires, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs étrangers à la question de la connexité des créances réciproques des parties, et par là même inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1348 du code civil. »

Réponse de la Cour

15. Il ne résulte pas des écritures de la société Toit et Joie qu'elle ait produit devant la cour d'appel les décomptes locatifs de chacun des locataires, de nature à permettre aux juges de vérifier si les conditions de la compensation qu'elle invoquait étaient réunies.

16. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le quatrième moyen, pris en ses première, deuxième, quatrième et cinquième branche

Enoncé du moyen

17. La société Toit et Joie fait grief à l'arrêt de rejeter son appel en garantie dirigée contre la société Brezillon, alors :

« 1°/ que la contradiction de motifs équivaut au défaut de motifs ; qu'en affirmant, pour débouter la société Toit et joie de son appel en garantie contre la société Brezillon, qu'aucun constat contradictoire ne permettait de révéler la matérialité des malfaçons invoquées par la société Toit et joie, ni leurs conséquences préjudiciables pour les locataires, après avoir pourtant retenu l'existence de malfaçons en relation avec le préjudice de jouissance des locataires qu'elle a condamné la société Toit et joie à réparer, tels que les tuyaux de chauffage condamnant un placard, l'absence de finition ou de raccord au niveau des murs et des sols, ainsi que la chute répétée de la porte de douche, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en affirmant, pour débouter la société Toit et joie de son appel en garantie contre la société Brezillon, qu'il n'était pas démontré que les désagréments allégués par les locataires seraient nés de l'exécution des travaux, et qu'ils résultaient plutôt du fait d'avoir été exécutés en site occupé par suite de la décision du maître d'ouvrage, après avoir pourtant relevé l'existence d'un certain nombre de malfaçons, ainsi que d'infiltrations d'eau dans les appartements en raison de l'insuffisance de l'isolation de la toiture au moment des fortes intempéries de juin et juillet 2013, de la dégradation de canalisations provoquée par la chute de gravats à l'intérieur des gaines et de fuites survenues au moment de la mise en eau du circuit de chauffage, lesquelles résultaient bien de la mauvaise exécution des travaux de la société Brezillon et non de la seule circonstance que les travaux avaient été réalisés en site occupé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

4°/ que tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen de la société Toit et joie tiré de ce que la société Brezillon avait manqué à ses obligations contractuelles de prendre des mesures particulières tant dans l'exécution des travaux se déroulant en site occupé, que dans l'organisation de ceux-ci, afin de minimiser les nuisances supportées par les locataires (conclusions d'appel de la société Toit et Joie, notamment pp. 52-53, 57 à 62), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; qu'en l'espèce, la société Toit et joie faisait valoir que la société Brezillon avait manqué à ses obligations contractuelles de prendre des mesures particulières tant dans l'exécution des travaux se déroulant en site occupé, que dans l'organisation de ceux-ci, afin de minimiser les nuisances supportées par les locataires ; qu'en se bornant à affirmer, sans autre explication, qu'aucune faute n'apparaissait établie à l'encontre de la société Brezillon dans l'exécution de son lot, la cour d'appel, qui a statué par un motif d'ordre général et abstrait, a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

18. La cour d'appel a retenu que le retard du chantier était dû à une insuffisance de prévision imputable au maître de l'ouvrage et à l'architecte chargé de la maîtrise d'œuvre, que les pannes du chauffage avaient été limitées depuis le début des travaux et concernaient le réseau de chauffage urbain, qu'aucun constat ne démontrait l'existence des autres désordres imputés à la société Brezillon et que le préjudice de jouissance subi par les locataires résultait du choix de la société Toit et Joie de réaliser les travaux alors que l'immeuble était occupé.

19. Elle a exactement déduit de ces constatations, sans contradiction et répondant aux conclusions prétendument délaissées, que les manquements reprochés à la société Brezillon n'étaient pas établis, de sorte que l'appel en garantie devait être rejeté.

20. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le premier et le second moyens du pourvoi incident éventuel

21. La cassation n'étant pas prononcée sur les premier et troisième moyens du pourvoi principal, les deux moyens du pourvoi incident, qui reprennent les mêmes griefs, sont devenus sans portée.

Mais sur le cinquième moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

22. La société Toit et Joie fait grief à l'arrêt de rejeter son appel en garantie contre la société Covea Risks, aux droits de laquelle se trouvent les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, alors « que les clauses des polices d'assurance édictant des exclusions de garantie ne sont valables que si elles sont formelles et limitées ; que ne sont ni formelles, ni limitées, les clauses d'exclusion de garantie qui, se référant à des critères imprécis et à des hypothèses non limitativement énumérées, ne permettent pas à l'assuré de connaître exactement l'étendue de la garantie ; qu'en retenant que la clause figurant à l'article 12 de la police d'assurance de responsabilité civile n° [...] souscrite par la société Toit et joie auprès de la société Covea Risks, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, excluant la garantie pour les « dommages qui n'ont pas de caractère aléatoire parce qu'ils résultent de façon prévisible et inéluctable, pour un professionnel normalement compétent dans les activités assurées, de la conception des travaux ou de leurs modalités d'exécution telles qu'elles ont été arrêtées ou acceptées par vous (ou par la direction de l'entreprise lorsqu'il s'agit d'une personne morale) », était claire, précise et limitée, cependant que cette clause, rédigée de façon très générale, sans référence à aucun fait, circonstances ou obligations définis avec précision, ni à des hypothèses limitativement énumérées, ne permettait pas à l'assuré de connaître exactement l'étendue de la garantie, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 113-1, alinéa 1, du code des assurances :

23. Aux termes de ce texte, les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

24. Pour rejeter l'appel en garantie de la société Toit et Joie contre la société Covea Risks, l'arrêt retient qu'elle a souscrit une police d'assurance de responsabilité civile contenant une clause excluant de la garantie « les dommages qui n'ont pas de caractère aléatoire parce qu'ils résultent de façon prévisible et inéluctable, pour un professionnel normalement compétent dans les activités assurées, de la conception des travaux ou de leurs modalités d'exécution telles qu'elles ont été arrêtées ou acceptées par vous. »

25. Elle ajoute que cette clause claire, précise et limitée concerne la société Toit et Joie, en qualité de maître de l'ouvrage et bailleur social professionnel « normalement compétent » pour la gestion des immeubles et les travaux de réhabilitation, qu'elle vise une « conception » des travaux de réhabilitation lourde ou bien « leurs modalités d'exécution arrêtées ou acceptées » en site occupé et qu'elle s'applique à des travaux qui par nature étaient susceptibles de causer de façon « prévisible et inéluctable » des troubles de jouissance aux locataires demeurés dans les lieux.

26. En statuant ainsi, alors que la clause litigieuse, qui ne se référait pas à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées permettant à l'assuré de connaître l'étendue exacte de sa garantie, ne pouvait recevoir application, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

27. La cassation ne remettant pas en question l'arrêt en ce qu'il rejette les appels en garantie dirigés contre les sociétés Brezillon, Ordonnancement général du bâtiment-Omega Alliance, l'Auxiliaire, Areas Dommages, Maf, Agence RVA ND...-IS... & Associés, BTP Consultants et Axa France Iard, il y a lieu de les mettre hors de cause.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

MET hors de cause les sociétés Brezillon, Ordonnancement général du bâtiment-Omega Alliance, l'Auxiliaire, Areas Dommages, MAF, Agence RVA ND...-IS... & Associés, BTP Consultants et Axa France IARD ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette l'appel en garantie de la société Toit et Joie à l'encontre de la société Covea Risks, aux droits de laquelle se trouve les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, l'arrêt rendu le 4 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

REJETTE le pourvoi incident ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille vingt.









MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour la société d'HLM toit et joie (demanderesse au pourvoi principal).

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Toit et joie à payer à Mme Mme N... I..., M. Q... V..., Mme LH... UV... H..., M. A... J..., M. M... T..., Mme O... Y... épouse T..., Mme S... F..., Mme R... E... épouse K..., M. P... U..., Mme O... B..., Mme N... G..., M. D... W..., Mme L... AO..., M. WE... KH... , Mme FN... QG... épouse WC..., M. BF... WC..., Mme BP... OG..., M. KU... MH..., Mme DO... MH..., Mme OG... OC..., M. LG... EH..., Mme L... VK..., M. UD... E..., Mme O... AY..., Mme EB... VQ... veuve JO..., Mme MU... QF..., Mme OK... HN..., Mme WL... HN..., Mme OG... BC..., Mme OG... RH..., Mme UV... CC..., M. RT... EM..., Mme LH... VY..., Mme LH... H..., M. YG... JX..., Mme CC... YQ... épouse JX..., Mme GJ... B... épouse QN..., Mme EE... LS... épouse UC..., Mme XG... XU..., Mme VD... JI..., Mme MW... JT..., Mme SF... AA... épouse CR..., M. JW... CR..., Mme VU... RK..., Mme KB... VE..., Mme QV... IL... WY..., Mme BG... YS..., Mme XG... XA..., Mme BT... XC... , M. M... QW... , M. SC... ME..., Mme SF... AW..., Mme KC... BW... épouse YI..., M. IC... QT..., Mme UP... IF..., M. KP... PZ..., Mme UV... FR... épouse KL..., M. KP... NT... KL..., Mme TD... WC..., M. RG... TK... NT..., Mme ET... GL..., Mme BR... IP..., M. AP... IP..., Mme AC... NL... PI... , M. BF... VH..., Mme FK... VF..., Mme YU... OM..., M. M... RB..., Mme WA... XV..., Mme WD... BN... LW..., Mme WA... BA..., Mme OG... OT..., M. DM... S... OT..., Mme ES... JW... épouse GQ..., M. IM... GQ..., Mme UY... DQ..., Mme SB... HQ..., M. TM... TO..., Mme AX... BO..., M. UL... YB..., Mme GG... SQ..., Mme DH... J..., M. VV... UC..., M. NG... VE..., Mme YH... SX... épouse ME... et Mme SF... QS..., chacun, la somme de 4500 euros à titre de dommages-intérêts, puis d'avoir ordonné la réduction à hauteur de 50 %, à compter du 15 janvier 2015 et jusqu'au 3 mai 2016 ou, le cas échéant jusqu'à leur déménagement définitif survenu avant cette date, du prix des loyers hors provisions pour charges dus à la société Toit et joie par les locataires susvisés encore présents dans l'immeuble ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

«Sur le contexte du chantier et des dommages subis ayant conduit au litige

Considérant, comme l'a relaté le premier juge, qu'il est établi et non contesté que la société TOIT ET JOIE est propriétaire de l'immeuble situé [...] , résidence de 251 logements en duplex construite en 1962 qu'elle a mis à bail ;

Qu'à la suite de l'apparition de diverses pathologies : les colonnes montantes altérées, fuites fréquentes et obsolescence générale, un besoin d'amélioration de la sécurité, de restructuration et d'adaptation des logements actuels à la vie des résidents (logements en duplex ne correspondant pas à des familles composées d'enfants en bas âge et aux personnes âgées) – un important programme de réhabilitation a été envisagé par la société TOIT ET JOIE ;

Qu'il consistait à :

- rénover les parties communes,

- réhabiliter tous les logements, notamment en changeant les appareils sanitaires et en procédant à une nouvelle distribution de chauffage,

- améliorer l'isolation de la façade par un remplacement des panneaux,

- réaménager les espaces extérieurs,

- réduire les risques de propagation d'un incendie (par encloisonnement des escaliers et traitement des planchers....) ;

Qu'il était prévu, de surcroît :

- la création de 8 logements en terrasse, à la place des séchoirs,

- la suppression de quelques logements en duplex pour les rendre adaptés aux personnes à mobilité réduite,

- l'accroissement de la surface de près de 220 logements par incorporation des loggias ;

Qu'il a, ainsi, été décidé d'engager des travaux de réhabilitation de grande envergure touchant à la fois : les espaces extérieurs de l'immeuble (espaces paysagers, parkings), les parties communes (halls d'entrée, ascenseurs, escaliers, toiture avec la construction de logements en terrasse) et les appartements (façades et huisseries extérieures, plomberie incluant le système de chauffage, électricité, salle de bain, porte palière) ;

Que le choix a été fait par le bailleur d'effectuer les travaux en site occupé ;

Que seuls ont été relogés, avant le début des travaux, les occupants de certains logements dont la destination devait être entièrement modifiée en raison de la division de logements duplex en deux appartements ;

Que la durée du chantier était initialement estimée à dix-huit mois ;

Considérant que les documents produits par la société TOIT ET JOIE ont permis de retracer approximativement le déroulement des travaux :

- le choix des entreprises était annoncé en juin 2012 par le bailleur, lequel indiquait qu'une campagne de visite des logements se déroulerait pendant l'été,

- l'entrée de la résidence située [...] était neutralisée en août pour être réservée au passage des véhicules de chantier,

- le déménagement des caves était exigé pour le 6 août 2012 afin que les travaux puissent y commencer,

- les arbres du parking étaient abattus du 3 au 7 septembre 2012,

- le 4octobre 2012, lors d'une réunion d'information publique, un calendrier de travaux était présenté aux locataires, il en ressortait, pour l'essentiel :

un achèvement annoncé en novembre 2013, la phase préparatoire étant incluse dans les 18 mois prévus,

les travaux touchant l'intérieur des appartements (hors chauffage) devaient débuter par tranches en octobre 2012, et s'étaler pour les deux ailes de la résidence sur six mois (jusqu'en mars 2013),

les travaux de façade devaient s'échelonner de janvier à novembre 2013,

le remplacement du système dc chauffage devait être effectué de mai à octobre 2013,

la page intitulée : ‘'Zoom sur les travaux dans votre logement'‘, permettait aux locataires de comprendre que l'ensemble des interventions au sein de leur logement (gaines, plomberie, électricité, menuiseries extérieures, porte palière, chauffage et finitions) seraient effectuées par tranches et totaliseraient 15 jours d'intervention (4 jours + 1 jour + 8 jours +1 jour + 1 jour),

le bailleur avait également annoncé qu'un avis de travaux serait adressé aux locataires deux semaines à l'avance, il était demandé aux locataires, selon les différentes interventions à réaliser, de débarrasser les balcons et libérer une bande d'un mètre linéaire autour de la fenêtre, de faciliter l'accès aux prises électriques de la cuisine, de vider les meubles d'évier, de faciliter l'accès à la salle de bain, de dégager l'accès aux colonnes d'eau au niveau du séjour et des chambres ;

Considérant que, parallèlement selon la lettre d'information de novembre 2012, les travaux de démolition des parties communes et des studios étaient déjà en cours, la démolition des séchoirs venant de débuter, avec une durée d'intervention prévue jusqu'en janvier 2013 ;

Que le bailleur alertait les locataires se trouvant dans les étages supérieurs de ce que le bruit allait être important ;

Que la fin des travaux de démolition en toiture a été ultérieurement annoncée pour la mi-mars 2013 ;

Que, dès le mois de novembre, les locataires se sont plaints des travaux en cours dans leur appartement, suite à des demandes relatives au déroulement des travaux et aux finitions une visite des logements leur ayant été proposée les 4 et 7 décembre2012, la permanence sociale se tenant les mêmes jours, puis à nouveau les 9 et 11 janvier2013 ;

Qu'en mars 2013, une benne était mise à disposition des locataires pour débarrasser les objets se trouvant sur leurs balcons, impliquant que les travaux de façade, qui devaient débuter en janvier 2013, n'avaient pas encore commencé ;

Qu'en avril 2013, la neutralisation des ascenseurs centraux était annoncée par la société TOIT ET JOIE pour cinq mois, puis de nouveau annoncée pour une durée prévisible de quatre mois en août 2013, laissant ainsi, à disposition des locataires, les deux ascenseurs latéraux à partager avec les entreprises intervenant sur le chantier - une lettre d'information du bailleur relatant une panne des ascenseurs B et C en juillet 2013 ;

Que le 19 juin 2013, il était procédé au retrait de l'antenne de toit, les locataires ayant été informés de ce que cela entraînerait des nuisances sonores importantes ;

Qu'en juin et juillet 2013 - selon le compte rendu établi pour le conseil d'administration de la société TOIT ET JOIE du 29 octobre 2013 - d'importantes précipitations provoquaient des infiltrations d'eau par la toiture, occasionnant des dégâts des eaux dans une quarantaine de logements des étages supérieurs ;

Qu'un incendie s'est manifesté au niveau des caves le 18 juillet 2013 ;

Considérant qu'en juillet 2013, les malfaçons reprochées par la société TOIT ET JOIE à la société SEE SIMEONI sur les travaux de façade et les huisseries extérieures ont entraîné leur suspension - l'annonce de l'arrêt de ces travaux ayant été portée à la connaissance des locataires le 25 octobre 2013 ;

Que la société TOIT ET JOIE indiquait, à cette date, avoir fait procéder au calfeutrement provisoire des huisseries mal posées, que les travaux intérieurs des logements avaient été réalisés à 95 % et le remplacement des portes palières à 60 %, que restaient les peintures, finitions, et la résolution des difficultés liées aux travaux de façade et des menuiseries extérieures, que les travaux de gros œuvre et de plomberie étaient achevés dans les parties communes, que l'état d'avancement des aménagements extérieurs était estimé à 20% et qu'en moyenne, plus d'un an après leur démarrage effectif, l'état d'avancement des travaux était de l'ordre dc 50 % ;

Que les locataires ont été invités à faire connaître leur éventuel souhait d'être relogés en novembre2013 ;

Qu'il résulte enfin d'une lettre, adressée au maire de FRESNES, le 14 février 2014, par la société TOIT ET JOIE, que l'ascenseur neuf projeté n'était toujours pas installé, que les trous effectués dans les murs et sols des appartements pour faire passer les nouvelles canalisations de chauffage étaient en cours de rebouchage depuis décembre 2013 jusqu'à une date prévisible de mars 2014 ;

Qu'en septembre 2014, une nouvelle entreprise : la société BREZILLON, venait d'être choisie pour reprendre le chantier de la société SEE SIMEONI, la durée des travaux restant à effectuer étant alors estimée à 14 mois minimum ;

Considérant, s'agissant du chauffage de la résidence : dispositif collectif alimenté par le réseau de chauffage urbain, qu'il connaissait des vicissitudes avant le démarrage des travaux puisque d'après les documents de la société TOIT ET JOIE, en décembre 2011, une fuite avait privé les locataires de chauffage dans les salles de bain et qu'en février 2012, la chaufferie s'était avérée insuffisante compte tenu de températures extérieures particulièrement basses ;

Qu'après le début des travaux, en janvier 2013, le bailleur reconnaissait lui-même dans sa lettre d'information mensuelle qu'en cette période de froid intense, la chaleur des appartements n'atteignait pas 19° Celsius, annonçait la hausse de fourniture de chauffage par la ville, la mise à disposition de convecteurs électriques par la société TOIT ET JOIE, le remboursement des provisions sur charge de décembre et janvier et la demande faite par ses soins aux entreprises de procéder au calfeutrement des parties communes ;

Qu'après qu'ait été réclamée aux locataires la restitution des convecteurs prêtés avant le 2 avril 2013, une panne a privé les logements de chauffage et d'eau chaude du 2 au 3 avril 2013 ;

Que le 15 octobre 2013, le système de chauffage qui avait été entièrement changé n'était toujours pas opérationnel : des convecteurs ayant été à nouveau proposés aux locataires, la mise en eau ayant été effectuée du 21 au 26 octobre 2013 en vue d'une mise fonction du chauffage le 26 octobre ;

Que le 30 octobre 2013, une panne du chauffage urbain a perturbé les opérations de purge en cours ;

Qu'une coupure est intervenue le 21 novembre entre 8h et 18h afin de permettre à l'entreprise BREZILLON d'effectuer des modifications sur la sous-station de chauffage ;

Que selon le bailleur, une panne affectant le chauffage urbain a mis l'installation hors service le 22 novembre 2013 ;

Qu'enfin, aux termes d'un courrier adressé au maire de FRESNES le 14 février 2014, la société TOIT ET JOIE reconnaissait que depuis qu'il avait été mis en marche fin octobre 2013, l'installation de chauffage avait été instable et que s'il avait été remédié aux dysfonctionnements fin décembre 2013, ?l'apparition de nouvelles instabilités?, non liées à des conditions climatiques particulières, avait été relevée depuis le début du mois de février 2014 ;

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Sur la nature et l'ampleur des nuisances alléguées par les locataires

Considérant que ce rappel chronologique des faits litigieux a permis de mesurer l'ampleur des interventions engagées, le retard pris dans les travaux au regard de la durée initialement prévue, et l'importance des difficultés rencontrées sur le chantier ;

Qu'il corrobore les témoignages des locataires qui, s'ils restent subjectifs, donnent, par leur nombre (40 familles ont constitué un dossier individuel) et par la répétition des mêmes constats, une vision relativement précise des préjudices de jouissance, subis par les occupants des lieux, en lien avec l'exécution du chantier sous ses divers aspects ;

