25 juin 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-13.032

Deuxième chambre civile - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:C210359

Texte de la décision

CIV. 2

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 juin 2020




Rejet non spécialement motivé


M. PIREYRE, président



Décision n° 10359 F

Pourvoi n° G 19-13.032




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 JUIN 2020

Mme I... L..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° G 19-13.032 contre l'arrêt rendu le 2 mars 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (10e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Allianz, société anonyme, dont le siège est [...] ,

2°/ à M. W... N..., domicilié [...] ,

3°/ à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, dont le siège est [...] ,

4°/ à l'institution de prévoyance des emplois de la famille Ircem prévoyance, dont le siège est [...] ,

5°/ à la société Generali Belgium, dont le siège est [...] ),

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de Mme L..., de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Allianz, de M. N..., de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Generali Belgium, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mai 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bohnert, conseiller rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et Mme Cos, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.


1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme L... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme L....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement hormis sur le montant de l'indemnisation de Mme I... L... et les sommes lui revenant et en ce qu'il avait ordonné l'exécution provisoire à hauteur de 100 000 euros et, statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant, d'avoir fixé le préjudice corporel global de Mme L... à la somme de 109 914,23 euros seulement, d'avoir dit que l'indemnité revenant à cette victime à ce titre s'établit à 56 836,80 euros, d'avoir en conséquence condamné la société Allianz Iard à lui payer la somme de 56 836,80 euros, sauf à déduire les provisions versées, en réparation de son préjudice corporel ;

Aux motifs que, sur les préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation), concernant la perte de gains professionnels futurs, ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable ; qu'en l'espèce, l'expert n'a pas retenu de répercussion des séquelles de l'accident sur la possibilité pur Mme L... de conserver une activité professionnelle d'assistante maternelle ou d'exercer un travail quelconque après la consolidation ; qu'elle a en effet indiqué que Mme L... est au plan médical physiquement et intellectuellement apte à reprendre l'activité habituelle qu'elle avait avant l'accident, ce qui inclut l'activité professionnelle ; que cet expert s'est déterminé après avoir pris l'avis d'un sapiteur psychiatre, le professeur J... qui, s'il a estimé que Mme L... restait affectée d'un état de stress post-traumatique n'a pas conclu à une impossibilité médico-légale à l'exercice de la profession antérieure après la consolidation ; qu'en outre, le certificat médical du docteur S..., psychiatre, en date du 28 octobre 2015 communiqué par Mme L..., ne fait pas état d'une impossibilité de travailler, ce médecin ayant seulement noté qu'elle présente des « manifestations symptomatiques résiduelles d'un état de stress post traumatique et notamment une anxiété phobique dans certaines situations lui rappelant les circonstances de l'accident » ; qu'enfin Mme L... n'établit pas qu'une demande de renouvellement d'un agrément comme assistante maternelle lui a été refusée ni même qu'elle a déposé une telle demande ; qu'elle ne démontre donc pas subir, du fait de l'accident, une perte de gains professionnels futurs certaine et actuelle ; que sa demande d'indemnisation formée en ce sens doit être rejetée ;

Alors 1°) que, la perte de gains professionnels futurs a pour objet d'indemniser la perte ou la diminution des revenus de la victime consécutive à l'incapacité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans sa sphère professionnelle ; qu'en l'espèce, le rapport du Dr G..., experte judiciaire, indique que, sur le plan psychiatrique, « il persiste selon le professeur J..., un état dépressif, inhibition, sentiment de culpabilité, des idées de suicide, persistantes de la première année après l'accident, un stress post-traumatique avec syndrome de reviviscence, cauchemars, conduites d'évitement, phobie sociale, claustrophobie, état d'alerte permanent, anxiété, retentissement dépressif sur son autonomie (
) En tenant compte de la nature des contusions reçues, des documents médicaux qui m'ont été transmis, de l'évolution des symptômes, de l'interrogatoire et des constatations cliniques, on peut admettre que cet accident a bien laissé les séquelles ci-dessus décrites », enfin que « les séquelles de cet accident son actuellement stabilisées ; aucune aggravation ni amélioration n'est possible dans les délais rapprochés » (p. 19) ; qu'en se bornant à relever, pour débouter Mme L... de sa demande d'indemnisation au titre de la perte de gains professionnels futurs, que le Dr G... avait indiqué qu'elle était au plan médical, physiquement et intellectuellement, apte à reprendre l'activité habituelle qu'elle avait avant l'accident, dont par conséquent, selon la cour, l'activité professionnelle, et que le Dr G... s'était appuyée pour arriver à cette conclusion sur l'avis du sapiteur qui n'avait pas conclu à l'impossibilité médico-légale de reprise de l'activité antérieure, sans avoir précisé, cependant que le sapiteur psychiatrique, le Pr. J..., n'avait pas non plus conclu positivement à la possibilité de reprendre une activité professionnelle, comment une personne atteinte, d'après les constatations du sapiteur, d'évitement, de phobie sociale, d'état d'alerte permanent et en proie à des idées suicidaires, cet état justifiant la prise d'un traitement psychotrope, pouvait continuer à s'occuper seule et à titre professionnel de très jeunes enfants, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