Que les photos des appartements et des parties communes, les enregistrements sonores et vidéo, les constats d'huissier produits et les courriers émanant du maire de FRESNES, venu dans la résidence en octobre 2013, sont autant d'éléments qui confortent l'état du chantier dans l'immeuble et ses nuisances au quotidien au sein des appartements le composant, s'agissant d'un site occupé ;

Considérant que les quitus de travaux produits par la société TOIT ET JOIE ne justifient en rien de la bonne exécution des travaux dans les appartements visités par les huissiers ;

Qu'en effet, le quitus relatif au chauffage concerne le logement 230 et n'est pas signé par le locataire ; les autres quitus donnés portaient sur la pose d'une façade de gaine chez Madame EE... UC..., sur la pose d'une nouvelle porte palière chez Monsieur M... T... et sur les travaux de plomberie chez Madame XG... XA... - à savoir une partie seulement des interventions réalisées au sein des appartements ;

Considérant, ainsi, qu'il ressort des témoignages et pièces des locataires l'existence de nuisances sonores provenant des marteaux piqueurs, scies à métaux et coups de masse lors des destructions des séchoirs, des studios, et de certaines parties communes ;

Que concernant ces bruits, tels que décrits dans le constat d'huissier de Maître SH... du 13 juin 2013, il est précisé qu'il est impossible de tenir une conversation, même en haussant la voix ;

Que la permanence de ces nuisances sur la durée des démolitions effectuées dans les parties communes et sur le toit de l'immeuble, depuis octobre 2012 jusqu'à mars 2013 au moins, explique la fatigue décrite par les locataires, résultant notamment de l'impossibilité pour les personnes ayant des horaires de travail décalés de se reposer en journée, et pour leurs enfants de faire leurs devoirs ou de préparer leurs examens ;

Considérant que la poussière environnante dégagée par les travaux dans les parties communes, les façades et à l'intérieur des appartements, impliquant le percement des murs (notamment pour le chauffage) pendant plusieurs jours, qui par nature s'infiltrait dans tous les espaces, a nécessairement généré un désagrément important et quasiment continuel, dénoncé par tous ;

Considérant que, de même, les infiltrations d'eau, reconnues par le bailleur, ont été décrites et photographiées par les locataires, dont certains ont produit le courrier de leur assureur suite à leur déclaration de sinistre ;

Que les dégâts des eaux ont eu au moins trois causes : les infiltrations par la toiture au moment des fortes intempéries de juin et juillet 2013, touchant surtout les appartements des étages élevés, la dégradation de canalisations en raison de chutes de gravats à l'intérieur des gaines et des fuites, survenues au moment de la mise en eau du circuit de chauffage ;

Qu'ainsi, le maire de FRESNES, dans sa lettre du 15 novembre 2013, a fait état des sinistres liés aux gros orages de juin 2013 et de l'absence de réparation rapide des dégâts ;

Que même indemnisés par leurs assureurs, les locataires ne pouvaient remettre leur logement en état tant que les travaux n'étaient pas terminés et alors que l'insuffisance de chauffage dans les logements, deux hivers de suite, n'a pu favoriser le séchage des murs ;

Que ces dégâts des eaux répétés ont eu une incidence forte sur la vie quotidienne des occupants : sensation de froid et d'inconfort, développement d'odeurs nauséabondes, désagrément esthétique, les infiltrations ayant notamment soulevé des parquets et certains locataires devant placer un seau au pied de leur lit ;

Que par ailleurs, le remplacement du système de chauffage a engendré des nuisances importantes pour les locataires : pose des nouveaux radiateurs avant la dépose des anciens, engendrant provisoirement une perte de place importante, maintien en place pendant plusieurs semaines d'anciennes canalisations coupées, percement de trous dans les planchers et murs ouvrant sur les appartements voisins, dont il est admis par la société TOIT ET JOIE qu'ils n'ont fait l'objet d'une campagne de rebouchage systématique qu'à compter de décembre 2013 et jusqu'en mars 2014 ;

Considérant que la surface des logements a été durablement réduite, notamment en raison des travaux de façade, obligeant certains locataires à se débarrasser de meubles qui ne trouvaient plus place chez eux, à entasser leurs affaires et vivre dans un espace confiné et désorganisé ;

Que la suppression des balcons et l'indisponibilité des caves les a, en outre, privés de tout espace extérieur de stockage ;

Que cette réduction de leur espace de vie a été constatée par les huissiers de justice, intervenus aux mois de juin et juillet 2013, et par le maire de FRESNES, venu visiter des appartements de la résidence le 14 octobre 2013, son courrier du 16 octobre 2013 indiquant que la situation des fenêtres et façades, laissée en état depuis l'été, rendait l'espace inhabitable pour les occupants ;

Considérant que les malfaçons, invoquées par les locataires, tels les tuyaux de chauffage condamnant un placard, l'absence de finition ou de raccord au niveau des murs et des sols ou encore la chute répétée de la porte de douche, participent du préjudice de jouissance qu'ils ont subi pendant les travaux ;

Considérant globalement, que le démarrage des travaux en même temps au niveau des extérieurs, des parties communes et des appartements a dégradé le cadre de vie des locataires de la résidence, tant au plan esthétique qu'au plan des modalités de circulation aux abords et au sein de la résidence et de leur intimité ;

Qu'ainsi l'arrêt de l'ascenseur central et l'obligation de partager les ascenseurs latéraux avec les ouvriers a souvent obligé les locataires, en raison de la sur-occupation des ascenseurs restants ou de leurs pannes récurrentes, à emprunter les escaliers dans un immeuble de 12 étages ;

Que ces conditions de vie ont inévitablement constitué un frein à la vie sociale des locataires qui, notamment, n'ont pas été en mesure de recevoir chez eux ;

Qu'enfin, la durée des travaux est venue aggraver le caractère anormal de l'ensemble des troubles de jouissance décrits : dix-huit mois initialement annoncés constituant déjà une durée exceptionnelle outre le retard pris dans leur exécution et l'absence de finition dans toutes les pièces des appartements ;

Considérant que, comme l'a relevé le premier juge et selon l'appréciation des éléments portés à la connaissance de la cour, ces faits ont été corroborés par de nombreux témoignages de personnes extérieures à la résidence qui ont établi des attestations ;

Sur l'imputabilité des désordres

Considérant que selon l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 applicable à l'espèce,

‘'Le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.

Les caractéristiques correspondantes sont définies par décret en Conseil d'Etat pour les locaux à usage d'habitation principale (...)

Le bailleur est obligé :

a) De délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ; toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer ; cette clause prévoit la durée de cette imputation et, en cas de départ anticipé du locataire, les modalités de son dédommagement sur justification des dépenses effectuées ; une telle clause ne peut concerner que des logements répondant aux caractéristiques définies en application des premier et deuxième alinéas ;

b) D'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle hormis ceux qui, consignés dans l'état des lieux, auraient fait l'objet de la clause expresse mentionnée au a ci-dessus ;

c) D'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués ;

d) De ne pas s'opposer aux aménagements réalisés par le locataire, dès lors que ceux-ci ne constituent pas une transformation de la chose louée.'‘ ;

Que tout autant l'article 7 de la même loi, oblige le locataire à ‘'laisser exécuter dans les lieux loués les travaux d'amélioration des parties communes ou des parties privatives du même immeuble, les travaux nécessaires au maintien en état, à l'entretien normal des locaux loués, ainsi que les travaux d'amélioration de la performance énergétique à réaliser dans ces locaux ; les dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article 1724 du code civil sont applicables à ces travaux'‘ ;

Qu'enfin, l'article 1724 du Code civil dispose : ‘'si, durant le bail, la chose louée a besoin de réparations urgentes et qui ne puissent être différées jusqu'à sa fin, le preneur doit les souffrir, quelque incommodité qu'elles lui causent, et quoiqu'il soit privé, pendant qu'elles se font, d'une partie de la chose louée. ;

Mais, si ces réparations durent plus de quarante jours (devenu vingt et un jours en cours de chantier à la suite de la loi du 24 mars 2014), le prix du bail sera diminué à proportion du temps et de la partie de la chose louée dont il aura été privé ;

Si les réparations sont de telle nature qu'elles rendent inhabitable ce qui est nécessaire au logement du preneur et de sa famille, celui-ci pourra faire résilier le bail.'‘ ;

Qu'il résulte de l'application de ces textes, que la cour, comme l'a fait le premier juge, doit apprécier la nature et le contenu des troubles subis par les locataires en lien avec les travaux de grande ampleur réalisés, à l'initiative du propriétaire bailleur sur un immeuble, comportant un grand nombre de logements, et en site occupé ;

Considérant que s'appuyant sur l'ensemble de ces éléments, les locataires de la résidence du [...] apparaissent fondés à invoquer des troubles de jouissance anormaux et d'une particulière intensité qui ont incontestablement perturbé, de façon permanente et continue, leur cadre de vie, leur confort et leur intimité pour le moins depuis le début du mois d'octobre 2012 jusqu'à l'achèvement des travaux ;

Que le programme de réhabilitation, même porté à leur connaissance, ne permettait pas aux occupants de comprendre ce qu'ils devraient endurer en termes de nuisances quotidiennes pendant la durée du chantier ;

Que le document intitulé ‘'Accord collectif'‘ du 5 juillet 2011 - qui présente sur deux pages la liste des réalisations en projet sur le bâti, les équipements et les espaces extérieurs, sans précision quant à la nature des travaux, leurs modalités d'exécution et leurs effets dommageables éventuels pendant des mois - ne saurait exonérer le bailleur, alors que l'adhésion des locataires, pendant les vacances d'été, n'est pas formellement établie et qu'en tout état de cause, celle-ci ne pouvait constituer un engagement juridique de leur part ;

Que les troubles du sommeil ou les états dépressifs, imputés par les demandeurs à l'importance du bruit ou du stress subi quotidiennement du fait des travaux, font nécessairement partie intégrante du trouble de jouissance invoqué par l'ensemble des locataires demeurés sur place ;

Qu'il appartient donc au bailleur, sur qui pèse une obligation de résultat de délivrance et de jouissance paisible des lieux loués, d'assumer sa responsabilité et d'indemniser le préjudice réel et certain, personnellement subi par les locataires présents sur le site depuis le début du mois d'octobre 2012 jusqu'à la date de l'achèvement du chantier ;

Considérant, en revanche, que la preuve d'un lien de causalité direct et certain entre la révélation ou l'aggravation de pathologies existantes alléguées - telles que les rhumes, grippes, prurit ou asthme - et les travaux litigieux n'est pas rapportée, faute d'expertise médicale diligentée à l'époque des faits, pour chaque individu s'en plaignant ;

Qu'il en est tout autant des accidents corporels ponctuellement invoqués par certains locataires - comme Madame QS..., qui elle a été ébouillantée aux pieds le 26juin 2013 à la suite de la chute d'une friteuse elle-même provoquée par les vibrations des marteaux-piqueurs, ou Monsieur RB..., victime, le 24 mars 2014, d'une luxation de l'épaule gauche et de contusions après avoir heurté une planche de bois sur le chantier de la résidence - alors que la preuve du lien de causalité avec les nuisances du chantier n'est pas suffisamment établie ;

Qu'enfin, c'est à bon droit que le tribunal a retenu que ‘'les éléments du dossier ne permettaient pas de déterminer avec certitude si l'incendie du 18 juillet 2013 trouvait sa cause dans les travaux en cours au sein de l'immeuble'‘ ;

Que ces prétentions à indemnisation de ces dommages seront donc rejetées par la cour ;

Sur l'indemnisation des préjudices subis

Considérant que le dépassement excessif de la durée du chantier a nui à chacun des locataires qui ont occupé les logements pendant l'exécution des travaux ;

Que concernant tous les locataires intimés ici - lesquels ont apporté la preuve qu'ils avaient été victimes des dommages sur le site pendant l'exécution des travaux - le retard pris, non contesté par la société TOIT ET JOIE, constitue un préjudice de même nature qui doit être réparé par l'allocation d'une même indemnité, chacun d'eux l'ayant subi ;

Qu'ils demandent chacun, non à titre collectif comme le prétendent certains intimés, l'indemnisation de leur préjudice personnel en estimant sa réparation à une somme qu'ils ont déterminée sur une période variable en fonction de leur départ ou de leur maintien dans les logements concernés ;

Considérant, selon les pièces produites aux débats, que le planning prévisionnel communiqué aux locataires annonçait une durée de chantier de 18 mois environ, dont 13 mois de travaux effectifs ;

Que les travaux ont commencé, non pas au début de l'année 2012 comme initialement prévu, mais au mois d'octobre 2012 ;

Que par procès-verbal de constat d'huissier de justice, la société TOIT ET JOIE établit que le chantier se trouvait achevé et faisait l'objet d'une réception par le maître de l'ouvrage le 3 mai 2016 ,

Qu'ainsi, alors qu'une fin de chantier était annoncée pour le début de l'année 2014, il apparaît que la durée excédentaire d'exécution a atteint deux années ;

Considérant que le tribunal, ayant statué alors que la date d'achèvement des travaux litigieux n'était pas connue, a retenu deux périodes d'indemnisation :

- l'une d'octobre 2012 au 22 janvier 2015, date du jugement entrepris

- l'autre à compter de cette date jusqu'à la fin du chantier ;

Que sur la première période, quatre locataires ont définitivement quitté la résidence ;

- Madame XY... en arrêt maladie, a déménagé le 4 janvier 2014 alors qu'elle vivait dans la résidence depuis trente ans, pour un nouveau logement situé à FRESNES pour un loyer deux fois plus élevé ;

- Madame FZ... qui a quitté les lieux le 24 janvier 2014 en raison de son état de santé ;

leur indemnisation respective ayant été arrêtée à 2500 euros ;

- Madame ML... qui est partie en novembre 2013 à BAGNEUX (92), moyennant une légère hausse de loyer, a produit des justificatifs des frais de déménagement restés à sa charge ainsi que de travaux qu'elle a engagés dans le nouveau logement, son indemnisation a été fixée par le premier juge à 3500 euros ;

- Monsieur MY... UF... qui a aussi déménagé avec sa famille le 13 juin 2014 et a dû se reloger à ses frais, il a vu son préjudice réparé par le tribunal à hauteur de 3000 euros ;

Qu'adoptant les motifs du jugement qui a procédé à une appréciation juste et pertinente des réparations accordées auxdites victimes, au regard du préjudice effectivement subi par chacun de ces quatre locataires, la cour confirmera ces chefs d'indemnisation les concernant sur ladite période ;

Considérant que, sur la même période, le tribunal a attribué aux autres victimes demeurées dans l'immeuble, une somme de 4500 euros à titre dommages et intérêts ;

Considérant que les locataires restés dans les lieux persistent, en appel, à solliciter, outre une indemnisation provisionnelle pour la première période, une réduction de leurs loyers pour la seconde période ;

Que sur la seconde période, et dans l'attente de la fin du chantier litigieux, le premier juge a prononcé une réduction de 50 % des loyers payés par les locataires concernés jusqu'au parfait achèvement des travaux des appartements ;

Mais considérant que, selon le procès-verbal de constat du 3 mai 2016, les gros travaux ayant cessé, les dommages les plus importants ont tout autant cessé à cette date ;

Que si Maître WF..., huissier de justice diligenté par la société TOIT ET JOIE ne s'est pas rendu dans les lots privatifs lors de l'établissement de son constat du 3 mai 2016, si le bailleur n'a pas fait signer par les locataires intimés un quelconque quitus de fin de travaux relatifs aux finitions intérieures, et si certains d'entre eux produisent des constats établissant que ces finitions n'étaient pas achevées dans les logements de Monsieur E... (appt. 228), Madame K... (appt. 440), Madame et Monsieur UC... (appt. 727) et Madame BN... (appt. 318), il n'est cependant pas établi que ces travaux d'achèvement, lot par lot, ont généré un préjudice personnel et réel pour chaque locataire de la résidence ;

Qu'en effet, ces locataires excipent de travaux de ‘'finition de la peinture'‘, ‘'absence de reprise de finition'‘, ‘'désordres'‘, qui loin de démontrer l'absence d'achèvement des travaux relèvent des réserves de post-achèvement, voire d'appréciations qualitatives subjectives ;

Que la levée d'éventuelles réserves ne doit être assimilée avec l'achèvement des travaux litigieux ;

Qu'enfin, à l'occasion d'une réunion tenue le 10 octobre 2016, la représentante des locataires a informé la société TOIT ET JOIE de ce que les locataires, parties à la procédure, allaient reprendre le paiement intégral du loyer à partir du mois de novembre et ce de manière rétroactive, ce dont il se déduit que les travaux générant des nuisances ont été terminés avant le 3 novembre 2016 date du constat établi à l'initiative des locataires ;

Qu'ainsi la cour retiendra que les travaux de l'immeuble, préjudiciables aux locataires, ont été achevés le 3 mai 2016 ;

Et considérant que, du dernier semestre 2015 jusqu'au début du mois de mai 2016, une seule entreprise était encore présente sur les lieux ;

Que l'intensité des nuisances s'était alors estompée, les travaux intérieurs à l'ensemble des logements étant très avancés et la démolition des séchoirs achevée, seuls des travaux d'aménagement des parties communes et de construction en terrasse se sont poursuivis ;

Que la cour confirmera donc le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné la réduction du loyer hors provisions pour charges à hauteur de 50 %, eu égard aux préjudices subis par les locataires restés dans les lieux, à compter du 15 janvier 2015, mais le réformera pour retenir la date du 3 mai 2016 marquant la date d'achèvement des travaux préjudiciables justifiant réparation» ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE

«Sur les demandes formées par les locataires et I'UDCLV à l'encontre de la société TOIT ET JOIE

a) Fondement juridique

L'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version antérieure à la loi du 24 mars 2014, dispose que le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation. Le bailleur est obligé :

a) De délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ;

b) D'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle hormis ceux qui, consignés dans l'état des lieux, auraient fait l'objet de la clause expresse ;

c) D'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués ;

d) De ne pas s'opposer aux aménagements réalisés par le locataire, dès lors que ceux-ci ne constituent pas une transformation de la chose louée ;

L'article 7 de la même loi oblige le locataire à laisser exécuter dans les lieux loués les travaux d'amélioration des parties communes ou des parties privatives du même immeuble, les travaux nécessaires au maintien en état, à l'entretien normal des locaux loués, ainsi que les travaux d'amélioration de la performance énergétique à réaliser dans ces locaux ;

Il résulte de la combinaison des dispositions de ces articles que si le bailleur est autorisé à effectuer des travaux d'amélioration, d'entretien et de maintien en l'état au sein des logements et des parties communes, et ce en présence des locataires qui doivent les souffrir, il convient néanmoins d'apprécier le caractère anormal des troubles subis par les locataires du fait des travaux ainsi réalisés, lesquels peuvent dans ce cas donner lieu à indemnisation ; Le caractère anormal des troubles liés aux travaux peut résulter notamment de leur durée, de l'intensité du bruit et de la saleté, du nombre de zones du logement ou des parties communes concernées, de la fréquence et de l'ampleur des atteintes portées au confort et à l'intimité des personnes ;

Par ailleurs, les demandeurs invoquent des désordres dus aux travaux qui présenteraient un danger pour la santé des personnes et pour leur sécurité ; Dans la mesure où ces désordres auraient entraîné un préjudice, ils sont également indemnisables ; En effet, le bailleur est responsable vis-à-vis de ses locataires, des préjudices causés par les travaux qu'il a engagés et dont il a, comme maître d'ouvrage, délégué l'exécution à des professionnels du bâtiment ;

b) Rappel chronologique du déroulement des travaux

En l'espèce, il est établi et non contesté que la société TOIT ET JOIE, propriétaire de la résidence située [...] , a décidé d'engager des travaux de réhabilitation de grande envergure touchant à la fois les espaces extérieurs de l'immeuble (espaces paysagers, parkings), les parties communes (halls d'entrée, ascenseurs, escaliers, toiture avec la construction de logements en terrasse) et les appartements (façades et huisseries extérieures, plomberie incluant le système de chauffage, électricité, salle de bain, porte palière) ; Le choix a été fait par le bailleur d'effectuer les travaux en site occupé ; Seuls ont été relogés avant le début des travaux, les occupants de certains logements dont la destination devait être entièrement revue (division de duplex en deux appartements) ; La durée du chantier était initialement estimée à dix-huit mois ; L'analyse des documents produits par la société TOIT ET JOIE elle-même permet de retracer approximativement le déroulement des travaux ; Ainsi, le choix des entreprises était annoncé en juin 2012 par le bailleur qui précisait qu'une campagne de visite des logements se déroulerait pendant l'été ; L'entrée de la résidence située [...] était neutralisée en août pour être réservée au passage des véhicules de chantier ; Le déménagement des caves était exigé pour le 6 août 2012 afin que les travaux puissent y commencer ; Les arbres du parking étaient abattus du 3 au 7 septembre 2012 ;

Le 4 octobre 2012, lors d'une réunion d'information publique, un calendrier de travaux était présenté, avec un achèvement prévu en novembre 2013, la phase préparatoire étant incluse dans les 18 mois annoncés ; Les travaux touchant l'intérieur des appartements (hors chauffage) devaient débuter par tranches en octobre 2012, et s'étaler pour les deux ailes de la résidence sur six mois (jusqu'en mars 2013) ; Les travaux de façade devaient s'échelonner de janvier 2013 à novembre 2013 ; Le remplacement du système de chauffage devaient être effectué de mai à octobre 2013 ; La page intitulée ?Zoom sur les travaux dans votre logement?, permettait aux locataires de penser que l'ensemble des interventions au sein de leur logement (gaines, plomberie, électricité, menuiseries extérieures, porte palière, chauffage et finitions) seraient effectuées par tranches et totaliseraient 15 jours d'intervention (4 jours + 1 jour + 8 jours + 1 jour + 1 jour) ; Le bailleur avait également annoncé qu'un avis de travaux serait adressé aux locataires deux semaines à l'avance ; Il leur était demandé, selon les différentes interventions à réaliser, de débarrasser les balcons et libérer une bande d'un mètre linéaire autour de la fenêtre, de faciliter l'accès aux prises électriques de la cuisine, de vider les meubles d'évier, de faciliter l'accès à la salle de bain, de dégager l'accès aux colonnes d'eau au niveau du séjour et des chambres ;

Parallèlement, aux termes de la lettre d'information de novembre 2012, les travaux de démolition des parties communes et des studios étaient déjà en cours et la démolition des séchoirs venait de débuter, avec une durée d'intervention prévue jusqu'en janvier 2013 ; Le bailleur alertait les locataires se trouvant dans les étages supérieurs de ce que le bruit allait être important ; En réalité, la fin des travaux de démolition en toiture a été ultérieurement annoncée pour la mi-mars 2013 ;

Dès le mois de novembre, les locataires se sont plaints des travaux en cours dans leur appartement puisque suite à des demandes relatives au déroulement des travaux et aux finitions, une visite des logements leur a été proposée les 4 et 7 décembre 2012, la permanence sociale se tenant les mêmes jours, puis à nouveau les 9 et 11 janvier 2013 ;

En mars 2013, une benne était mise à disposition des locataires pour débarrasser les objets se trouvant sur leurs balcons, ce qui permet de penser que les travaux de façade, qui devaient débuter en janvier 2013, n'avaient pas encore commencé ;

En avril 2013, la neutralisation des ascenseurs centraux était annoncée par la société TOIT ET JOIE pour cinq mois ; En août 2013, elle était de nouveau annoncée pour une durée prévisible de quatre mois ; Restaient à disposition des locataires les deux ascenseurs latéraux à partager avec les entreprises de travaux ; Il est fait état, dans une lettre d'information du bailleur, d'une panne des ascenseurs B et C en juillet 2013 ;

Le 19 juin, il était procédé au retrait de l'antenne de toit et les locataires avaient été informés que cela entraînerait des nuisances sonores importantes ;

En juin et juillet 2013, d'importantes précipitations entraînaient des infiltrations d'eau par la toiture, occasionnant des dégâts des eaux dans une quarantaine de logements des étages supérieurs (d'après le compte rendu établi pour le conseil d'administration de la société TOIT ET JOIE du 29 octobre 2013) ;

Un incendie a eu lieu au niveau des caves le 18 juillet 2013 ;

En juillet 2013, les malfaçons reprochées par la société TOIT ET JOIE à la société SEE SIMEONI sur les travaux de façade et les huisseries extérieures ont entraîné la suspension de ces derniers ; L'annonce de l'arrêt de ces travaux a été faite par le bailleur aux locataires le 25 octobre 2013 ; A cette date, la société TOIT ET JOIE indiquait avoir fait procéder au calfeutrement provisoire des huisseries mal posées ; Toujours d'après le compte rendu du 29 octobre 2013, 96 logements avaient été équipés en menuiserie mais avec de nombreuses malfaçons ; Les travaux intérieurs des logements avaient été réalisés à 95% et le remplacement des portes palières à 60 % ; Restaient les peintures, finitions, et la résolution des difficultés liées aux travaux de façade et des menuiseries extérieures ; Les travaux de gros œuvre et de plomberie étaient achevés dans les parties communes ; L'état d'avancement des aménagements extérieurs était estimé à 20 % ; En moyenne, plus d'un an après leur démarrage effectif, l'état d'avancement des travaux était de l'ordre de 50 % ;

Les locataires ont été invités à faire connaître leur éventuel souhait d'être relogés en novembre 2013 ;

Il résulte enfin du courrier adressé au maire de FRESNES le 14 février 2014 par la société TOIT ET JOIE que l'ascenseur neuf projeté n'était toujours pas installé à cette date, que les trous effectués dans les murs et sols des appartements pour faire passer les nouvelles canalisations de chauffage étaient en cours de rebouchage depuis décembre 2013 et jusqu'à une date prévisible en mars 2014 ;

Au moment de l'audience en septembre 2014, il a été indiqué par la société TOIT ET JOIE qu'une nouvelle entreprise venait d'être choisie pour reprendre le chantier de la société SEE SIMEONI ; La durée des travaux restant à effectuer était alors estimée à 14 mois minimum ;

S'agissant du chauffage de la résidence, il s'agit d'un système collectif alimenté par le réseau de chauffage urbain ; Il connaissait des vicissitudes avant le démarrage des travaux puisque d'après les documents de la société TOIT ET JOIE, en décembre 2011, une fuite avait privé les locataires de chauffage dans les salles de bain et en février 2012, la chaufferie s'était avérée insuffisante compte tenu de températures extérieures particulièrement basses ; Après le démarrage des travaux, en janvier 2013, le bailleur reconnaissait lui-même dans sa lettre d'information mensuelle qu'en cette période de froid intense, la chaleur des appartements n'atteignait pas 19° Celsius ; Il annonçait la hausse de fourniture de chauffage par la ville, la mise à disposition de convecteurs électriques par la société TOIT ET JOIE, le remboursement des provisions sur charge de décembre et janvier et la demande faite par ses soins aux entreprises de procéder au calfeutrement des parties communes ; Il a ensuite été demandé aux locataires de restituer les convecteurs prêtés avant le 2 avril 2013 mais du 2 au 3 avril 2013, une panne a privé les logements de chauffage et d'eau chaude ;

Le 15 octobre 2013, le système de chauffage avait été entièrement changé mais n'était pas opérationnel ; Des convecteurs ont été de nouveau proposés aux locataires ; La mise en eau a été effectuée du 21 au 26 octobre 2013 en vue d'une mise en route du chauffage le 26 octobre 2013 ;

Le 30 octobre 2013, une panne du chauffage urbain a perturbé les opérations de purge en cours ;

Une coupure est intervenue le 21 novembre de 8h à 18h pour permettre à l'entreprise BREZILLON d'effectuer des modifications sur la sous-station de chauffage ; Le 22 novembre 2013, c'est, d'après le bailleur, une panne de chauffage urbain qui a mis l'installation hors service ;

Dans son courrier adressé au maire de FRESNES le 14 février 2014, la société TOIT ET JOIE reconnaissait que depuis qu'il avait été mis en marche fin octobre 2013, le système de chauffage avait été instable et que s'il avait été remédié aux dysfonctionnements fin décembre 2013, ?l'apparition de nouvelles instabilités?, non liées à des conditions climatiques particulières, avait été constatée depuis le début du mois de février 2014 ;

c) Existence et définition des troubles subis par les locataires

Ce rappel chronologique permet de mesurer l'ampleur des interventions engagées, le retard pris dans les travaux par rapport à la durée initialement prévue et l'importance des difficultés rencontrées sur le chantier ; Il vient conforter les témoignages des demandeurs qui, s'ils restent évidemment subjectifs, donnent par leur nombre (40 familles ont constitué un dossier individuel) et par la répétition des mêmes items, une idée assez précise des préjudices de jouissance rencontrés par les locataires du fait de la réalisation de ces travaux ; Leurs propos sont également illustrés par des photos de leurs appartements et des parties communes, des enregistrements sonores et vidéo, les constats d'huissier produits et les courriers émanant du député-maire de FRESNES, qui s'est déplacé dans la résidence au moins une fois, en octobre 2013, pour constater par lui-même l'état de l'immeuble et des appartements ;

Les quitus de travaux produits par la société TOIT ET JOIE ne justifient pas, contrairement à ce que soutient la défenderesse, de la bonne exécution des travaux dans les appartements visités par les huissiers : le quitus relatif au chauffage concerne le logement 230 et n'est pas signé par le locataire ; Les autres quitus donnés portaient sur la pose d'une façade de gaine chez Madame EE... UC..., sur la pose d'une nouvelle porte palière chez Monsieur M... T... et sur les travaux de plomberie chez Madame XG... XA..., c'est-à-dire sur une partie seulement des interventions réalisées au sein des appartements ;

Ainsi ressortent en premier lieu des témoignages et pièces des demandeurs, les troubles liés au bruit des marteaux piqueurs, scies à métaux et coups de masse lors des destructions des séchoirs, studios, et parties communes, bruits décrits également par le constat d'huissier de Maître SH... du 13 juin 2013, qui précise qu'il est impossible de tenir une conversation, même en haussant la voix ; La durée même des destructions engagées dans les parties communes et sur le toit, d'octobre 2012 à mars 2013 au moins, explique la fatigue décrite par les locataires, résultant de l'impossibilité pour les personnes ayant des horaires de travail décalé de se reposer en journée, pour les enfants de faire leurs devoirs ou de préparer leurs examens, etc. ;

La poussière est également un désagrément important, dénoncé par tous, et il est évident que l'ampleur des travaux de destruction, qui ont concerné les parties communes et les façades pendant des mois d'affilée, mais également les travaux à l'intérieur des appartements impliquant le percement des murs (notamment pour le chauffage) ont généré de la poussière qui par sa nature volatile, s'infiltre dans tous les espaces ;

Les infiltrations d'eau, parfaitement reconnues par le bailleur, ont également été décrites et photographiées par les demandeurs dont certains ont produit le courrier de leur assureur suite à leur déclaration de sinistre ; Les dégâts des eaux ont eu pour origine au moins trois causes : les infiltrations par la toiture au moment des fortes intempéries de juin et juillet 2013, touchant surtout les appartements des étages élevés, la dégradation de canalisations en raison de chutes de gravats à l'intérieur des gaines et des fuites, survenues au moment de la mise en eau du circuit de chauffage ; Le maire de FRESNES, dans son courrier du 15 novembre 2013, faisait état des sinistres liés aux gros orages de juin 2013 et de l'absence de réparation rapide des dégâts ; Force est de constater que, même lorsqu'ils ont été indemnisés par leur assureur, il n'était pas possible pour les locataires de remettre leur logement en état tant que les travaux n'étaient pas terminés et que l'insuffisance de chauffage dans les logements, deux hivers de suite, n'a naturellement pas favorisé le séchage des murs ; Les infiltrations ont également soulevé des parquets ; Certains locataires expliquent même qu'ils ont dû placer un sceau au pied de leur lit ; Ces dégâts des eaux répétés ont une incidence forte sur la vie quotidienne des occupants : sensation de froid et d'inconfort, développement d'odeurs nauséabondes, désagrément esthétique ;

Ainsi qu'il l'a été déjà longuement évoqué et comme l'a reconnu la société TOIT ET JOIE dans les différents documents qu'elle a elle-même produits, les problèmes de chauffage ont été importants, deux hivers de suite ; Ces derniers ont en effet eu lieu pendant l'hiver 2012, apparemment en lien avec des températures particulièrement basses, mais également du fait des travaux en cours, notamment au sein des parties communes qui ont dû être calfeutrées car leur destruction partielle laissait s'engouffrer l'air froid dans le bâtiment ; Ils ont également été récurrents pendant l'hiver 2013, en raison de la mise en route de la nouvelle installation et de l'absence de finition des travaux de façades et d'huisseries, notamment d'octobre à décembre 2013 et en février 2014 ; D'après les témoignages des locataires, les convecteurs mis à disposition par le bailleur étaient en nombre insuffisant pour chauffer toutes les pièces des logements ; Certains contestent avoir reçu le moindre remboursement de leur facture d'électricité ; Il semble en outre que la société TOIT ET JOIE ait envisagé un remboursement forfaitaire, calculé en fonction de la surface du logement et des températures extérieures, et non pas calqué sur la dépense réelle engagée par chaque foyer ; Le bailleur ne produit d'ailleurs aucun élément précis à cet égard de sorte que les efforts dont il fait état (fourniture de convecteurs et remboursement des factures d'électricité et/ou des provisions pour charges) ne peuvent être vérifiés ;

En dehors des problèmes de fonctionnement, le remplacement du système de chauffage a également engendré des nuisances importantes pour les locataires : pose des nouveaux radiateurs avant la dépose des anciens, engendrant provisoirement une perte de place importante, maintien en place pendant plusieurs semaines d'anciennes canalisations coupées, percement de trous dans les planchers et murs ouvrant sur les appartements voisins, dont il est admis par la société TOIT ET JOIE qu'il n'ont fait l'objet d'une campagne de rebouchage systématique qu'à compter de décembre 2013 et jusqu'en mars 2014 ;

La surface des logements a été durablement réduite, notamment pas les travaux de façade, obligeant certains locataires à se débarrasser de meubles qui ne trouvaient plus place chez eux, à entasser leurs affaires et à vivre dans un espace confiné et désorganisé ; La suppression des balcons et l'indisponibilité des caves les a en outre privés de tout espace extérieur de stockage ; Cette réduction de leur espace de vie a été constatée par les huissiers intervenus en juin et juillet 2013 ; Le maire de FRESNES, qui a également visité des appartements de la résidence le 14 octobre 2013, a pu écrire dans son courrier du 16 octobre 2013 que la situation des fenêtres et façades, laissée en état depuis l'été, rendait l'espace inhabitable pour les occupants ;

Les malfaçons invoquées par les locataires, comme les tuyaux de chauffage condamnant un placard, l'absence de finition ou de raccord au niveau des murs et des sols, ou encore la chute répétée de la porte de douche, participent du préjudice de jouissance qu'ils subissent pendant les travaux même si elles devraient trouver progressivement des solutions à mesure de l'achèvement des travaux ;

Plus globalement, le démarrage des travaux en même temps au niveau des extérieurs, des parties communes et des appartements a dégradé le cadre de vie des locataires de la résidence, à la fois sur le plan de l'esthétique, sur celui des modalités de circulation aux abords et au sein de la résidence, et du point de vue de leur intimité ; L'arrêt de l'ascenseur central et l'obligation de partager les ascenseurs latéraux avec les ouvriers a souvent obligé les locataires, en raison de la sur-occupation des ascenseurs restants ou de leurs pannes récurrentes, à emprunter les escaliers alors que l'immeuble comporte 12 étages ; Ces conditions de vie sont également un frein à la vie sociale des locataires qui ne sont pas en mesure de recevoir des proches chez eux ; Ils décrivent en outre la gêne résultant de la nécessité de prendre des jours de congé pour être présents lorsque les ouvriers devaient intervenir, aggravée par le non-respect par le bailleur du délai de prévenance de 15 jours qu'il avait pourtant annoncé, mais aussi par les nombreux rendez-vous manqués et parfois par le comportement inadapté des ouvriers ;

La durée des travaux vient aggraver le caractère anormal de l'ensemble des troubles ci-dessus évoqués ; A cet égard, il est intéressant de rappeler que les dispositions de l'article 1724 du code civil prévoient que dès lors que des travaux dépassent quarante jours (durée d'ailleurs ramenée par la loi du 24 mars 2014 à vingt et un jours), le prix du bail doit être diminué à proportion du temps et de la partie de la chose louée dont le locataire aura été privé ; Il a suffisamment été rappelé que les locataires de la résidence du [...] avaient été partiellement privés de la jouissance de leur logement et des parties communes du fait de la réalisation des travaux proprement dits et de l'absence de finition dans toutes les pièces ; Les dix-huit mois initialement annoncés constituaient déjà une durée tout à fait hors norme, mais le retard pris dans les travaux vient encore aggraver le trouble de jouissance des locataires qui perdure à ce jour et ce, pour une durée indéterminée ;

Tous ces éléments ont également pu être constatés par les personnes extérieures à la résidence qui ont établi des attestations ; Ainsi, Madame RF... NM..., qui rendait régulièrement visite à Madame S... XY..., décrit parfaitement les difficultés à trouver l'entrée de l'immeuble, la vaine attente d'un ascenseur et l'obligation de prendre les escaliers pour monter au 12ème étage ; Elle écrit ‘'Dans les étages, il y avait de la poussière blanche partout (...). De grandes bâches étaient disposées pour servir de portes (‘'), celles-ci n'empêchaient aucunement la poussière de se déposer partout. Dans l'appartement de Madame XY..., les meubles étaient tous dérangés afin de faciliter le passage incessant des ouvriers, à chacune de mes visites, l'encombrement des meubles et des cartons se faisait plus dense. Il faisait dans l'appartement un froid insupportable, le bruit des marteaux piqueurs et les vibrations venues du toit empêchaient d'avoir la moindre conversation suivie, il fallait hausser le ton vraiment fort.'‘; Madame LH... UV... BZ..., sœur de Madame XY..., a également constaté, alors qu'elle rendait visite à sa sœur après son hospitalisation (soit courant mai-juin 2013), ‘'du bruit (à la limite du tolérable/continuellement), tous les jours, la poussière qui rentrait de partout, la saleté dans les coursives (déchets des ouvriers), ascenseur en panne régulièrement, parking inaccessible.'‘ ; Madame MU... X..., également amie de Madame XY..., décrit entre autres les travaux ?commencés partout à la fois, et rien de terminé.? ; Le dossier de Madame EE... UC... comporte également des attestations de tiers : Madame VG... HP..., Madame SN... XK... , Madame JS... YO..., Monsieur UL... WZ..., Mademoiselle XH... MR..., Madame UM... XI..., Mademoiselle RY... IX..., Madame WR... PW..., Madame GW... et Madame SB... DC... font état des mêmes troubles et décrivent en outre des problèmes d'infiltrations importants dans l'appartement de la famille UC... ; Madame JS... YO... expose aussi avoir constaté dans le logement de ses amis une température de 13° Celsius et avoir dû héberger les enfants de la famille lorsque les températures au sein du logement étaient trop basses ; Monsieur SK... TL... et Madame OL... TE... ont également attesté en faveur de Madame GG... QP... et de sa fille, Madame SB... SQ..., mentionnant les difficultés d'accès à la résidence, le bruit, la poussière, l'absence de chaleur dans l'appartement, la vue bouchée par un échafaudage ou encore les dégradations résultant des travaux entrepris ;

A ce préjudice de jouissance, les demandeurs ajoutent un préjudice résultant du danger pour la santé et la sécurité des personnes ; Toutefois, ils échouent à établir la réalité d'un préjudice personnel qui puisse être isolé d'un préjudice plus global de jouissance et directement rattaché aux désordres occasionnés par les travaux ; En outre, il apparaît difficile de prouver l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre l'aggravation de pathologies existantes, telles que le prurit ou l'asthme, ou la survenance de rhumes ou de grippes, et les travaux en cours, mais on peut considérer que ces problèmes de santé, de même que les troubles du sommeil ou les états dépressifs imputés par les demandeurs à l'importance du bruit ou du stress occasionné par les travaux, font partie intégrante du trouble de jouissance subi par les locataires ; Par ailleurs, les éléments du dossier ne permettent pas de déterminer avec certitude si l'incendie du 18 juillet 2013 trouve sa cause dans les travaux en cours au sein de l'immeuble ; Il n'est pas établi que la présence de gravas ou de matériel dans les parties communes ait entraîné des chutes de résidents ; Le fait qu'une canalisation se soit retrouvée dans le berceau d'un bébé n'a fort heureusement pas eu de conséquence dommageable puisque l'enfant ne se trouvait pas dans son lit ;

Au total, au vu de l'ensemble de ces éléments, il est parfaitement établi que les locataires de la résidence du [...] subissent, au moins depuis début octobre 2012 et encore à ce jour compte tenu de l'absence d'achèvement des travaux, des troubles de jouissance anormaux et d'une particulière intensité, perturbant de façon continue leur intimité, leur confort et leur cadre de vie ; Ce préjudice anormal de jouissance doit être indemnisé parle bailleur, sur qui pèse une obligation de résultat, sans qu'il soit nécessaire de rapporter la preuve que les désordres occasionnés par les travaux présentent un danger pour la santé des personnes et pour leur sécurité ;

d) Compensations invoquées par le bailleur

La société TOIT ET JOIE met en avant les efforts de concertation menés dès 2009, notamment par l'organisation de réunions d'information des locataires, ainsi que l'accord collectif du 5 juillet 2011 ; Elle soutient que les locataires avaient compris et accepté les troubles inhérents aux travaux et que les contreparties qu'elle leur a offertes suffisaient à compenser les perturbations occasionnées ; Il résulte bien des pièces produites par les parties qu'un certain nombre de réunions ont été organisées avant le démarrage des travaux et que des documents de présentation du projet ont été élaborés à destination des locataires ; Reste que, contrairement à ce qui a pu être indiqué dans la note d'information au conseil d'administration de la société TOIT ET JOIE du 29 octobre 2013, la lecture du programme de réhabilitation ne permettait pas à elle seule aux locataires de comprendre ce qu'ils devraient endurer comme nuisances pendant la durée des travaux ; Force est de constater au contraire que la plupart des documents établis par la société TOIT ET JOIE pendant la phase de concertation sont muets sur la nature, le nombre et la durée desdites nuisances ;