Alors 2°) que, les juges du fond sont tenus de répondre aux moyens des parties ; qu'en déboutant Mme L... de sa demande au titre de la perte de gains professionnels futurs sans répondre à ses écritures (p. 11 à 13, p. 17) par lesquelles, rappelant que le Dr G... avait fait appel à un sapiteur psychiatrique, reconnaissant ainsi qu'elle n'avait pas la compétence nécessaire pour donner un avis éclairé dans ce domaine ni apprécier les répercussions des séquelles psychiatriques sur le plan professionnel, l'exposante, se fondant sur les constatations du sapiteur en psychiatrie, le Pr. J..., décrivant les séquelles psychiatriques importantes dont elle restait atteinte, manifestement incompatibles avec son activité d'assistante maternelle, justifiait de ce que la persistance de ses troubles psychiatriques post-traumatiques était à l'origine de sa mise en invalidité catégorie 2 à compter du mois de juin 2008, réduisant des 2/3 au moins sa capacité de travail ou de gains, ainsi que de la perte de son agrément d'assistante maternelle, étant désormais inapte à s'occuper de jeunes enfants, âgés de deux mois à trois ans, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement hormis sur le montant de l'indemnisation de Mme I... L... et les sommes lui revenant et en ce qu'il avait ordonné l'exécution provisoire à hauteur de 100 000 euros et, statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant, d'avoir fixé le préjudice corporel global de Mme I... L... à la somme de 109 914,23 euros seulement, d'avoir dit que l'indemnité revenant à cette victime à ce titre s'établit à 56 836,80 euros, d'avoir en conséquence condamné la société Allianz Iard à payer à Mme L... la somme de 56 836,80 euros, sauf à déduire les provisions versées, en réparation de son préjudice corporel ;

Aux motifs que, Mme L... doit donc également être déboutée de sa demande de réparation d'un préjudice moral consécutif à la perte de son emploi d'assistante maternelle ;

Alors que, par application de l'article 624 du code de procédure civile, la censure qui interviendra à la faveur du premier moyen, en ce que la cour a retenu à tort, pour la débouter d'une indemnisation au titre de la perte de gains professionnels futurs, que Mme L... pouvait continuer à exercer l'activité d'assistante maternelle, entrainera la censure du chef de dispositif attaqué par le deuxième moyen dès lors que c'est en considération de ce qu'elle pouvait continuer à exercer son ancienne activité que l'exposante a été déboutée de sa demande de réparation d'un préjudice moral consécutif à la perte de son emploi d'assistante maternelle.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement hormis sur le montant de l'indemnisation de Mme I... L... et les sommes lui revenant et en ce qu'il avait ordonné l'exécution provisoire à hauteur de 100 000 euros et, statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant, d'avoir fixé le préjudice corporel global de Mme I... L... à la somme de 109 914,23 euros seulement, d'avoir dit que l'indemnité revenant à cette victime à ce titre s'établit à 56 836,80 euros, d'avoir en conséquence condamné la société Allianz Iard à payer à Mme L... la somme de 56 836,80 euros, sauf à déduire les provisions versées, en réparation de son préjudice corporel ;