Ainsi le document intitulé ‘'accord collectif'‘ se contente en moins de deux pages de lister les réalisations envisagées sur le bâti, les équipements et les espaces extérieurs en présentant le résultat qui sera obtenu mais sans aucune précision sur la nature des interventions que cela implique ni même aucun calendrier ; Par exemple, la modification des façades est annoncée mais il n'est pas dit que les locataires vont devoir vivre un certain temps avec une surface de vie réduite par la présence d'une façade provisoire placée à l'intérieur de leur logement ; La destruction des séchoirs et la construction de logements en terrasse est également présentée mais il n'est pas indiqué que cela impliquera, notamment pour les occupants des étages supérieurs, des nuisances sonores importantes (utilisation de marteaux piqueurs et de masses) pendant des mois ;

En outre, les contreparties proposées ne sont pas à l'avantage des locataires : ainsi l'augmentation des loyers des locataires en place serait difficilement justifiable, l'augmentation de la surface de leur logement étant le fruit de la suppression de leur balcon et permettant tout juste de conformer leur habitation aux normes de superficie actuelles ; par ailleurs, ceux qui se garaient librement sur le parking de la résidence devront payer un droit de stationnement mensuel de 10 euros ; enfin et surtout, le partage des économies d'énergie pendant 15 ans avec le bailleur constitue en réalité une forme d'augmentation de loyer puisque là où les locataires auraient dû payer moins de charges en raison des travaux d'amélioration de la performance énergétique des logements, ils reverseront au bailleur une somme forfaitaire destinée à permettre à celui-ci de revenir au moins partiellement sur son investissement ;

Enfin, cet accord collectif ne constitue en aucun cas un contrat entre le bailleur et les locataires ; La société TOIT ET JOIE n'a d'ailleurs produit aucun élément objectif sur le taux de réponses positives et la participation des locataires à ce qui constitue en réalité seulement un sondage, auquel il a été proposé de répondre par oui ou par non aux locataires ;

Par ailleurs, la mise à disposition d'appartements-tampon était présentée par la SA TOIT ET JOIE elle-même comme une solution de repli sur la journée pour les locataires et non comme une solution d'hébergement pour plusieurs jours ; Il convient de souligner le fait que ces logements étant eux-mêmes situés au sein de la résidence en travaux, ils constituaient un refuge très relatif ainsi qu'il résulte notamment du témoignage de Madame L... AO... et de Monsieur WE... KH... qui évoquent un équipement insuffisant et le fait qu'ils ont dû supporter des travaux au sein même de l'appartement provisoire où ils étaient installés avec leurs deux enfants en bas âge ; Enfin, ces logements-tampon n'ont été mis à disposition qu'à compter de mars 2013 alors que les travaux de démolition des parties communes et les interventions au sein des appartements avaient débuté en octobre 2012 ;

De même, la présence continue d'une personne du pôle social au sein de la résidence n'a été instaurée que courant 2013 et il n'est pas indiqué par la société TOIT ET JOIE de quels moyens disposait l'animatrice de ce pôle pour intervenir auprès des locataires ; L'ensemble des demandes de relogement des locataires n'ont pas pu être satisfaites ;

Au total, la société TOIT ET JOIE ne justifie pas avoir mis en œuvre des mesures suffisantes pour compenser le trouble anormal de jouissance subi par ses locataires ;

En dernier recours, elle invoque en vain le fait que les loyers de cette résidence seraient inférieurs aux prix pratiqués par les autres bailleurs sociaux à FRESNES ou le fait qu'un certain nombre de locataires bénéficieraient de 1'APL, ces éléments étant sans incidence sur le droit des locataires à bénéficier de conditions de vie paisibles ;

e) Nature et montant de l'indemnisation due par le bailleur aux locataires

La demande initiale des locataires d'être autorisés à consigner leurs loyers n'apparaît pas adaptée au présent litige ; La consignation des loyers est en effet admise en cas d'inexécution totale de ses obligations par le bailleur, soit à raison de l'indisponibilité totale de la chose louée, soit parce qu'il refuse d'effectuer des travaux nécessaires, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; En outre, il n'apparaît pas nécessaire d'attendre la fin des travaux ou le résultat d'une expertise pour fixer le préjudice subi par les locataires ;

En effet, une expertise apparaîtrait seulement susceptible de déterminer les causes précises de malfaçons ou du retard pris sur le chantier en vue d'une indemnisation du maître de l'ouvrage par les entreprises intervenues sur chantier ou par les assureurs, mais elle n'a pas d'intérêt dans les relations entre les locataires et leur bailleur puisque la réalité du préjudice de jouissance des locataires est établi et que ce préjudice, subi par chacun d'eux en raison des travaux engagés dans les parties communes de la résidence et au sein de tous les logements également concernés par les travaux de façade, d'électricité et de plomberie, et par le remplacement de l'ensemble du système de chauffage, peut donner lieu à une indemnisation forfaitaire ;

Les considérations de la SA TOIT ET JOIE sur la prétendue mauvaise foi des locataires qui ne seraient pas à jour de leur loyer ou auraient exigé des entreprises des interventions spécifiques sont sans incidence sur leur droit à indemnisation ;

Au vu des développements qui précèdent, et dans la mesure où les demandeurs ont sollicité à la fois la réduction de leurs loyers à compter de la décision et une indemnisation provisionnelle, le tribunal dispose d'éléments suffisants, compte tenu de la nature, de l'ampleur et de la durée des désordres touchant l'ensemble des locataires de la résidence, pour fixer l'indemnisation définitive de leur préjudice comme suit :

- pour la période écoulée d'octobre 2012 à la date de la décision, la société TOIT ET JOIE indemnisera les demandeurs personnes physiques par le paiement à chacun d'une somme qu'il convient de fixer à 4.500 euros ;

[
]
Cette indemnisation s'entend exclusivement du préjudice de jouissance des locataires occasionné par les travaux, et ne fait pas obstacle à l'indemnisation, notamment par les assurances, des dommages matériels qui résulteraient des dégâts des eaux subis dans leur appartement ; Elle n'inclut pas non plus l'indemnisation des préjudices qui résulteraient de malfaçons non corrigées au terme des travaux, et qu'ils pourraient réclamer lorsque ces derniers seront achevés ;

Par ailleurs, certains demandeurs ont quitté la résidence de façon définitive en cours de procédure et doivent donc faire l'objet d'une indemnisation spécifique ;

Madame S... XY... a déménagé le 4 janvier 2014 alors qu'elle vivait dans la résidence depuis trente ans, pour un nouveau logement situé à FRESNES et loué à la société EFIDIS, dont le loyer est du double du loyer dont elle s'acquittait [...] ; En l'absence d'élément permettant d'établir avec certitude que ce déménagement ait eu pour cause exclusive les désordres occasionnés par les travaux, il convient de fixer l'indemnisation du trouble de jouissance qu'elle a subi jusqu'à son déménagement à la somme de 2.500 euros ;

Madame RA... FF... JM... épouse FZ... a été relogée le 13 janvier 2014 au sein d'un immeuble de la société TOIT ET JOIE situé à [...] ) et justifie devoir payer un loyer supérieur d'environ 130 euros mensuels, charges comprises ; Comme pour Madame S... XY..., il convient de fixer l'indemnisation du trouble de jouissance qu'elle a subi jusqu'à son déménagement à la somme de 2.500 euros ;

Madame YC... ML..., retraitée, a également reçu une offre de relogement de la société TOIT ET JOIE qu'elle a acceptée, et a déménagé en novembre 2013 à BAGNEUX (92), moyennant une légère hausse de loyer de l'ordre de 35 euros par mois ; Elle a produit des justificatifs des frais de déménagement restés à sa charge ainsi que de travaux qu'elle a engagés dans le nouveau logement ; Si les travaux d'embellissement du nouveau logement n'ont pas à être pris en charge par la SA TOIT ET JOIE, l'installation de vidanges pour le lave-vaisselle et le lave-linge, les frais de montage de meuble et de déménagement doivent en revanche l'être, au moins en partie ;

Il convient en conséquence de fixer l'indemnisation du préjudice de Madame YC... ML... à la somme de 3.500 euros ;

Monsieur IM... MY... UF... et sa compagne, dont l'enfant est né en [...] , indiquent ne pas avoir eu de suite favorable de la part de la société TOIT ET JOIE à leur demande de relogement formée en novembre 2013 ; Monsieur IM... MY... UF... expose, sans toutefois en justifier, avoir obtenu un nouveau logement via son employeur, moyennant un loyer nettement plus élevé que celui qu'il payait au sein de la résidence TOIT ET JOIE ; Monsieur IM... UF... soutient ne pas avoir obtenu de dédommagement de la société TOIT ET JOIE pour les frais du déménagement (dont il ne précise pas le montant), intervenu le 13 juin 2014 ; Il convient de fixer l'indemnisation du trouble de jouissance qu'il a subi jusqu'à cette date à la somme de 3.000 euros» ;

ALORS QUE les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour elle ni perte, ni profit, de sorte que la réparation du préjudice ne saurait être forfaitaire ; qu'en allouant néanmoins aux locataires résidant toujours dans l'immeuble une indemnisation identique de leurs troubles de jouissance résultant des travaux, sans analyser le préjudice individuellement subi par chacun d'entre eux en fonction des circonstances concrètes propres à leur situation personnelle, la cour d'appel, qui a procédé à une indemnisation forfaitaire de leur préjudice, a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Toit et joie de sa demande tendant à voir constater qu'elle avait régulièrement opéré le règlement des sommes dues à titre de dommages-intérêts aux locataires par compensation avec les dettes locatives de ceux-ci ;

AUX MOTIFS QUE

«Sur les modalités de règlement des dommages et intérêts

Considérant que I'UCLCV et les locataires contestent les modalités de règlement des indemnités, s'opposant à la compensation sollicitée par la société TOIT ET JOIE avec les dettes de loyers et mettant en exergue le non-paiement de dommages et intérêts dus à certains des locataires ;

Considérant que les pièces produites montrent que certains locataires n'ont pu obtenir l'intégralité des sommes du fait de la compensation imposée par le bailleur depuis le mois d'avril 2015 en raison du solde débiteur de leur compte locataire ;

Qu'il sera rappelé que la société TOIT ET JOIE n'a pas obtenu devant le premier juge le bénéfice de la compensation judiciaire entre ses dettes indemnitaires et ses créances de loyers ;

Qu'il apparaît que, contrairement à ce qu'avance la société TOIT ET JOIE, la compensation qu'elle a imposée aux locataires entre sa dette indemnitaire et le loyer, loin de simplifier la gestion de leurs comptes a rendu difficilement lisibles, même parfois erronés, les avis d'échéance adressés par le bailleur aux locataires ;

Que la cour rejettera donc la demande de la société TOIT ET JOIE tendant à voir ordonner la compensation judiciaire en appel ;

Qu'enfin, si les intimés font état de cas particuliers de locataires qui ont quitté l'immeuble sans avoir reçu l'intégralité de leur indemnité due par la société TOIT ET JOIE, ils n'en tirent aucune conséquence de droit dans le cadre de leurs prétentions devant la cour» ;

ALORS QUE la compensation de dettes réciproques, fongibles, liquides et exigibles, s'opère de plein droit ; qu'en se bornant à affirmer, pour débouter la société Toit et joie de sa demande tendant à voir juger qu'elle avait régulièrement opéré le règlement des sommes dues à titre de dommages-intérêts aux locataires en exécution du jugement de première instance par compensation avec les dettes locatives de ceux-ci, qu'elle n'avait pas obtenu devant le premier juge le bénéfice de la compensation judiciaire entre ses dettes indemnitaires et ses créances de loyers, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si le paiement invoqué par la société Toit et joie ne s'était pas réalisé par l'effet de la compensation légale entre les dettes réciproques des parties, qui étaient fongibles, liquides et exigibles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1347 et 1347-1 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Toit et joie de sa demande tendant à être judiciairement autorisée à régler les sommes dues à titre de dommages-intérêts aux locataires par compensation avec les dettes locatives de ceux-ci ;

AUX MOTIFS QUE

«Sur les modalités de règlement des dommages et intérêts

Considérant que I'UCLCV et les locataires contestent les modalités de règlement des indemnités, s'opposant à la compensation sollicitée par la société TOIT ET JOIE avec les dettes de loyers et mettant en exergue le non-paiement de dommages et intérêts dus à certains des locataires ;

Considérant que les pièces produites montrent que certains locataires n'ont pu obtenir l'intégralité des sommes du fait de la compensation imposée par le bailleur depuis le mois d'avril 2015 en raison du solde débiteur de leur compte locataire ;

Qu'il sera rappelé que la société TOIT ET JOIE n'a pas obtenu devant le premier juge le bénéfice de la compensation judiciaire entre ses dettes indemnitaires et ses créances de loyers ;

Qu'il apparaît que, contrairement à ce qu'avance la société TOIT ET JOIE, la compensation qu'elle a imposée aux locataires entre sa dette indemnitaire et le loyer, loin de simplifier la gestion de leurs comptes a rendu difficilement lisibles, même parfois erronés, les avis d'échéance adressés par le bailleur aux locataires ;

Que la cour rejettera donc la demande de la société TOIT ET JOIE tendant à voir ordonner la compensation judiciaire en appel ;

Qu'enfin, si les intimés font état de cas particuliers de locataires qui ont quitté l'immeuble sans avoir reçu l'intégralité de leur indemnité due par la société TOIT ET JOIE, ils n'en tirent aucune conséquence de droit dans le cadre de leurs prétentions devant la cour» ;

ALORS QU'une compensation judiciaire peut intervenir entre deux dettes qui ne remplissent pas les conditions de la compensation légale, dès lors que celles-ci sont connexes ; qu'en se bornant à affirmer, pour débouter la société Toit et joie de sa demande tendant à être judiciairement autorisée à régler les sommes dues à titre de dommages-intérêts aux locataires par compensation avec les dettes locatives de ceux-ci, que la compensation que la société Toit et joie aurait imposé à ses locataires entre sa dette indemnitaire et le loyer, loin de simplifier la gestion de leurs comptes, a rendu difficilement lisibles, même parfois erronés, les avis d'échéance adressés par le bailleur aux locataires, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs étrangers à la question de la connexité des créances réciproques des parties, et par là même inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1348 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la société Toit et joie de son appel en garantie formé contre la société Brezillon ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

«Sur les fautes imputables à la société BREZILLON dans l'exécution de son marché de travaux :

Considérant que la société TOIT ET JOIE invoque à l'encontre de la société BREZILLON des retards inhérents à son organisation, des malfaçons, des difficultés de réglage des installations de chauffage et une mauvaise gestion du chantier qui auraient généré des nuisances pour les locataires restés sur site ;

Mais considérant qu'il résulte des éléments de l'instance que la société BREZILLON a pris en charge des travaux supplémentaires indispensables, non prévus à son marché de base d'un montant de 6.761.976,64 euros hors taxe, en acceptant un avenant proposé par le maître d'ouvrage le 27 juin 2014 ;

Que ces travaux supplémentaires - d'un montant global de 1.596.214,30 euros hors taxe, soit plus de 23 % du montant du marché initial de la société BREZILLON – concernaient l'embellissement dans salles de bains, OS n° 2 du 26 mars 2013, la création de colonnes montantes ERD, OS n° 13 du 17 octobre 2014, la mise en place d'une membrane d'étanchéité au R+13, OS n° 14 du 7 novembre 2014, et la modification du contrôle d'accès, OS n° 16 du 19 novembre 2014 ;

Qu'il ne s'agissait donc pas de simples travaux d'ajustement ;

Que le projet initial a dû être modifié et complété de façon conséquente du fait d'une insuffisance de prévision ;

Qu'ainsi, l'OS n° 19 prévoyait une modification des colonnes sèches en janvier 2015, soit plus de 12 mois après la fin du délai contractuel initial ;

Que de tels travaux supplémentaires ont nécessairement induit un allongement du délai déjà recalé par l'avenant n° 1 du 27 juin 2014 ;

Et considérant que la société SEE SIMEONI, au regard de l'exécution de son lot retardé par les choix opérés par l'architecte et le maître de l'ouvrage, a exercé une influence sur l'allongement des délais, l'avancement de ses travaux - notamment sur les façades et l'incorporation des loggias - conditionnant ceux du macro lot A confié à la société BREZILLON ;

Qu'ainsi, si les locataires estiment avoir subi un préjudice consécutif au délai du chantier constaté dès novembre 2013, il ne peut être davantage imputé à la société BREZILLON ;

Considérant que le chauffage a toujours fonctionné depuis octobre 2013, malgré les incidents limités survenus au premier trimestre 2013 et pour lesquels le réseau de chauffage urbain était concerné ;

Considérant, par ailleurs, que si la société TOIT ET JOIE invoque la présence de nombreuses malfaçons, aucun constat contradictoire ne permet d'en révéler la matérialité ni leurs conséquences préjudiciables pour les locataires ;

Considérant encore qu'il n'est pas démontré que les désagréments allégués par les locataires seraient nés de l'exécution des travaux mais plutôt du fait qu'ils ont été exécutés en site occupé par suite de la décision du maître d'ouvrage ;

Qu'il en a été ainsi des nuisances liées aux poussières et aux bruits, provoquées par la démolition au marteau-piqueur et la nécessité d'évacuer les gravats des séchoirs en béton armé, situés en terrasses des immeubles, pour certaines au 13ème étage ;

Considérant enfin que les pièces du marché ne stipulent aucun transfert de responsabilité à l'entreprise BREZILLON du seul fait des dommages éventuels qui découleraient des travaux exécutés en milieu occupé et qu'aucune faute n'apparaît établie à son encontre dans l'exécution de son lot ;

Que la société BREZILLON ne saurait en conséquence être tenue des condamnations infligées à la société TOIT ET JOIE au titre des préjudices subis par ses locataires, quelle que soit la période considérée ;

Que la prétention de la société TOIT ET JOIE sera rejetée et le jugement déféré confirmé de ce chef» ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE

«Sur l'appel en garantie formé par la société TOIT ET JOIE à l'encontre des sociétés BREZZILLON et SEE-SIMEONI et des compagnies d'assurance COVEA RISKS et AREAS

La simple mention dans les contrats des entreprises BREZILON et SEE-SIMEONI du fait que les travaux se dérouleraient en site occupé n'a pas transféré sur elles les obligations dues par le bailleur à ses locataires ;

Dans la mesure où la condamnation intervenue dans le cadre de la présente décision sanctionne les manquements du bailleur à son obligation propre d'assurer à ses locataires la jouissance paisible de leur logement, elle ne résulte pas directement de fautes qui seraient imputables à la conduite des travaux, ou de la survenance d'un événement incertain et aléatoire susceptible d'être couvert par une assurance ;

En conséquence, pour obtenir des entreprises chargées des travaux une indemnisation de son propre préjudice, susceptible de résulter de la prolongation de la durée du chantier (incluant la perte financière résultant de la nécessité de maintenir à ses locataires un loyer réduit jusqu'au parfait achèvement des travaux), des problèmes d'infiltration ou des éventuelles malfaçons dans la qualité des ouvrages réalisés, la société TOIT ET JOIE doit démontrer l'existence d'une faute des entreprises et d'un lien de causalité entre cette faute et son préjudice ;

En l'état, la société TOIT ET JOIE se contente d'affirmer sans le démontrer que la société BREZILLON a manqué de vigilance pour avoir insuffisamment protégé les ouvrages des précipitations, qu'elle a manqué à son obligation d'exécution relative à la qualité des ouvrages, et qu'elle est à l'origine des difficultés de réglage des installations de chauffage ; [
]

En conclusion, l'appel en garantie global, destiné à couvrir intégralement la société TOIT ET JOIE de la présente condamnation sanctionnant le non-respect de ses obligations de bailleur, n'est pas fondé et doit être rejeté ; En l'état, la société TOIT ET JOIE ne démontre pas davantage l'existence de fautes contractuelles imputables aux entreprises de travaux et susceptibles d'entraîner une indemnisation ou la survenance d'un risque entrant dans le champ d'intervention des assureurs qu'elle a mis en cause» ;

1°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut au défaut de motifs ; qu'en affirmant, pour débouter la société Toit et joie de son appel en garantie contre la société Brezillon, qu'aucun constat contradictoire ne permettait de révéler la matérialité des malfaçons invoquées par la société Toit et joie, ni leurs conséquences préjudiciables pour les locataires, après avoir pourtant retenu l'existence de malfaçons en relation avec le préjudice de jouissance des locataires qu'elle a condamné la société Toit et joie à réparer, tels que les tuyaux de chauffage condamnant un placard, l'absence de finition ou de raccord au niveau des murs et des sols, ainsi que la chute répétée de la porte de douche, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en affirmant, pour débouter la société Toit et joie de son appel en garantie contre la société Brezillon, qu'il n'était pas démontré que les désagréments allégués par les locataires seraient nés de l'exécution des travaux, et qu'ils résultaient plutôt du fait d'avoir été exécutés en site occupé par suite de la décision du maître d'ouvrage, après avoir pourtant relevé l'existence d'un certain nombre de malfaçons, ainsi que d'infiltrations d'eau dans les appartements en raison de l'insuffisance de l'isolation de la toiture au moment des fortes intempéries de juin et juillet 2013, de la dégradation de canalisations provoquée par la chute de gravats à l'intérieur des gaines et de fuites survenues au moment de la mise en eau du circuit de chauffage, lesquelles résultaient bien de la mauvaise exécution des travaux de la société Brezillon et non de la seule circonstance que les travaux avaient été réalisés en site occupé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;


3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'un constat, même non contradictoirement dressé, vaut à titre de preuve dès lors qu'il est soumis à la libre discussion des parties ; qu'en retenant que si la société Toit et Joie invoque la présence de nombreuses malfaçons, aucun constat contradictoire ne permet d'en révéler la matérialité ni leurs conséquences préjudiciables pour les locataires, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen de la société Toit et joie tiré de ce que la société Brezillon avait manqué à ses obligations contractuelles de prendre des mesures particulières tant dans l'exécution des travaux se déroulant en site occupé, que dans l'organisation de ceux-ci, afin de minimiser les nuisances supportées par les locataires (conclusions d'appel de la société Toit et Joie, notamment pp. 52-53, 57 à 62), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; qu'en l'espèce, la société Toit et joie faisait valoir que la société Brézillon avait manqué à ses obligations contractuelles de prendre des mesures particulières tant dans l'exécution des travaux se déroulant en site occupé, que dans l'organisation de ceux-ci, afin de minimiser les nuisances supportées par les locataires ; qu'en se bornant à affirmer, sans autre explication, qu'aucune faute n'apparaissait établie à l'encontre de la société Brézillon dans l'exécution de son lot, la cour d'appel, qui a statué par un motif d'ordre général et abstrait, a violé l'article 455 du code de procédure civile.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la société Toit et joie de son appel en garantie contre les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles venant aux droits de la société Covea risks ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

«L'appel en garantie de la société TOIT ET JOIE à l'encontre de son assureur COVEA RISKS SA, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMA IARD SA et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES :

[
]

Sur la garantie des sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles :

Considérant que la société TOIT ET JOIE se prévaut de ce qu'elle a souscrit auprès d'un assureur unique : COVEA RISKS, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, deux contrats d'assurance : une police RC N° 112783564 et un accord-cadre police de chantier N° 120149742 à effet du 1 octobre 2012 pour le chantier Fresnes ;

Qu'elle appelle les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, venant aux droits de COVEA RISK à la couvrir au titre de l'ensemble des garanties souscrites ;

Mais considérant que la société TOIT ET JOIE a souscrit deux contrats :

- une police RC n° 112783564 couvrant : ?toutes missions administratives, juridiques, financières, comptables, fiscales, informatiques, commerciales et techniques, pour l'étude, le montage et la réalisation d'opérations d'aménagement, de lotissement, et de construction, de restauration et de réhabilitation... ‘' et à ce titre ?la maîtrise d'ouvrage dans toutes ces phases'‘ - ce contrat garantissant la responsabilité civile au titre de diverses activités, telles que les opérations d'aménagement, de lotissement, de construction et au titre de la maîtrise d'ouvrage, dans toutes les phases énumérées ;

- un contrat cadre police de chantier n° 120149742 à effet du 1er octobre 2012 applicable au chantier concerné comportant :

Un volet dommages-ouvrage (D.O.) pour l'ensemble des désordres de la nature de ceux visés à l'article 1792 du Code civil ;

Un volet Tous Risques Chantier (TRC) pour l'ensemble des désordres couverts par ce type de garantie en cours de chantier ;

Un volet Responsabilité civile décennale (RCD) bénéficiant à la société TOIT ET JOIE en sa qualité de constructeur ;

Un volet Responsabilité civile (RC) Maître d'ouvrage pour l'ensemble des dommages matériels et immatériels causés aux tiers ;

Mais considérant que la police en son volet ‘'Tous Risques Chantier'‘, qui a vocation à couvrir les seuls dommages subis accidentellement par les ouvrages en cours de chantier, n'a pas à s'appliquer ici ;

Qu'en effet, les troubles subis par les locataires, du fait des prestations réalisées par les constructeurs et des incidents de chantier caractérisés par le bruit, le dysfonctionnement de chauffage, la poussière ou les fuites d'eau, ne peuvent être couverts par cette police ;

Considérant que le volet de garantie ?dommages-ouvrage? a pour unique objet le préfinancement des travaux de réparation des désordres couverts par la garantie décennale obligatoire et non les dommages de la nature alléguée par les locataires ;

Qu'en tout état de cause, les dommages immatériels ne sont pas garantis avant réception des travaux, mais uniquement après, qu'il s'agisse du contrat ‘'dommages-ouvrage'‘ (article 10-C-1 des conventions spéciales 811) ou du contrat ‘'TRC'‘ (articles 3 et 5-13 des conditions spéciales 884) ;

Considérant, pour ce qui a trait aux garanties de la police : ‘'RC'‘, qu'elles doivent porter sur un évènement revêtant un caractère accidentel et aléatoire ;

Qu'en effet, ladite police stipule notamment (exclusions n° 1et 11 de l'article 12 ‘'EXCLUSIONS'‘ - pages 16 et 17 de la police) :

‘'12. EXCLUSIONS

Seul est formellement exclu :

1. de l'ensemble des garanties...

I. les dommages causés intentionnellement par les représentants légaux de l'assuré ;

II. Les dommages qui n'ont pas de caractère aléatoire parce qu'ils résultent de façon prévisible et inéluctable, pour un professionnel normalement compétent dans les activités assurées, de la conception des travaux ou de leurs modalités d ‘exécution telles qu'elles ont été arrêtées ou acceptées par vous (ou par la direction de l'entreprise lorsqu'il s'agit d'une personne morale)'‘ ;

Que cette clause d'exclusion vise les dommages ‘'qui n'ont pas un caractère aléatoire'‘ dont elle donne la définition : ‘'parce qu'ils résultent de façon prévisible et inéluctable? et a pour objet la ‘'conception des travaux'‘ ou ‘'leurs modalités d'exécution telles qu'elles ont été arrêtées ou acceptées par vous'‘ et un professionnel'‘ normalement compétent dans les activités assurées'‘ ;

Qu'appliquée à l'espèce, cette clause claire, précise et limitée concerne ici la société TOIT ET JOIE, maître de l'ouvrage et bailleur social professionnel ‘'normalement compétent'‘ pour la gestion des immeubles et les travaux de réhabilitation devant être réalisés sur une partie de son parc ;
Que tout autant, elle vise une ‘'conception'‘ des travaux de réhabilitation lourde ou bien ‘'leurs modalités d'exécution arrêtées ou acceptées'‘ en site occupé, voulues par la société TOIT ET JOIE maître de l'ouvrage ;

Qu'enfin, elle s'applique à des travaux qui par nature étaient susceptibles de produire de façon ?prévisible et inéluctable? des troubles de jouissance, leurs conditions d'exécution, dans un immeuble occupé par ses locataires, induisant nécessairement un impact dommageable sur ces derniers demeurés sur le site ;

Et considérant que, comme il a été souligné plus haut par la cour, le préjudice subi par les locataires résulte essentiellement du choix délibéré de la société TOIT ET JOIE d'engager un programme de travaux de réhabilitation particulièrement lourd et long en milieu occupé ;

Qu'ainsi, le maître de l'ouvrage TOIT ET JOIE a accepté en connaissance de cause ?la conception des travaux et leurs modalités d'exécution? en site occupé avec le risque mesuré mais prévisible de porter atteinte à la jouissance paisible des lieux mis à bail ;

Considérant, en conséquence, que c'est à bon droit que le premier juge a pu estimer que l'obligation, sanctionnée par la condamnation prononcée, d'assurer à ses locataires la jouissance paisible de leur logement ‘'ne résultait pas de la survenance d'un évènement incertain et aléatoire susceptible d'être couvert pas une assurance'‘ d'autant qu'il s'agit ici d'un cas d'exclusion clairement prévue par la police d'assurance souscrite auprès de COVEA RISKS ;

Que la cour ne pourra que confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté la société TOIT ET JOIE de ses demandes formées à l'encontre de MMA IARD SA et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de COVEA RISKS SA» ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE

«Sur l'appel en garantie formé par la société TOIT ET JOIE à l'encontre des sociétés BREZILLON et SEE-SIMEONI et des compagnies d'assurance COVEA RISKS et AREAS

La simple mention dans les contrats des entreprises BREZILON et SEE-SIMEONI du fait que les travaux se dérouleraient en site occupé n'a pas transféré sur elles les obligations dues par le bailleur à ses locataires ;

Dans la mesure où la condamnation intervenue dans le cadre de la présente décision sanctionne les manquements du bailleur à son obligation propre d'assurer à ses locataires la jouissance paisible de leur logement, elle ne résulte pas directement de fautes qui seraient imputables à la conduite des travaux, ou de la survenance d'un événement incertain et aléatoire susceptible d'être couvert par une assurance ;

[
]

S'agissant des assureurs, la société TOIT ET JOIE ne précise pas sur quel élément de la police d'assurance et en réparation de quel préjudice ils seraient susceptibles d'intervenir ; Il n'appartient pas au tribunal d'aller piocher dans les polices d'assurance produites pour déterminer le champ d'intervention des assureurs ou le montant de l'indemnisation éventuellement due par ces derniers à la propriétaire de l'immeuble ;

En conclusion, l'appel en garantie global, destiné à couvrir intégralement la société TOIT ET JOIE de la présente condamnation sanctionnant le non-respect de ses obligations de bailleur, n'est pas fondé et doit être rejeté ; En l'état, la société TOIT ET JOIE ne démontre pas davantage l'existence de fautes contractuelles imputables aux entreprises de travaux et susceptibles d'entraîner une indemnisation ou la survenance d'un risque entrant dans le champ d'intervention des assureurs qu'elle a mis en cause» ;

ALORS QUE les clauses des polices d'assurance édictant des exclusions de garantie ne sont valables que si elles sont formelles et limitées ; que ne sont ni formelles, ni limitées, les clauses d'exclusion de garantie qui, se référant à des critères imprécis et à des hypothèses non limitativement énumérées, ne permettent pas à l'assuré de connaître exactement l'étendue de la garantie ; qu'en retenant que la clause figurant à l'article 12 de la police d'assurance de responsabilité civile n° 112783564 souscrite par la société Toit et joie auprès de la société Covea risks, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, excluant la garantie pour les «dommages qui n'ont pas de caractère aléatoire parce qu'ils résultent de façon prévisible et inéluctable, pour un professionnel normalement compétent dans les activités assurées, de la conception des travaux ou de leurs modalités d'exécution telles qu'elles ont été arrêtées ou acceptées par vous (ou par la direction de l'entreprise lorsqu'il s'agit d'une personne morale)», était claire, précise et limitée, cependant que cette clause, rédigée de façon très générale, sans référence à aucun fait, circonstances ou obligations définis avec précision, ni à des hypothèses limitativement énumérées, ne permettait pas à l'assuré de connaître exactement l'étendue de la garantie, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du code des assurances. Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles (demanderesses au pourvoi incident éventuel).

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, D'AVOIR condamné la société Toit et joie à payer à Mme Mme N... I..., M. Q... V..., Mme LH... UV... H..., M. A... J..., M. M... T..., Mme O... Y... épouse T..., Mme S... F..., Mme R... E... épouse K..., M. P... U..., Mme O... B..., Mme N... G..., M. D... W..., Mme L... AO..., M. WE... KH... , Mme FN... QG... épouse WC..., M. BF... WC..., Mme BP... OG..., M. KU... MH..., Mme DO... MH..., Mme OG... OC..., M. LG... EH..., Mme L... VK..., M. UD... E..., Mme O... AY..., Mme EB... VQ... veuve JO..., Mme MU... QF..., Mme OK... HN..., Mme WL... HN..., Mme OG... BC..., Mme OG... RH..., Mme UV... CC..., M. RT... EM..., Mme LH... VY..., Mme LH... H..., M. YG... JX..., Mme CC... YQ... épouse JX..., Mme GJ... B... épouse QN..., Mme EE... LS... épouse UC..., Mme XG... XU..., Mme VD... JI..., Mme MW... JT..., Mme SF... AA... épouse CR..., M. JW... CR..., Mme VU... RK..., Mme KB... VE..., Mme QV... IL... WY..., Mme BG... YS..., Mme XG... XA..., Mme BT... XC... , M. M... QW... , M. SC... ME..., Mme SF... AW..., Mme KC... BW... épouse YI..., M. IC... QT..., Mme UP... IF..., M. KP... PZ..., Mme UV... FR... épouse KL..., M. KP... NT... KL..., Mme TD... WC..., M. RG... TK... NT..., Mme ET... GL..., Mme BR... IP..., M. AP... IP..., Mme AC... NL... PI... , M. BF... VH..., Mme FK... VF..., Mme YU... OM..., M. M... RB..., Mme WA... XV..., Mme WD... BN... LW..., Mme WA... BA..., Mme OG... OT..., M. DM... S... OT..., Mme ES... JW... épouse GQ..., M. IM... GQ..., Mme UY... DQ..., Mme SB... HQ..., M. TM... TO..., Mme AX... BO..., M. UL... YB..., Mme GG... SQ..., Mme DH... J..., M. VV... UC..., M. NG... VE..., Mme YH... SX... épouse ME... et Mme SF... QS..., chacun, la somme de 4 500 euros à titre de dommages-intérêts, puis d'avoir ordonné la réduction à hauteur de 50 %, à compter du 15 janvier 2015 et jusqu'au 3 mai 2016 ou, le cas échéant jusqu'à leur déménagement définitif survenu avant cette date, du prix des loyers hors provisions pour charges dus à la société Toit et joie par les locataires susvisés encore présents dans l'immeuble ;