Aux motifs que, sur les préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation), concernant le déficit fonctionnel permanent, l'indemnité de 28 220 euros allouée par le tribunal n'est critiquée par aucune partie en cause d'appel ; que sur cette indemnité s'impute la pension d'invalidité réglée par la CPAM à compter du 4 juin 2008 qu'elle a vocation à réparer ; que cette pension était d'un montant mensuel de 305,82 euros en juin 2008 puis de 339,81 euros en juillet et août 2008 ; que les arrérages se sont élevés du 4 juin 2008 à ce jour 2 mars 2017 à 35 646,06 euros (305,82 euros) + (339,81 euros x 104 mois) ; que pour la période à échoir, le capital représentatif de cette pension doit être calculé en fonction d'une rente annuelle de 4 077,72 euros (339,81 euros x 12 mois) et de l'indice temporaire de 8,030 de l'arrêté du 11 février 2015 relatif à l'application des articles R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale pour une femme âgée de 54 ans à ce jour, ce qui représente 32 744,09 euros (4 077,72 euros x 8,030) ; que la pension d'invalidité versée par la CPAM s'élève ainsi à 68 390,15 euros (35 646,06 euros + 32 744,09 euros) ; que de même doit s'imputer la rente d'invalidité complémentaire IRCEM de 15,11 euros par jour versée à compter du 4 juin 2008, ce qui représente pour la période échue à ce jour 48 261,34 euros (15,11 euros x 3 194 jours) et pour la période à échoir 56 419,98 euros (15,11 euros x 465 jours x 8,030) ; qu'après imputation à due concurrence de 28 220 euros des pensions d'invalidité versées par la CPAM et par l'IRCEM aucune somme ne revient à la victime sur ce poste de dommage ; que le préjudice corporel global subi par Mme L... s'établit ainsi à la somme de 109 914, 23 euros soit, après imputation des débours de la CPAM et de l'IRCEM, une somme de 56 836,80 euros lui revenant, provisions non déduites ;

Alors 1°) que, les juges du fond ne peuvent fonder leur décision sur les moyens de droit qu'ils ont relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément constaté que l'indemnité de 28 220 euros allouée par le tribunal de grande instance de Marseille à Mme L..., au titre du déficit fonctionnel permanent, n'était critiquée par aucune des parties ; qu'en relevant d'office qu'il convenait d'imputer sur ce montant la pension d'invalidité et la pension d'invalidité complémentaire que la CPAM des Bouches du Rhône et l'IRCEM avaient versées et non réclamées dans leurs recours subrogatoires, et en procédant à des calculs avec capitalisation, quand ni la Caisse, qui était défaillante mais qui avait adressé à la cour, le 19 août 2016, son recours subrogatoire identique à celui qu'avait communiqué Mme L..., ni l'IRCEM, ni aucune autre partie, ne demandait l'imputation de ces montants sur le poste de déficit fonctionnel permanent de la victime, ni ne procédait à un tel calcul, la cour d'appel, qui n'a pas invité les parties à présenter préalablement leurs observations, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

Alors 2°) que, le juge est tenu de respecter l'objet du litige tel que déterminé par les moyens et prétentions des parties ; qu'en jugeant qu'il convenait d'imputer sur le montant alloué au titre du déficit fonctionnel permanent la pension d'invalidité et la pension d'invalidité complémentaire que la CPAM des Bouches du Rhône et l'IRCEM avaient versées quand il résultait, d'une part, du décompte définitif de la caisse (pièce n°6) que son recours subrogatoire portait sur la somme totale de 11 425,37 euros, représentant exclusivement les dépenses de santé, pour un montant de 5 774,87 euros, et les indemnités journalières versées à Mme L... pour la période du 4 juin 2005 jusqu'au 6 décembre 2005 pour un montant de 5 650,50 euros, que la Cour avait imputées dans l'évaluation de la perte de gains professionnels actuels, d'autre part, que celui de l'Ircem Prévoyance portait uniquement sur la somme de 13 432,06 euros au titre des indemnités journalières complémentaires versées à Mme L... pour la période du 4 juin 2005 jusqu'au 4 juin 2007, également imputées dans l'évaluation de la perte de gains professionnels actuels, la cour d'appel, qui a statué ultra petita en méconnaissance des termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.

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