AUX MOTIFS QUE, sur le contexte du chantier et des dommages subis ayant conduit au litige, comme l'a relaté le premier juge, qu'il est établi et non contesté que la société TOIT ET JOIE est propriétaire de l'immeuble situé [...] , résidence de 251 logements en duplex construite en 1962 qu'elle a mis à bail ; qu'à la suite de l'apparition de diverses pathologies : les colonnes montantes altérées, fuites fréquentes et obsolescence générale, un besoin d'amélioration de la sécurité, de restructuration et d'adaptation des logements actuels à la vie des résidents (logements en duplex ne correspondant pas à des familles composées d'enfants en bas âge et aux personnes âgées) - un important programme de réhabilitation a été envisagé par la société TOIT ET JOIE ; qu'il consistait à :
- rénover les parties communes,
- réhabiliter tous les logements, notamment en changeant les appareils sanitaires et en procédant à une nouvelle distribution de chauffage,
- améliorer l'isolation de la façade par un remplacement des panneaux,
- réaménager les espaces extérieurs,
- réduire les risques de propagation d'un incendie (par encloisonnement des escaliers et traitement des planchers....) ;
Qu'il était prévu, de surcroît :
- la création de 8 logements en terrasse, à la place des séchoirs,
- la suppression de quelques logements en duplex pour les rendre adaptés aux personnes à mobilité réduite,
- l'accroissement de la surface de près de 220 logements par incorporation des loggias ;
qu'il a, ainsi, été décidé d'engager des travaux de réhabilitation de grande envergure touchant à la fois : les espaces extérieurs de l'immeuble (espaces paysagers, parkings), les parties communes (halls d'entrée, ascenseurs, escaliers, toiture avec la construction de logements en terrasse) et les appartements (façades et huisseries extérieures, plomberie incluant le système de chauffage, électricité, salle de bain, porte palière) ; que le choix a été fait par le bailleur d'effectuer les travaux en site occupé ; que seuls ont été relogés, avant le début des travaux, les occupants de certains logements dont la destination devait être entièrement modifiée en raison de la division de logements duplex en deux appartements ; que la durée du chantier était initialement estimée à dix-huit mois ; que les documents produits par la société TOIT ET JOIE ont permis de retracer approximativement le déroulement des travaux :
- le choix des entreprises était annoncé en juin 2012 par le bailleur, lequel indiquait qu'une campagne de visite des logements se déroulerait pendant l'été,
- l'entrée de la résidence située [...] était neutralisée en août pour être réservée au passage des véhicules de chantier,
- le déménagement des caves était exigé pour le 6 août 2012 afin que les travaux puissent y commencer,
- les arbres du parking étaient abattus du 3 au 7 septembre 2012,
- le 4 octobre 2012, lors d'une réunion d'information publique, un calendrier de travaux était présenté aux locataires, il en ressortait, pour l'essentiel :
un achèvement annoncé en novembre 2013, la phase préparatoire étant incluse dans les 18 mois prévus, les travaux touchant l'intérieur des appartements (hors chauffage) devaient débuter par tranches en octobre 2012, et s'étaler pour les deux ailes de la résidence sur six mois (jusqu'en mars 2013), les travaux de façade devaient s'échelonner de janvier à novembre 2013, le remplacement du système de chauffage devait être effectué de mai à octobre 2013, la page intitulée : "Zoom sur les travaux dans votre logement", permettait aux locataires de comprendre que l'ensemble des interventions au sein de leur logement (gaines, plomberie, électricité, menuiseries extérieures, porte palière, chauffage et finitions) seraient effectuées par tranches et totaliseraient 15 jours d'intervention (4 jours + 1 jour + 8 jours +7 jour + 7 jour), le bailleur avait également annoncé qu'un avis de travaux serait adressé aux locataires deux semaines à l'avance, il était demandé aux locataires, selon les différentes interventions à réaliser, de débarrasser les balcons et libérer une bande d'un mètre linéaire autour de la fenêtre, de faciliter l'accès aux prises électriques de la cuisine, de vider les meubles d'évier, de faciliter l'accès à la salle de bain, de dégager l'accès aux colonnes d'eau au niveau du séjour et des chambres ; que, parallèlement selon la lettre d'information de novembre 2012, les travaux de démolition des parties communes et des studios étaient déjà en cours, la démolition des séchoirs venant de débuter, avec une durée d'intervention prévue jusqu'en janvier 2013 ; que le bailleur alertait les locataires se trouvant dans les étages supérieurs ; que ce que le bruit allait être important ; que la fin des travaux de démolition en toiture a été ultérieurement annoncée pour la mi-mars 2013 ; que, dès le mois de novembre, les locataires se sont plaints des travaux en cours dans leur appartement, suite à des demandes relatives au déroulement des travaux et aux finitions une visite des logements leur ayant été proposée les 4 et 7 décembre2012, la permanence sociale se tenant les mêmes jours, puis à nouveau les 9 et 11 janvier2013 ; qu'en mars 2013, une benne était mise à disposition des locataires pour débarrasser les objets se trouvant sur leurs balcons, impliquant que les travaux de façade, qui devaient débuter en janvier 2013, n'avaient pas encore commencé ; qu'en avril 2013, la neutralisation des ascenseurs centraux était annoncée par la société TOIT ET JOIE pour cinq mois, puis de nouveau annoncée pour une durée prévisible de quatre mois en août 2013, laissant ainsi, à disposition des locataires, les deux ascenseurs latéraux à partager avec les entreprises intervenant sur le chantier - une lettre d'information du bailleur relatant une panne des ascenseurs B et C en juillet 2013 ; que le 19 juin 2013, il était procédé au retrait de l'antenne de toit, les locataires ayant été informés de ce que cela entraînerait des nuisances sonores importantes ; qu'en juin et juillet 2013 - selon le compte rendu établi pour le conseil d'administration de la société TOIT ET JOIE du 29 octobre 2013 - d'importantes précipitations provoquaient des infiltrations d'eau par la toiture, occasionnant des dégâts des eaux dans une quarantaine de logements des étages supérieurs ; qu'un incendie s'est manifesté au niveau des caves le 18 juillet 2013 ; qu'en juillet 2013, les malfaçons reprochées par la société TOIT ET JOIE à la société SEE SIMEONI sur les travaux de façade et les huisseries extérieures ont entraîné leur suspension - l'annonce de l'arrêt de ces travaux ayant été portée à la connaissance des locataires le 25 octobre 2013 ; que la société TOIT ET JOIE indiquait, à cette date, avoir fait procéder au calfeutrement provisoire des huisseries mal posées, que les travaux intérieurs des logements avaient été réalisés à 95 % et le remplacement des portes palières à 60 %, que restaient les peintures, finitions, et la résolution des difficultés liées aux travaux de façade et des menuiseries extérieures, que les travaux de gros oeuvre et de plomberie étaient achevés dans les parties communes, que l'état d'avancement des aménagements extérieurs était estimé à 20 % et qu'en moyenne, plus d'un an après leur démarrage effectif, l'état d'avancement des travaux était de Tordre de 50 % ; que les locataires ont été invités à faire connaître leur éventuel souhait d'être relogés en novembre2013 ; qu'il résulte enfin d'une lettre, adressée au maire de FRESNES, le 14 février 2014, par la société TOIT ET JOIE, que l'ascenseur neuf projeté n'était toujours pas installé, que les trous effectués dans les murs et sols des appartements pour faire passer les nouvelles canalisations de chauffage étaient en cours de rebouchage depuis décembre 2013 jusqu'à une date prévisible de mars 2014 ; qu'en septembre 2014, une nouvelle entreprise : la société BREZILLON, venait d'être choisie pour reprendre le chantier de la société SEE SIMEONI, la durée des travaux restant à effectuer étant alors estimée à 14 mois minimum ; que, s'agissant du chauffage de la résidence : dispositif collectif alimenté par le réseau de chauffage urbain, [...] il connaissait des vicissitudes avant le démarrage des travaux puisque d'après les documents de la société TOIT ET JOIE, en décembre 2011, une fuite avait privé les locataires de chauffage dans les salles de bain et qu'en février 2012, la chaufferie s'était avérée insuffisante compte tenu de températures extérieures particulièrement basses ; qu'après le début des travaux, en janvier 2013, le bailleur reconnaissait lui-même dans sa lettre d'information mensuelle qu'en cette période de froid intense, la chaleur des appartements n 'atteignait pas 19° Celsius, annonçait la hausse de fourniture de chauffage par la ville, la mise à disposition de convecteurs électriques par la société TOIT ET JOIE, le remboursement des provisions sur charge de décembre et janvier et la demande faite par ses soins aux entreprises de procéder au calfeutrement des parties communes ; qu'après qu'ait été réclamée aux locataires la restitution des convecteurs prêtés avant le 2 avril 2013, une panne a privé les logements de chauffage et d'eau chaude du 2 au 3 avril 2013 ; que le 15 octobre 2013, le système de chauffage qui avait été entièrement changé n'était toujours pas opérationnel : des convecteurs ayant été à nouveau proposés aux locataires, la mise en eau ayant été effectuée du 21 au 26 octobre 2013 en vue d'une mise fonction du chauffage le 26 octobre ; que le 30 octobre 2013, une panne du chauffage urbain a perturbé les opérations de purge en cours ; qu'une coupure est intervenue le 21 novembre entre 8h et 18h afin de permettre à l'entreprise BREZILLON d'effectuer des modifications sur la sous-station de chauffage ; que selon le bailleur, une panne affectant le chauffage urbain a mis l'installation hors service le 22 novembre 2013 ; qu'enfin, aux termes d'un courrier adressé au maire de FRESNES le 14 février 2014, la société TOIT ET JOIE reconnaissait que depuis qu'il avait été mis en marche fin octobre 2013, l'installation de chauffage avait été instable et que s'il avait été remédié aux dysfonctionnements fin décembre 2013, "l'apparition de nouvelles instabilités", non liées à des conditions climatiques particulières, avait été relevée depuis le début du mois de février 2014 ; [...]
que sur la nature et l'ampleur des nuisances alléguées par les locataires, ce rappel chronologique des faits litigieux a permis de mesurer l'ampleur des interventions engagées, le retard pris dans les travaux au regard de la durée initialement prévue, et l'importance des difficultés rencontrées sur le chantier ; qu'il corrobore les témoignages des locataires qui, s'ils restent subjectifs, donnent, par leur nombre (40 familles ont constitué un dossier individuel) et par la répétition des mêmes constats, une vision relativement précise des préjudices de jouissance, subis par les occupants des lieux, en lien avec l'exécution du chantier sous ses divers aspects ; que les photos des appartements et des parties communes, les enregistrements sonores et vidéo, les constats d'huissier produits et les courriers émanant du maire de FRESNES, venu dans la résidence en octobre 2013, sont autant d'éléments qui confortent l'état du chantier dans l'immeuble et ses nuisances au quotidien au sein des appartements le composant, s'agissant d'un site occupé ; que les quitus de travaux produits par la société TOIT ET JOIE ne justifient en rien de la bonne exécution des travaux dans les appartements visités par les huissiers ; qu'en effet, le quitus relatif au chauffage concerne le logement 230 et n'est pas signé par le locataire ; les autres quitus donnés portaient sur la pose d'une façade de gaine chez Madame EE... UC..., sur la pose d'une nouvelle porte palière chez Monsieur M... T... et sur les travaux de plomberie chez Madame XG... XA... - à savoir une partie seulement des interventions réalisées au sein des appartements ; qu'ainsi, [...] il ressort des témoignages et pièces des locataires l'existence de nuisances sonores provenant des marteaux piqueurs, scies à métaux et coups de masse lors des destructions des séchoirs, des studios, et de certaines parties communes ; que concernant ces bruits, tels que décrits dans le constat d'huissier de Maître SH... du 13 juin 2013, il est précisé qu'il est impossible de tenir une conversation, même en haussant la voix ; que la permanence de ces nuisances sur la durée des démolitions effectuées dans les parties communes et sur le toit de l'immeuble, depuis octobre 2012 jusqu'à mars 2013 au moins, explique la fatigue décrite par les locataires, résultant notamment de l'impossibilité pour les personnes ayant des horaires de travail décalés de se reposer en journée, et pour leurs enfants de faire leurs devoirs ou de préparer leurs examens ; que la poussière environnante dégagée par les travaux dans les parties communes, les façades et à l'intérieur des appartements, impliquant le percement des murs (notamment pour le chauffage) pendant plusieurs jours, qui par nature s'infiltrait dans tous les espaces, a nécessairement généré un désagrément important et quasiment continuel, dénoncé par tous ; que, de même, les infiltrations d'eau, reconnues par le bailleur, ont été décrites et photographiées par les locataires, dont certains ont produit le courrier de leur assureur suite à leur déclaration de sinistre ; que les dégâts des eaux ont eu au moins trois causes : les infiltrations par la toiture au moment des fortes intempéries de juin et juillet 2013, touchant surtout les appartements des étages élevés, la dégradation de canalisations en raison de chutes de gravats à l'intérieur des gaines et des fuites, survenues au moment de la mise en eau du circuit de chauffage ; qu'ainsi, le maire de FRESNES, dans sa lettre du 15 novembre 2013, a fait état des sinistres liés aux gros orages de juin 2013 et de l'absence de réparation rapide des dégâts ; que même indemnisés par leurs assureurs, les locataires ne pouvaient remettre leur logement en état tant que les travaux n'étaient pas terminés et alors que l'insuffisance de chauffage dans les logements, deux hivers de suite, n'a pu favoriser le séchage des murs ; que ces dégâts des eaux répétés ont eu une incidence forte sur la vie quotidienne des occupants : sensation de froid et d'inconfort, développement d'odeurs nauséabondes, désagrément esthétique, les infiltrations ayant notamment soulevé des parquets et certains locataires devant placer un seau au pied de leur lit ; que par ailleurs, le remplacement du système de chauffage a engendré des nuisances importantes pour les locataires : pose des nouveaux radiateurs avant la dépose des anciens, engendrant provisoirement une perte de place importante, maintien en place pendant plusieurs semaines d'anciennes canalisations coupées, percement de trous dans les planchers et murs ouvrant sur les appartements voisins, dont il est admis par la société TOIT ET JOIE qu'ils n'ont fait l'objet d'une campagne de rebouchage systématique qu'à compter de décembre 2013 et jusqu'en mars 2014 ; que la surface des logements a été durablement réduite, notamment en raison des travaux de façade, obligeant certains locataires à se débarrasser de meubles qui ne trouvaient plus place chez eux, à entasser leurs affaires et vivre dans un espace confiné et désorganisé ; que la suppression des balcons et l'indisponibilité des caves les a, en outre, privés de tout espace extérieur de stockage ; que cette réduction de leur espace de vie a été constatée par les huissiers de justice, intervenus aux mois de juin et juillet 2013, et par le maire de FRESNES, venu visiter des appartements de la résidence le 14 octobre 2013, son courrier du 16 octobre 2013 indiquant que la situation des fenêtres et façades, laissée en état depuis l'été, rendait l'espace inhabitable pour les occupants ; que les malfaçons, invoquées par les locataires, tels les tuyaux de chauffage condamnant un placard, l'absence de finition ou de raccord au niveau des murs et des sols ou encore la chute répétée de la porte de douche, participent du préjudice de jouissance qu'ils ont subi pendant les travaux ; que globalement, [...] le démarrage des travaux en même temps au niveau des extérieurs, des parties communes et des appartements a dégradé le cadre de vie des locataires de la résidence, tant au plan esthétique qu'au plan des modalités de circulation aux abords et au sein de la résidence et de leur intimité ; qu'ainsi l'arrêt de l'ascenseur central et l'obligation de partager les ascenseurs latéraux avec les ouvriers a souvent obligé les locataires, en raison de la sur-occupation des ascenseurs restants ou de leurs pannes récurrentes, à emprunter les escaliers dans un immeuble de 12 étages ; que ces conditions de vie ont inévitablement constitué un frein à la vie sociale des locataires qui, notamment, n'ont pas été en mesure de recevoir chez eux ; qu'enfin, la durée des travaux est venue aggraver le caractère anormal de l'ensemble des troubles de jouissance décrits : dix-huit mois initialement annoncés constituant déjà une durée exceptionnelle outre le retard pris dans leur exécution et l'absence de finition dans toutes les pièces des appartements ; que, comme l'a relevé le premier juge et selon l'appréciation des éléments portés à la connaissance de la cour, ces faits ont été corroborés par de nombreux témoignages de personnes extérieures à la résidence qui ont établi des attestations ;
que sur l'imputabilité des désordres, selon l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 applicable à l'espèce, "Le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation. Les caractéristiques correspondantes sont définies par décret en Conseil d'Etat pour les locaux à usage d'habitation principale (...)
Le bailleur est obligé :
a) De délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ; toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer ; cette clause prévoit la durée de cette imputation et, en cas de départ anticipé du locataire, les modalités de son dédommagement sur justification des dépenses effectuées ; une telle clause ne peut concerner que des logements répondant aux caractéristiques définies en application des premier et deuxième alinéas ;
b) D'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle hormis ceux qui, consignés dans l'état des lieux, auraient fait l'objet de la clause expresse mentionnée au a ci-dessus ;
c) D'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués ;
d) De ne pas s'opposer aux aménagements réalisés par le locataire, dès lors que ceux-ci ne constituent pas une transformation de la chose louée" ;
que tout autant l'article 7 de la même loi, oblige le locataire à "laisser exécuter dans les lieux loués les travaux d'amélioration des parties communes ou des parties privatives du même immeuble, les travaux nécessaires au maintien en état, à l'entretien normal des locaux loués, ainsi que les travaux d'amélioration de la performance énergétique à réaliser dans ces locaux ; les dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article 1724 du code civil sont applicables à ces travaux" ; qu'enfin, l'article 1724 du Code civil dispose : "si, durant le bail, la chose louée a besoin de réparations urgentes et qui ne puissent être différées jusqu'à sa fin, le preneur doit les souffrir, quelque incommodité qu'elles lui causent, et quoiqu'il soit privé, pendant qu'elles se font, d'une partie de la chose louée ; Mais, si ces réparations durent plus de quarante jours (devenu vingt et un jours en cours de chantier à la suite de la loi du 24 mars 2014), le prix du bail sera diminué à proportion du temps et de la partie de la chose louée dont il aura été privé ; Si les réparations sont de telle nature qu'elles rendent inhabitable ce qui est nécessaire au logement du preneur et de sa famille, celui-ci pourra faire résilier le bail" ;
qu'il résulte de l'application de ces textes, que la cour, comme l'a fait le premier juge, doit apprécier la nature et le contenu des troubles subis par les locataires en lien avec les travaux de grande ampleur réalisés, à l'initiative du propriétaire bailleur sur un immeuble, comportant un grand nombre de logements, et en site occupé ; que s'appuyant sur l'ensemble de ces éléments, les locataires de la résidence du [...] apparaissent fondés à invoquer des troubles de jouissance anormaux et d'une particulière intensité qui ont incontestablement perturbé, de façon permanente et continue, leur cadre de vie, leur confort et leur intimité pour le moins depuis le début du mois d'octobre 2012 jusqu'à l'achèvement des travaux ; que le programme de réhabilitation, même porté à leur connaissance, ne permettait pas aux occupants de comprendre ce qu'ils devraient endurer en termes de nuisances quotidiennes pendant la durée du chantier ; que le document intitulé "Accord collectif du 5 juillet 2011 - qui présente sur deux pages la liste des réalisations en projet sur le bâti, les équipements et les espaces extérieurs, sans précision quant à la nature des travaux, leurs modalités d'exécution et leurs effets dommageables éventuels pendant des mois - ne saurait exonérer le bailleur, alors que l'adhésion des locataires, pendant les vacances d'été, n'est pas formellement établie et qu'en tout état de cause, celle-ci ne pouvait constituer un engagement juridique de leur part ; que les troubles du sommeil ou les états dépressifs, imputés par les demandeurs à l'importance du bruit ou du stress subi quotidiennement du fait des travaux, font nécessairement partie intégrante du trouble de jouissance invoqué par l'ensemble des locataires demeurés sur place ; qu'il appartient donc au bailleur, sur qui pèse une obligation de résultat de délivrance et de jouissance paisible des lieux loués, d'assumer sa responsabilité et d'indemniser le préjudice réel et certain, personnellement subi par les locataires présents sur le site depuis le début du mois d'octobre 2012 jusqu'à la date de l'achèvement du chantier ; qu'en revanche, [...] la preuve d'un lien de causalité direct et certain entre la révélation ou l'aggravation de pathologies existantes alléguées - telles que les rhumes, grippes, prurit ou asthme - et les travaux litigieux n'est pas rapportée, faute d'expertise médicale diligentée à l'époque des faits, pour chaque individu s'en plaignant ; qu'il en est tout autant des accidents corporels ponctuellement invoqués par certains locataires - comme Madame QS..., qui elle a été ébouillantée aux pieds le 26juin 2013 à la suite de la chute d'une friteuse elle-même provoquée par les vibrations des marteauxpiqueurs, ou Monsieur RB..., victime, le 24 mars 2014, d'une luxation de l'épaule gauche et de contusions après avoir heurté une planche de bois sur le chantier de la résidence - alors que la preuve du lien de causalité avec les nuisances du chantier n'est pas suffisamment établie ; qu'enfin, c'est à bon droit que le tribunal a retenu que "les éléments du dossier ne permettaient pas de déterminer avec certitude si l'incendie du 18 juillet 2013 trouvait sa cause dans les travaux en cours au sein de l'immeuble" ; que ces prétentions à indemnisation de ces dommages seront donc rejetées par la cour ;
que sur l'indemnisation des préjudices subis, le dépassement excessif de la durée du chantier a nui à chacun des locataires qui ont occupé les logements pendant l'exécution des travaux ; que concernant tous les locataires intimés ici - lesquels ont apporté la preuve qu'ils avaient été victimes des dommages sur le site pendant l'exécution des travaux - le retard pris, non contesté par la société TOIT ET JOIE, constitue un préjudice de même nature qui doit être réparé par l'allocation d'une même indemnité, chacun d'eux l'ayant subi ;
qu'ils demandent chacun, non à titre collectif comme le prétendent certains intimés, l'indemnisation de leur préjudice personnel en estimant sa réparation à une somme qu'ils ont déterminée sur une période variable en fonction de leur départ ou de leur maintien dans les logements concernés ;
que selon les pièces produites aux débats, [...] le planning prévisionnel communiqué aux locataires annonçait une durée de chantier de 18 mois environ, dont 13 mois de travaux effectifs ; que les travaux ont commencé, non pas au début de l'année 2012 comme initialement prévu, mais au mois d'octobre 2012 ; que par procès-verbal de constat d'huissier de justice, la société TOIT ET JOIE établit que le chantier se trouvait achevé et faisait l'objet d'une réception par le maître de l'ouvrage le 3 mai 2016, Qu'ainsi, alors qu'une fin de chantier était annoncée pour le début de l'année 2014, il apparaît que la durée excédentaire d'exécution a atteint deux années ; que le tribunal, ayant statué alors que la date d'achèvement des travaux litigieux n'était pas connue, a retenu deux périodes d'indemnisation :
- l'une d'octobre 2012 au 22 janvier 2015, date du jugement entrepris
- l'autre à compter de cette date jusqu'à la fin du chantier ;
que sur la première période, quatre locataires ont définitivement quitté la résidence ;
- Madame XY... en arrêt maladie, a déménagé le 4 janvier 2014 alors qu'elle vivait dans la résidence depuis trente ans, pour un nouveau logement situé à FRESNES pour un loyer deux fois plus élevé ;
- Madame FZ... qui a quitté les lieux le 24 janvier 2014 en raison de son état de santé ; leur indemnisation respective ayant été arrêtée à 2 500 euros ;
- Madame ML... qui est partie en novembre 2013 à BAGNEUX (92), moyennant une légère hausse de loyer, a produit des justificatifs des frais de déménagement restés à sa charge ainsi que de travaux qu'elle a engagés dans le nouveau logement, son indemnisation a été fixée par le premier juge à 3 500 euros ;
- Monsieur MY... UF... qui a aussi déménagé avec sa famille le 13 juin 2014 et a dû se reloger à ses frais, il a vu son préjudice réparé par le tribunal à hauteur de 3 000 euros ;
qu'adoptant les motifs du jugement qui a procédé à une appréciation juste et pertinente des réparations accordées auxdites victimes, au regard du préjudice effectivement subi par chacun de ces quatre locataires, la cour confirmera ces chefs d'indemnisation les concernant sur ladite période ; que sur la même période, le tribunal a attribué aux autres victimes demeurées dans l'immeuble, une somme de 4 500 euros à titre dommages et intérêts ;
Considérant que les locataires restés dans les lieux persistent, en appel, à solliciter, outre une indemnisation provisionnelle pour la première période, une réduction de leurs loyers pour la seconde période ; que sur la seconde période, et dans l'attente de la fin du chantier litigieux, le premier juge a prononcé une réduction de 50 % des loyers payés par les locataires concernés jusqu'au parfait achèvement des travaux des appartements ; mais que, selon le procès-verbal de constat du 3 mai 2016, les gros travaux ayant cessé, les dommages les plus importants ont tout autant cessé à cette date ; que si Maître WF..., huissier de justice diligenté par la société TOIT ET JOIE ne s'est pas rendu dans les lots privatifs lors de l'établissement de son constat du 3 mai 2016, si le bailleur n 'a pas fait signer par les locataires intimés un quelconque quitus de fin de travaux relatifs aux finitions intérieures, et si certains d'entre eux produisent des constats établissant que ces finitions n'étaient pas achevées dans les logements de Monsieur E... (appt. 228), Madame K... (appt. 440), Madame et Monsieur UC... (appt. 727) et Madame BN... (appt. 318), il n'est cependant pas établi que ces travaux d'achèvement, lot par lot, ont généré un préjudice personnel et réel pour chaque locataire de la résidence ; qu'en effet, ces locataires excipent de travaux de "finition de la peinture", "absence de reprise de finition", "désordres", qui loin de démontrer l'absence d'achèvement des travaux relèvent des réserves de post-achèvement, voire d'appréciations qualitatives subjectives ; que la levée d'éventuelles réserves ne doit être assimilée avec l'achèvement des travaux litigieux ; qu'enfin, à l'occasion d'une réunion tenue le 10 octobre 2016, la représentante des locataires a informé la société TOIT ET JOIE de ce que les locataires, parties à la procédure, allaient reprendre le paiement intégral du loyer à partir du mois de novembre et ce de manière rétroactive, ce dont il se déduit que les travaux générant des nuisances ont été terminés avant le 3 novembre 2016 date du constat établi à l'initiative des locataires ; qu'ainsi la cour retiendra que les travaux de l'immeuble, préjudiciables aux locataires, ont été achevés le 3 mai 2016 ; et que, du dernier semestre 2015 jusqu'au début du mois de mai 2016, une seule entreprise était encore présente sur les lieux ; que l'intensité des nuisances s'était alors estompée, les travaux intérieurs à l'ensemble des logements étant très avancés et la démolition des séchoirs achevée, seuls des travaux d'aménagement des parties communes et de construction en terrasse se sont poursuivis ; que la cour confirmera donc le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné la réduction du loyer hors provisions pour charges à hauteur de 50 %, eu égard aux préjudices subis par les locataires restés dans les lieux, à compter du 15 janvier 2015, mais le réformera pour retenir la date du 3 mai 2016 marquant la date d'achèvement des travaux préjudiciables justifiant réparation ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DU PREMIER JUGE QUE, sur les demandes formées par les locataires et l'UDCLV à l'encontre de la société TOIT ET JOIE
a) Fondement juridique
L'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version antérieure à la loi du 24 mars 2014, dispose que le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation. Le bailleur est obligé :
a) De délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ;
b) D'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle hormis ceux qui, consignés dans l'état des lieux, auraient fait l‘objet de la clause expresse ;
c) D'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués ;
d) De ne pas s'opposer aux aménagements réalisés par le locataire, dès lors que ceux-ci ne constituent pas une transformation de la chose louée ;
que l'article 7 de la même loi oblige le locataire à laisser exécuter dans les lieux loués les travaux d'amélioration des parties communes ou des parties privatives du même immeuble, les travaux nécessaires au maintien en état, à l'entretien normal des locaux loués, ainsi que les travaux d'amélioration de la performance énergétique à réaliser dans ces locaux ; qu'il résulte de la combinaison des dispositions de ces articles que si le bailleur est autorisé à effectuer des travaux d'amélioration, d'entretien et de maintien en l'état au sein des logements et des parties communes, et ce en présence des locataires qui doivent les souffrir, il convient néanmoins d'apprécier le caractère anormal des troubles subis par les locataires du fait des travaux ainsi réalisés, lesquels peuvent dans ce cas donner lieu à indemnisation ;
que le caractère anormal des troubles liés aux travaux peut résulter notamment de leur durée, de l'intensité du bruit et de la saleté, du nombre de zones du logement ou des parties communes concernées, de la fréquence et de l'ampleur des atteintes portées au confort et à l'intimité des personnes ; que par ailleurs, les demandeurs invoquent des désordres dus aux travaux qui présenteraient un danger pour la santé des personnes et pour leur sécurité ; Dans la mesure où ces désordres auraient entraîné un préjudice, ils sont également indemnisables ; qu'en effet, le bailleur est responsable vis-à-vis de ses locataires, des préjudices causés par les travaux qu'il a engagés et dont il a, comme maître d'ouvrage, délégué l'exécution à des professionnels du bâtiment ;
b) Rappel chronologique du déroulement des travaux En l'espèce, il est établi et non contesté que la société TOIT ET JOIE, propriétaire de la résidence située [...] , a décidé d'engager des travaux de réhabilitation de grande envergure touchant à la fois les espaces extérieurs de l'immeuble (espaces paysagers, parkings), les parties communes (halls d'entrée, ascenseurs, escaliers, toiture avec la construction de logements en terrasse) et les appartements (façades et huisseries extérieures, plomberie incluant le système de chauffage, électricité, salle de bain, porte palière) ; que le choix a été fait par le bailleur d'effectuer les travaux en site occupé ; Seuls ont été relogés avant le début des travaux, les occupants de certains logements dont la destination devait être entièrement revue (division de duplex en deux appartements) ; que la durée du chantier était initialement estimée à dix-huit mois ; L'analyse des documents produits par la société TOIT ET JOIE elle-même permet de retracer approximativement le déroulement des travaux ; qu'ainsi, le choix des entreprises était annoncé en juin 2012 par le bailleur qui précisait qu'une campagne de visite des logements se déroulerait pendant l'été ; que l'entrée de la résidence située [...] était neutralisée en août pour être réservée au passage des véhicules de chantier ; que le déménagement des caves était exigé pour le 6 août 2012 afin que les travaux puissent y commencer ; Les arbres du parking étaient abattus du 3 au 7 septembre 2012 ; Le 4 octobre 2012, lors d'une réunion d'information publique, un calendrier de travaux était présenté, avec un achèvement prévu en novembre 2013, la phase préparatoire étant incluse dans les 18 mois annoncés ; que les travaux touchant l'intérieur des appartements (hors chauffage) devaient débuter par tranches en octobre 2012, et s'étaler pour les deux ailes de la résidence sur six mois (jusqu'en mars 2013) ; Les travaux de façade devaient s'échelonner de janvier 2013 à novembre 2013 ;
que le remplacement du système de chauffage devaient être effectué de mai à octobre 2013 ; que la page intitulée "Zoom sur les travaux dans votre logement", permettait aux locataires de penser que l'ensemble des interventions au sein de leur logement (gaines, plomberie, électricité, menuiseries extérieures, porte palière, chauffage et finitions) seraient effectuées par tranches et totaliseraient 15 jours d'intervention (4 jours + 1 jour + 8 jours + 1 jour + 1 jour) ; que le bailleur avait également annoncé qu'un avis de travaux serait adressé aux locataires deux semaines à l'avance ; Il leur était demandé, selon les différentes interventions à réaliser, de débarrasser les balcons et libérer une bande d'un mètre linéaire autour de la fenêtre, de faciliter l'accès aux prises électriques de la cuisine, de vider les meubles d'évier, de faciliter l'accès à la salle de bain, de dégager l'accès aux colonnes d'eau au niveau du séjour et des chambres ; que parallèlement, aux termes de la lettre d'information de novembre 2012, les travaux de démolition des parties communes et des studios étaient déjà en cours et la démolition des séchoirs venait de débuter, avec une durée d'intervention prévue jusqu'en janvier 2013 ; que le bailleur alertait les locataires se trouvant dans les étages supérieurs de ce que le bruit allait être important ; qu'en réalité, la fin des travaux de démolition en toiture a été ultérieurement annoncée pour la mi-mars 2013 ; que dès le mois de novembre, les locataires se sont plaints des travaux en cours dans leur appartement puisque suite à des demandes relatives au déroulement des travaux et aux finitions, une visite des logements leur a été proposée les 4 et 7 décembre 2012, la permanence sociale se tenant les mêmes jours, puis à nouveau les 9 et 11 janvier 2013 ; qu'en mars 2013, une benne était mise à disposition des locataires pour débarrasser les objets se trouvant sur leurs balcons, ce qui permet de penser que les travaux de façade, qui devaient débuter en janvier 2013, n'avaient pas encore commencé ; qu'en avril 2013, la neutralisation des ascenseurs centraux était annoncée par la société TOIT ET JOIE pour cinq mois ; qu'en août 2013, elle était de nouveau annoncée pour une durée prévisible de quatre mois ; Restaient à disposition des locataires les deux ascenseurs latéraux à partager avec les entreprises de travaux ; qu'il est fait état, dans une lettre d'information du bailleur, d'une panne des ascenseurs B et C en juillet 2013 ; que le 19 juin, il était procédé au retrait de l'antenne de toit et les locataires avaient été informés que cela entraînerait des nuisances sonores importantes ; qu'en juin et juillet 2013, d'importantes précipitations entraînaient des infiltrations d'eau par la toiture, occasionnant des dégâts des eaux dans une quarantaine de logements des étages supérieurs (d'après le compte rendu établi pour le conseil d'administration de la société TOIT ET JOIE du 29 octobre 2013) ; qu'un incendie a eu lieu au niveau des caves le 18 juillet 2013 ; qu'en juillet 2013, les malfaçons reprochées par la société TOIT ET JOIE à la société SEE SIMEONI sur les travaux de façade et les huisseries extérieures ont entraîné la suspension de ces derniers ; que l'annonce de l'arrêt de ces travaux a été faite par le bailleur aux locataires le 25 octobre 2013 ; A cette date, la société TOIT ET JOIE indiquait avoir fait procéder au calfeutrement provisoire des huisseries mal posées ; que toujours d'après le compte rendu du 29 octobre 2013, 96 logements avaient été équipés en menuiserie mais avec de nombreuses malfaçons ; que les travaux intérieurs des logements avaient été réalisés à 95 % et le remplacement des portes palières à 60 % ;
que restaient les peintures, finitions, et la résolution des difficultés liées aux travaux de façade et des menuiseries extérieures ; que les travaux de gros oeuvre et de plomberie étaient achevés dans les parties communes ; que l'état d'avancement des aménagements extérieurs était estimé à 20 % ; En moyenne, plus d'un an après leur démarrage effectif, l'état d'avancement des travaux était de l'ordre de 50 % ; que les locataires ont été invités à faire connaître leur éventuel souhait d'être relogés en novembre 2013 ; qu'il résulte enfin du courrier adressé au maire de FRESNES le 14 février 2014 par la société TOIT ET JOIE que l'ascenseur neuf projeté n'était toujours pas installé à cette date, que les trous effectués dans les murs et sols des appartements pour faire passer les nouvelles canalisations de chauffage étaient en cours de rebouchage depuis décembre 2013 et jusqu'à une date prévisible en mars 2014 ; qu'au moment de l'audience en septembre 2014, il a été indiqué par la société TOIT ET JOIE qu'une nouvelle entreprise venait d'être choisie pour reprendre le chantier de la société SEE SIMEONI ; La durée des travaux restant à effectuer était alors estimée à 14 mois minimum ; que s'agissant du chauffage de la résidence, il s'agit d'un système collectif alimenté par le réseau de chauffage urbain ; qu'il connaissait des vicissitudes avant le démarrage des travaux puisque d'après les documents de la société TOIT ET JOIE, en décembre 2011, une fuite avait privé les locataires de chauffage dans les salles de bain et en février 2012, la chaufferie s'était avérée insuffisante compte tenu de températures extérieures particulièrement basses ; qu'après le démarrage des travaux, en janvier 2013, le bailleur reconnaissait lui-même dans sa lettre d'information mensuelle qu'en cette période de froid intense, la chaleur des appartements n'atteignait pas 19° Celsius ; qu'il annonçait la hausse de fourniture de chauffage par la ville, la mise à disposition de convecteurs électriques par la société TOIT ET JOIE, le remboursement des provisions sur charge de décembre et janvier et la demande faite par ses soins aux entreprises de procéder au calfeutrement des parties communes ; qu'il a ensuite été demandé aux locataires de restituer les convecteurs prêtés avant le 2 avril 2013 mais du 2 au 3 avril 2013, une panne a privé les logements de chauffage et d'eau chaude ; que le 15 octobre 2013, le système de chauffage avait été entièrement changé mais n 'était pas opérationnel ; que des convecteurs ont été de nouveau proposés aux locataires ; La mise en eau a été effectuée du 21 au 26 octobre 2013 en vue d'une mise en route du chauffage le 26 octobre 2013 ; Le 30 octobre 2013, une panne du chauffage urbain a perturbé les opérations de purge en cours ; qu'une coupure est intervenue le 21 novembre de 8h à 18h pour permettre à l'entreprise BREZILLON d'effectuer des modifications sur la sous-station de chauffage ; Le 22 novembre 2013, c'est, d'après le bailleur, une panne de chauffage urbain qui a mis l'installation hors service ; que dans son courrier adressé au maire de FRESNES le 14 février 2014, la société TOIT ET JOIE reconnaissait que depuis qu'il avait été mis en marche fin octobre 2013, le système de chauffage avait été instable et que s'il avait été remédié aux dysfonctionnements fin décembre 2013, "l'apparition de nouvelles instabilités", non liées à des conditions climatiques particulières, avait été constatée depuis le début du mois de février 2014 ;
c) Existence et définition des troubles subis par les locataires que ce rappel chronologique permet de mesurer l'ampleur des interventions engagées, le retard pris dans les travaux par rapport à la durée initialement prévue et l'importance des difficultés rencontrées sur le chantier ; Il vient conforter les témoignages des demandeurs qui, s'ils restent évidemment subjectifs, donnent par leur nombre (40 familles ont constitué un dossier individuel) et par la répétition des mêmes items, une idée assez précise des préjudices de jouissance rencontrés par les locataires du fait de la réalisation de ces travaux ; que leurs propos sont également illustrés par des photos de leurs appartements et des parties communes, des enregistrements sonores et vidéo, les constats d'huissier produits et les courriers émanant du députémaire de FRESNES, qui s'est déplacé dans la résidence au moins une fois, en octobre 2013, pour constater par lui-même l'état de l'immeuble et des appartements ; que les quitus de travaux produits par la société TOIT ET JOIE ne justifient pas, contrairement à ce que soutient la défenderesse, de la bonne exécution des travaux dans les appartements visités par les huissiers : le quitus relatif au chauffage concerne le logement 230 et n'est pas signé par le locataire ; que les autres quitus donnés portaient sur la pose d'une façade de gaine chez Madame EE... UC..., sur la pose d'une nouvelle porte palière chez Monsieur M... T... et sur les travaux de plomberie chez Madame XG... XA..., c'est-à-dire sur une partie seulement des interventions réalisées au sein des appartements ; qu'ainsi ressortent en premier lieu des témoignages et pièces des demandeurs, les troubles liés au bruit des marteaux piqueurs, scies à métaux et coups de masse lors des destructions des séchoirs, studios, et parties communes, bruits décrits également par le constat d'huissier de Maître SH... du 13 juin 2013, qui précise qu'il est impossible de tenir une conversation, même en haussant la voix ; que la durée même des destructions engagées dans les parties communes et sur le toit, d'octobre 2012 à mars 2013 au moins, explique la fatigue décrite par les locataires, résultant de l'impossibilité pour les personnes ayant des horaires de travail décalé de se reposer en journée, pour les enfants de faire leurs devoirs ou de préparer leurs examens, etc. ; que la poussière est également un désagrément important, dénoncé par tous, et il est évident que l'ampleur des travaux de destruction, qui ont concerné les parties communes et les façades pendant des mois d'affilée, mais également les travaux à l'intérieur des appartements impliquant le percement des murs (notamment pour le chauffage) ont généré de la poussière qui par sa nature volatile, s'infiltre dans tous les espaces ; que les infiltrations d'eau, parfaitement reconnues par le bailleur, ont également été décrites et photographiées par les demandeurs dont certains ont produit le courrier de leur assureur suite à leur déclaration de sinistre ; Les dégâts des eaux ont eu pour origine au moins trois causes : les infiltrations par la toiture au moment des fortes intempéries de juin et juillet 2013, touchant surtout les appartements des étages élevés, la dégradation de canalisations en raison de chutes de gravats à l'intérieur des gaines et des fuites, survenues au moment de la mise en eau du circuit de chauffage ; que le maire de FRESNES, dans son courrier du 15 novembre 2013, faisait état des sinistres liés aux gros orages de juin 2013 et de l'absence de réparation rapide des dégâts ; que force est de constater que, même lorsqu'ils ont été indemnisés par leur assureur, il n'était pas possible pour les locataires de remettre leur logement en état tant que les travaux n'étaient pas terminés et que l'insuffisance de chauffage dans les logements, deux hivers de suite, n'a naturellement pas favorisé le séchage des murs ; que les infiltrations ont également soulevé des parquets ; que certains locataires expliquent même qu'ils ont dû placer un sceau au pied de leur lit ; Ces dégâts des eaux répétés ont une incidence forte sur la vie quotidienne des occupants : sensation de froid et d'inconfort, développement d'odeurs nauséabondes, désagrément esthétique ; qu'ainsi qu'il l'a été déjà longuement évoqué et comme l'a reconnu la société TOIT ET JOIE dans les différents documents qu'elle a elle-même produits, les problèmes de chauffage ont été importants, deux hivers de suite ; que ces derniers ont en effet eu lieu pendant l'hiver 2012, apparemment en lien avec des températures particulièrement basses, mais également du fait des travaux en cours, notamment au sein des parties communes qui ont dû être calfeutrées car leur destruction partielle laissait s'engouffrer l'air froid dans le bâtiment ; qu'ils ont également été récurrents pendant l'hiver 2013, en raison de la mise en route de la nouvelle installation et de l'absence de finition des travaux de façades et d'huisseries, notamment d'octobre à décembre 2013 et en février 2014 ; qued'après les témoignages des locataires, les convecteurs mis à disposition par le bailleur étaient en nombre insuffisant pour chauffer toutes les pièces des logements ; que certains contestent avoir reçu le moindre remboursement de leur facture d'électricité ; qu'il semble en outre que la société TOIT ET JOIE ait envisagé un remboursement forfaitaire, calculé en fonction de la surface du logement et des températures extérieures, et non pas calqué sur la dépense réelle engagée par chaque foyer ; que le bailleur ne produit d'ailleurs aucun élément précis à cet égard de sorte que les efforts dont il fait état (fourniture de convecteurs et remboursement des factures d'électricité et/ou des provisions pour charges) ne peuvent être vérifiés ; qu'en dehors des problèmes de fonctionnement, le remplacement du système de chauffage a également engendré des nuisances importantes pour les locataires : pose des nouveaux radiateurs avant la dépose des anciens, engendrant provisoirement une perte de place importante, maintien en place pendant plusieurs semaines d'anciennes canalisations coupées, percement de trous dans les planchers et murs ouvrant sur les appartements voisins, dont il est admis par la société TOIT ET JOIE qu'il n'ont fait l'objet d'une campagne de rebouchage systématique qu'à compter de décembre 2013 et jusqu'en mars 2014 ; que la surface des logements a été durablement réduite, notamment pas les travaux de façade, obligeant certains locataires à se débarrasser de meubles qui ne trouvaient plus place chez eux, à entasser leurs affaires et à vivre dans un espace confiné et désorganisé ; que la suppression des balcons et l'indisponibilité des caves les a en outre privés de tout espace extérieur de stockage ; Cette réduction de leur espace de vie a été constatée par les huissiers intervenus en juin et juillet 2013 ; que le maire de FRESNES, qui a également visité des appartements de la résidence le 14 octobre 2013, a pu écrire dans son courrier du 16 octobre 2013 que la situation des fenêtres et façades, laissée en état depuis l'été, rendait l'espace inhabitable pour les occupants ; que les malfaçons invoquées par les locataires, comme les tuyaux de chauffage condamnant un placard, l'absence de finition ou de raccord au niveau des murs et des sols, ou encore la chute répétée de la porte de douche, participent du préjudice de jouissance qu'ils subissent pendant les travaux même si elles devraient trouver progressivement des solutions à mesure de l'achèvement des travaux ; que plus globalement, le démarrage des travaux en même temps au niveau des extérieurs, des parties communes et des appartements a dégradé le cadre de vie des locataires de la résidence, à la fois sur le plan de l'esthétique, sur celui des modalités de circulation aux abords et au sein de la résidence, et du point de vue de leur intimité ; que l'arrêt de l'ascenseur central et l'obligation de partager les ascenseurs latéraux avec les ouvriers a souvent obligé les locataires, en raison de la sur-occupation des ascenseurs restants ou de leurs pannes récurrentes, à emprunter les escaliers alors que l'immeuble comporte 12 étages ; que les conditions de vie sont également un frein à la vie sociale des locataires qui ne sont pas en mesure de recevoir des proches chez eux ; Ils décrivent en outre la gêne résultant de la nécessité de prendre des jours de congé pour être présents lorsque les ouvriers devaient intervenir, aggravée par le nonrespect par le bailleur du délai de prévenance de 15 jours qu'il avait pourtant annoncé, mais aussi par les nombreux rendez-vous manqués et parfois par le comportement inadapté des ouvriers ; que la durée des travaux vient aggraver le caractère anormal de l'ensemble des troubles ci-dessus évoqués ; qu'à cet égard, il est intéressant de rappeler que les dispositions de l'article 1724 du code civil prévoient que dès lors que des travaux dépassent quarante jours (durée d'ailleurs ramenée par la loi du 24 mars 2014 à vingt et un jours), le prix du bail doit être diminué à proportion du temps et de la partie de la chose louée dont le locataire aura été privé ; qu'il a suffisamment été rappelé que les locataires de la résidence du [...] avaient été partiellement privés de la jouissance de leur logement et des parties communes du fait de la réalisation des travaux proprement dits et de l'absence de finition dans toutes les pièces ; que les dix-huit mois initialement annoncés constituaient déjà une durée tout à fait hors norme, mais le retard pris dans les travaux vient encore aggraver le trouble de jouissance des locataires qui perdure à ce jour et ce, pour une durée indéterminée ; que tous ces éléments ont également pu être constatés par les personnes extérieures à la résidence qui ont établi des attestations ;
Ainsi, Madame RF... NM..., qui rendait régulièrement visite à Madame S... XY..., décrit parfaitement les difficultés à trouver l'entrée de l'immeuble, la vaine attente d'un ascenseur et l'obligation de prendre les escaliers pour monter au 12eme étage ; qu'elle écrit "Dans les étages, il y avait de la poussière blanche partout (...). De grandes bâches étaient disposées pour servir de portes ( ?), celles-ci n'empêchaient aucunement la poussière de se déposer partout. Dans l'appartement de Madame XY..., les meubles étaient tous dérangés afin de faciliter le passage incessant des ouvriers, à chacune de mes visites, l'encombrement des meubles et des cartons se faisait plus dense. Il faisait dans l'appartement un froid insupportable, le bruit des marteaux piqueurs et les vibrations venues du toit empêchaient d'avoir la moindre conversation suivie, il fallait hausser le ton vraiment fort" ; Madame LH... UV... BZ..., soeur de Madame XY..., a également constaté, alors qu'elle rendait visite à sa soeur après son hospitalisation (soit courant mai-juin 2013), "du bruit (à la limite du tolérable/continuellement), tous les jours, la poussière qui rentrait de partout, la saleté dans les coursives (déchets des ouvriers), ascenseur en panne régulièrement, parking inaccessible" ; Madame MU... X..., également amie de Madame XY..., décrit entre autres les travaux "commencés partout à la fois, et rien de terminé" ; Le dossier de Madame EE... UC... comporte également des attestations de tiers : Madame VG... HP..., Madame SN... XK... , Madame JS... YO..., Monsieur UL... WZ..., Mademoiselle XH... MR..., Madame UM... XI..., Mademoiselle RY... IX..., Madame WR... PW..., Madame GW... et Madame SB... DC... font état des mêmes troubles et décrivent en outre des problèmes d'infiltrations importants dans l'appartement de la famille UC... ; Madame JS... YO... expose aussi avoir constaté dans le logement de ses amis une température de 13° Celsius et avoir dû héberger les enfants de la famille lorsque les températures au sein du logement étaient trop basses ; Monsieur SK... TL... et Madame OL... TE... ont également attesté en faveur de Madame GG... QP... et de sa fille, Madame SB... SQ..., mentionnant les difficultés d'accès à la résidence, le bruit, la poussière, l'absence de chaleur dans l'appartement, la vue bouchée par un échafaudage ou encore les dégradations résultant des travaux entrepris ; qu'à ce préjudice de jouissance, les demandeurs ajoutent un préjudice résultant du danger pour la santé et la sécurité des personnes ; que toutefois, ils échouent à établir la réalité d'un préjudice personnel qui puisse être isolé d'un préjudice plus global de jouissance et directement rattaché aux désordres occasionnés par les travaux ; qu'en outre, il apparaît difficile de prouver l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre l'aggravation de pathologies existantes, telles que le prurit ou l'asthme, ou la survenance de rhumes ou de grippes, et les travaux en cours, mais on peut considérer que ces problèmes de santé, de même que les troubles du sommeil ou les états dépressifs imputés par les demandeurs à l'importance du bruit ou du stress occasionné par les travaux, font partie intégrante du trouble de jouissance subi par les locataires ; que par ailleurs, les éléments du dossier ne permettent pas de déterminer avec certitude si l'incendie du 18 juillet 2013 trouve sa cause dans les travaux en cours au sein de l'immeuble ; qu'il n'est pas établi que la présence de gravas ou de matériel dans les parties communes ait entraîné des chutes de résidents ; que le fait qu'une canalisation se soit retrouvée dans le berceau d'un bébé n'a fort heureusement pas eu de conséquence dommageable puisque l'enfant ne se trouvait pas dans son lit ; Au total, au vu de l'ensemble de ces éléments, il est parfaitement établi que les locataires de la résidence du [...] subissent, au moins depuis début octobre 2012 et encore à ce jour compte tenu de l'absence d'achèvement des travaux, des troubles de jouissance anormaux et d'une particulière intensité, perturbant de façon continue leur intimité, leur confort et leur cadre de vie ; que ce préjudice anormal de jouissance doit être indemnisé parle bailleur, sur qui pèse une obligation de résultat, sans qu'il soit nécessaire de rapporter la preuve que les désordres occasionnés par les travaux présentent un danger pour la santé des personnes et pour leur sécurité ;
d) Compensations invoquées par le bailleur
que la société TOIT ET JOIE met en avant les efforts de concertation menés dès 2009, notamment par l'organisation de réunions d'information des locataires, ainsi que l'accord collectif du 5 juillet 2011 ; qu'elle soutient que les locataires avaient compris et accepté les troubles inhérents aux travaux et que les contreparties qu'elle leur a offertes suffisaient à compenser les perturbations occasionnées ; qu'il résulte bien des pièces produites par les parties qu'un certain nombre de réunions ont été organisées avant le démarrage des travaux et que des documents de présentation du projet ont été élaborés à destination des locataires ; que reste que, contrairement à ce qui a pu être indiqué dans la note d'information au conseil d'administration de la société TOIT ET JOIE du 29 octobre 2013, la lecture du programme de réhabilitation ne permettait pas à elle seule aux locataires de comprendre ce qu'ils devraient endurer comme nuisances pendant la durée des travaux ;
que force est de constater au contraire que la plupart des documents établis par la société TOIT ET JOIE pendant la phase de concertation sont muets sur la nature, le nombre et la durée desdites nuisances ; qu'ainsi le document intitulé "accord collectif se contente en moins de deux pages de lister les réalisations envisagées sur le bâti, les équipements et les espaces extérieurs en présentant le résultat qui sera obtenu mais sans aucune précision sur la nature des interventions que cela implique ni même aucun calendrier ; que par exemple, la modification des façades est annoncée mais il n'est pas dit que les locataires vont devoir vivre un certain temps avec une surface de vie réduite par la présence d'une façade provisoire placée à l'intérieur de leur logement ; La destruction des séchoirs et la construction de logements en terrasse est également présentée mais il n'est pas indiqué que cela impliquera, notamment pour les occupants des étages supérieurs, des nuisances sonores importantes (utilisation de marteaux piqueurs et de masses) pendant des mois ; qu'en outre, les contreparties proposées ne sont pas à l'avantage des locataires : ainsi l'augmentation des loyers des locataires en place serait difficilement justifiable, l'augmentation de la surface de leur logement étant le fruit de la suppression de leur balcon et permettant tout juste de conformer leur habitation aux normes de superficie actuelles ; par ailleurs, ceux qui se garaient librement sur le parking de la résidence devront payer un droit de stationnement mensuel de 10 euros ;
enfin et surtout, le partage des économies d'énergie pendant 15 ans avec le bailleur constitue en réalité une forme d'augmentation de loyer puisque là où les locataires auraient dû payer moins de charges en raison des travaux d'amélioration de la performance énergétique des logements, ils reverseront au bailleur une somme forfaitaire destinée à permettre à celui-ci de revenir au moins partiellement sur son investissement ; Enfin, cet accord collectif ne constitue en aucun cas un contrat entre le bailleur et les locataires ; que la société TOIT ET JOIE n'a d'ailleurs produit aucun élément objectif sur le taux de réponses positives et la participation des locataires à ce qui constitue en réalité seulement un sondage, auquel il a été proposé de répondre par oui ou par non aux locataires ; que par ailleurs, la mise à disposition d'appartements-tampon était présentée par la SA TOIT ET JOIE elle-même comme une solution de repli sur la journée pour les locataires et non comme une solution d'hébergement pour plusieurs jours ; qu'il convient de souligner le fait que ces logements étant eux-mêmes situés au sein de la résidence en travaux, ils constituaient un refuge très relatif ainsi qu'il résulte notamment du témoignage de Madame L... AO... et de Monsieur WE... KH... qui évoquent un équipement insuffisant et le fait qu'ils ont dû supporter des travaux au sein même de l'appartement provisoire où ils étaient installés avec leurs deux enfants en bas âge ; que qu'enfin, ces logements-tampon n 'ont été mis à disposition qu'à compter de mars 2013 alors que les travaux de démolition des parties communes et les interventions au sein des appartements avaient débuté en octobre 2012 ;
que de même, la présence continue d'une personne du pôle social au sein de la résidence n 'a été instaurée que courant 2013 et il n 'est pas indiqué par la société TOIT ET JOIE de quels moyens disposait l'animatrice de ce pôle pour intervenir auprès des locataires ; que l'ensemble des demandes de relogement des locataires n 'ont pas pu être satisfaites ; qu'au total, la société TOIT ET JOIE ne justifie pas avoir mis en oeuvre des mesures suffisantes pour compenser le trouble anormal de jouissance subi par ses locataires ; qu'en dernier recours, elle invoque en vain le fait que les loyers de cette résidence seraient inférieurs aux prix pratiqués par les autres bailleurs sociaux à FRESNES ou le fait qu'un certain nombre de locataires bénéficieraient de l'APL, ces éléments étant sans incidence sur le droit des locataires à bénéficier de conditions de vie paisibles ;
e) Nature et montant de l'indemnisation due par le bailleur aux locataires que la demande initiale des locataires d'être autorisés à consigner leurs loyers n'apparaît pas adaptée au présent litige ; que la consignation des loyers est en effet admise en cas d'inexécution totale de ses obligations par le bailleur, soit à raison de l'indisponibilité totale de la chose louée, soit parce qu'il refuse d'effectuer des travaux nécessaires, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'en outre, il n'apparaît pas nécessaire d'attendre la fin des travaux ou le résultat d'une expertise pour fixer le préjudice subi par les locataires ; qu'en effet, une expertise apparaîtrait seulement susceptible de déterminer les causes précises de malfaçons ou du retard pris sur le chantier en vue d'une indemnisation du maître de l'ouvrage par les entreprises intervenues sur chantier ou par les assureurs, mais elle n'a pas d'intérêt dans les relations entre les locataires et leur bailleur puisque la réalité du préjudice de jouissance des locataires est établi et que ce préjudice, subi par chacun d'eux en raison des travaux engagés dans les parties communes de la résidence et au sein de tous les logements également concernés par les travaux de façade, d'électricité et de plomberie, et par le remplacement de l'ensemble du système de chauffage, peut donner lieu à une indemnisation forfaitaire ; que les considérations de la SA TOIT ET JOIE sur la prétendue mauvaise foi des locataires qui ne seraient pas à jour de leur loyer ou auraient exigé des entreprises des interventions spécifiques sont sans incidence sur leur droit à indemnisation ; qu'au vu des développements qui précèdent, et dans la mesure où les demandeurs ont sollicité à la fois la réduction de leurs loyers à compter de la décision et une indemnisation provisionnelle, le tribunal dispose d'éléments suffisants, compte tenu de la nature, de l'ampleur et de la durée des désordres touchant l'ensemble des locataires de la résidence, pour fixer l'indemnisation définitive de leur préjudice comme suit :
- pour la période écoulée d'octobre 2012 à la date de la décision, la société TOIT ET JOIE indemnisera les demandeurs personnes physiques par le paiement à chacun d'une somme qu'il convient de fixer à 4.500 euros [...]
que cette indemnisation s'entend exclusivement du préjudice de jouissance des locataires occasionné par les travaux, et ne fait pas obstacle à l'indemnisation, notamment par les assurances, des dommages matériels qui résulteraient des dégâts des eaux subis dans leur appartement ; Elle n'inclut pas non plus l'indemnisation des préjudices qui résulteraient de malfaçons non corrigées au terme des travaux, et qu'ils pourraient réclamer lorsque ces derniers seront achevés ; que par ailleurs, certains demandeurs ont quitté la résidence de façon définitive en cours de procédure et doivent donc faire l'objet d'une indemnisation spécifique ; Madame S... XY... a déménagé le 4 janvier 2014 alors qu'elle vivait dans la résidence depuis trente ans, pour un nouveau logement situé à FRESNES et loué à la société EFIDIS, dont le loyer est du double du loyer dont elle s'acquittait [...] ; qu'en l'absence d'élément permettant d'établir avec certitude que ce déménagement ait eu pour cause exclusive les désordres occasionnés par les travaux, il convient de fixer l'indemnisation du trouble de jouissance qu'elle a subi jusqu'à son déménagement à la somme de 2.500 euros ; Madame RA... FF... JM... épouse FZ... a été relogée le 13 janvier 2014 au sein d'un immeuble de la société TOIT ET JOIE situé à [...] ) et justifie devoir payer un loyer supérieur d'environ 130 euros mensuels, charges comprises ; que comme pour Madame S... XY..., il convient de fixer l'indemnisation du trouble de jouissance qu'elle a subi jusqu'à son déménagement à la somme de 2.500 euros ; Madame YC... ML..., retraitée, a également reçu une offre de relogement de la société TOIT ET JOIE qu'elle a acceptée, et a déménagé en novembre 2013 à BAGNEUX (92), moyennant une légère hausse de loyer de l'ordre de 35 euros par mois ; qu'elle a produit des justificatifs des frais de déménagement restés à sa charge ainsi que de travaux qu'elle a engagés dans le nouveau logement ; que si les travaux d'embellissement du nouveau logement n'ont pas à être pris en charge par la SA TOIT ET JOIE, l'installation de vidanges pour le lave-vaisselle et le lave-linge, les frais de montage de meuble et de déménagement doivent en revanche l'être, au moins en partie ; qu'il convient en conséquence de fixer l'indemnisation du préjudice de Madame YC... ML... à la somme de 3.500 euros ; que Monsieur IM... MY... UF... et sa compagne, dont l'enfant est né en [...] , indiquent ne pas avoir eu de suite favorable de la part de la société TOIT ET JOIE à leur demande de relogement formée en novembre 2013 ; que Monsieur IM... MY... UF... expose, sans toutefois en justifier, avoir obtenu un nouveau logement via son employeur, moyennant un loyer nettement plus élevé que celui qu'il payait au sein de la résidence TOIT ET JOIE ; que Monsieur IM... UF... soutient ne pas avoir obtenu de dédommagement de la société TOIT ET JOIE pour les frais du déménagement (dont il ne précise pas le montant), intervenu le 13 juin 2014 ; Il convient de fixer l'indemnisation du trouble de jouissance qu'il a subi jusqu'à cette date à la somme de 3.000 euros » ;

ALORS QUE les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour elle ni perte, ni profit, de sorte que la réparation du préjudice ne saurait être forfaitaire ; qu'en allouant néanmoins aux locataires résidant toujours dans l'immeuble une indemnisation identique de leurs troubles de jouissance résultant des travaux, sans analyser le préjudice individuellement subi par chacun d'entre eux en fonction des circonstances concrètes propres à leur situation personnelle, la cour d'appel, qui a procédé à une indemnisation forfaitaire de leur préjudice, a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.

SECOND MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, D'AVOIR débouté la société Toit et joie de son appel en garantie formé contre la société Brezillon et D'AVOIR ainsi en conséquence mis la société Brezillon hors de cause ;

AUX MOTIFS QUE, sur les fautes imputables à la société BREZILLON dans l'exécution de son marché de travaux, la société TOIT ET JOIE invoque à l'encontre de la société BREZILLON des retards inhérents à son organisation, des malfaçons, des difficultés de réglage des installations de chauffage et une mauvaise gestion du chantier qui auraient généré des nuisances pour les locataires restés sur site ; mais [...] qu'il résulte des éléments de l'instance que la société BREZILLON a pris en charge des travaux supplémentaires indispensables, non prévus à son marché de base d'un montant de 6.761.976,64 euros hors taxe, en acceptant un avenant proposé par le maître d'ouvrage le 27 juin 2014 ; que ces travaux supplémentaires - d'un montant global de 1.596.214,30 euros hors taxe, soit plus de 23 % du montant du marché initial de la société BREZILLON - concernaient l'embellissement dans salles de bains, OS n° 2 du 26 mars 2013, la création de colonnes montantes ERD, OS n° 13 du 17 octobre 2014, la mise en place d'une membrane d'étanchéité au R+13, OS n° 14 du 7 novembre 2014, et la modification du contrôle d'accès, OS n° 16 du 19 novembre 2014 ; qu'il ne s'agissait donc pas de simples travaux d'ajustement ; que le projet initial a dû être modifié et complété de façon conséquente du fait d'une insuffisance de prévision ; qu'ainsi, l'OS n° 19 prévoyait une modification des colonnes sèches en janvier 2015, soit plus de 12 mois après la fin du délai contractuel initial ; que de tels travaux supplémentaires ont nécessairement induit un allongement du délai déjà recalé par l'avenant n° 1 du 27 juin 2014 ; et [...] que la société SEE SIMEONI, au regard de l'exécution de son lot retardé par les choix opérés par l'architecte et le maître de l'ouvrage, a exercé une influence sur l'allongement des délais, l'avancement de ses travaux - notamment sur les façades et l'incorporation des loggias - conditionnant ceux du macro lot A confié à la société BREZILLON ; qu'ainsi, si les locataires estiment avoir subi un préjudice consécutif au délai du chantier constaté dès novembre 2013, il ne peut être davantage imputé à la société BREZILLON ; que le chauffage a toujours fonctionné depuis octobre 2013, malgré les incidents limités survenus au premier trimestre 2013 et pour lesquels le réseau de chauffage urbain était concerné ; par ailleurs, que si la société TOIT ET JOIE invoque la présence de nombreuses malfaçons, aucun constat contradictoire ne permet d'en révéler la matérialité ni leurs conséquences préjudiciables pour les locataires ; encore, qu'il n'est pas démontré que les désagréments allégués par les locataires seraient nés de l'exécution des travaux mais plutôt du fait qu'ils ont été exécutés en site occupé par suite de la décision du maître d'ouvrage ; qu'il en a été ainsi des nuisances liées aux poussières et aux bruits, provoquées par la démolition au marteau-piqueur et la nécessité d'évacuer les gravats des séchoirs en béton armé, situés en terrasses des immeubles, pour certaines au 13eme étage ; enfin que les pièces du marché ne stipulent aucun transfert de responsabilité à l'entreprise BREZILLON du seul fait des dommages éventuels qui découleraient des travaux exécutés en milieu occupé et qu'aucune faute n'apparaît établie à son encontre dans l'exécution de son lot ; que la société BREZILLON ne saurait en conséquence être tenue des condamnations infligées à la société TOIT ET JOIE au titre des préjudices subis par ses locataires, quelle que soit la période considérée ; que la prétention de la société TOIT ET JOIE sera rejetée et le jugement déféré confirmé de ce chef ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES DU PREMIER JUGE QUE, sur l'appel en garantie formé par la société TOIT ET JOIE à l'encontre des sociétés BREZZILLON et SEE-SIMEONI et des compagnies d'assurance COVEA RISKS et AREAS, la simple mention dans les contrats des entreprises BREZILON et SEE-SIMEONI du fait que les travaux se dérouleraient en site occupé n'a pas transféré sur elles les obligations dues par le bailleur à ses locataires ; que dans la mesure où la condamnation intervenue dans le cadre de la présente décision sanctionne les manquements du bailleur à son obligation propre d'assurer à ses locataires la jouissance paisible de leur logement, elle ne résulte pas directement de fautes qui seraient imputables à la conduite des travaux, ou de la survenance d'un événement incertain et aléatoire susceptible d'être couvert par une assurance ; qu'en conséquence, pour obtenir des entreprises chargées des travaux une indemnisation de son propre préjudice, susceptible de résulter de la prolongation de la durée du chantier (incluant la perte financière résultant de la nécessité de maintenir à ses locataires un loyer réduit jusqu'au parfait achèvement des travaux), des problèmes d'infiltration ou des éventuelles malfaçons dans la qualité des ouvrages réalisés, la société TOIT ET JOIE doit démontrer l'existence d'une faute des entreprises et d'un lien de causalité entre cette faute et son préjudice ; qu'en l'état, la société TOIT ET JOIE se contente d'affirmer sans le démontrer que la société BREZILLON a manqué de vigilance pour avoir insuffisamment protégé les ouvrages des précipitations, qu'elle a manqué à son obligation d'exécution relative à la qualité des ouvrages, et qu'elle est à l'origine des difficultés de réglage des installations de chauffage ; [...] ; qu'en conclusion, l'appel en garantie global, destiné à couvrir intégralement la société TOIT ET JOIE de la présente condamnation sanctionnant le non-respect de ses obligations de bailleur, n'est pas fondé et doit être rejeté ; qu'en l'état, la société TOIT ET JOIE ne démontre pas davantage l'existence de fautes contractuelles imputables aux entreprises de travaux et susceptibles d'entraîner une indemnisation ou la survenance d'un risque entrant dans le champ d'intervention des assureurs qu'elle a mis en cause ;

1°) ALORS QUE la cour d'appel a considéré que « les malfaçons invoqués par les locataires, tels les tuyaux de chauffage condamnant un placard, l'absence de finition ou de raccord au niveau des murs et des sols ou encore la chute répétée de la porte de douche, [ayant] participé du préjudice de jouissance [que les locataires avaient] subi pendant les travaux » ; que dès lors en affirmant qu'aucun constat contradictoire ne permettait de révéler la matérialité des malfaçons invoquées par la société Toit et joie, ni leurs conséquences préjudiciables pour les locataires, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la cour d'appel a relevé l'existence d'infiltrations d'eau et considéré que les dégâts des eaux avaient au moins trois causes, à savoir, les infiltrations par la toiture au moment des fortes intempéries de juin et juillet 2013, la dégradation de canalisations en raison de chutes de gravats à l'intérieur des gaines et des fuites, survenues au moment de la mise en eau du circuit de chauffage ; que dès lors en affirmant qu'il n'était pas démontré que les désagréments allégués par les locataires étaient nés de l'exécution des travaux, et qu'ils résultaient exclusivement du fait d'avoir été exécutés en site occupé par suite de la décision du maître d'ouvrage, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°) ALORS, en toute hypothèse, QU'un constat, même non contradictoire, valant à titre de preuve dès lors qu'il est soumis à la libre discussion des parties, en déclarant que si la société Toit et joie invoquait la présence de nombreuses malfaçons, aucun constat contradictoire ne permettait d'en révéler la matérialité ni leurs conséquences préjudiciables pour les locataires, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4°) ALORS, en toute hypothèse QU'en se bornant à affirmer, sans autre explication, qu'aucune faute n'apparaissait établie à l'encontre de la société Brézillon dans l'exécution de son lot, la cour d'appel, qui a statué par un motif d'ordre général et abstrait, a violé l'article 455 du code de procédure civile.

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