20 novembre 2020
Cour d'appel de Paris
RG n° 17/13050

Pôle 6 - Chambre 12

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 20 Novembre 2020



(n° , 4 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/13050 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4KNA



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Septembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 16/00249





APPELANTE

CPAM de MAINE ET LOIRE

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901





INTIMEE

SA LACTALIS NESTLE ULTRA FRAIS MARQUES

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Frédérique BELLET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0881





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Octobre 2020, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Pascal PEDRON, Président de chambre, chargé du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Pascal PEDRON, président de chambre

Mme Sophie BRINET, présidente de chambre

M. Gilles REVELLES, conseiller



qui en ont délibéré



Greffier : M. Fabrice LOISEAU, lors des débats





ARRÊT :



- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Pascal PEDRON, président de chambre et par Mme Vénusia DAMPIERRE, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.







La cour statue sur l'appel interjeté par la CPAM du Maine et Loire (la caisse) de jugements rendus le 07 septembre 2017 et le 12 octobre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l'opposant à la société Lactalis Nestle Ultra-Frais Marques (la société)




FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES



M. [G], salarié de la société, a établi une déclaration de maladie professionnelle au titre d'une tendinopathie de l'épaule droite transmise par la caisse à l'employeur le 18 août 2014; le 24 octobre 2014, la caisse a notifié à l'employeur le recours au délai complémentaire d'instruction ; la condition tenant à la liste limitative des travaux n'étant pas remplie, la caisse a informé la société le 19 mars 2015 de la possibilité de venir consulter le dossier avant transmission de celui-ci au CRRMP des Pays de Loire ; après réception de l'avis favorable de ce dernier, la caisse a notifié à l'employeur le 08 octobre 2015 la prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie déclarée par M. [G] au titre du tableau n°57.

Après avoir saisi en vain la commission de recours amiable de sa contestation en inopposabilité à son égard de la prise en charge, la société a porté le litige le 08 février 2016 devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny.

Par jugement du 07 septembre 2017, le tribunal a déclaré recevable le recours de la société, l'en a débouté et a déclaré opposable à la société la prise en charge de l'affection déclarée par M. [G], et ce après avoir conclu dans ses motifs qu' « il y a ainsi lieu de déclarer la décision de prise en charge du 08 octobre 2015 inopposable à la société », la juridiction de première instance ayant en effet considéré qu'en « s'abstenant de rendre une décision de rejet provisoire et de notifier la clôture de l'instruction le 24 janvier 2015 au plus tard, alors que les délais impératifs d'instruction étaient dépassés, la caisse a manqué à ses obligations envers la société ».



Ce jugement a été notifié à chacune des parties le 19 septembre 2017.



Par requête reçue par le tribunal le 21 septembre 2017, la société a saisi celui-ci en rectification d'une erreur matérielle figurant au dispositif du jugement.



Par jugement en rectification d'erreur matérielle du 05 octobre 2017, le tribunal « statuant sur requête, sans débat et en premier ressort », a « rectifié le jugement rendu le 7 septembre 2017 affecté d'une erreur matérielle » et « Dit qu'il faut lire:

DECLARE recevable le recours intenté par la société LACTALIS NESTLE ULTRA FRAIS MARQUES;

Le dit bien fondé;

DECLARE inopposable à la société LACTALIS NESTLE ULTRA FRAIS MARQUES la prise en charge de l'affection déclarée par Monsieur [F] [G];

DIT n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

RAPPELLE que tout appel contre le présent jugement doit, à peine de forclusion, être interjeté dans le délai d'un mois à compter de sa notification.

au lieu de :

DECLARE recevable le recours intenté par la société LACTALIS NESTLE ULTRA FRAIS MARQUES;

L'en DEBOUTE;

DECLARE opposable à la société LACTALIS NESTLE ULTRA FRAIS MARQUES la prise en charge de l'affection déclarée par Monsieur [F] [G] ;

DIT n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

RAPPELLE que tout appel contre le présent jugement doit, à peine de forclusion, être interjeté dans le délai d'un mois à compter de sa notification.

Qu'il convient de la rectifier conformément à l'article 462 du code de procédure civile et dans les termes du présent dispositif;

Dit que l'erreur sera corrigée en page 4 du jugement précité;

Dit que la présente décision sera mentionnée sur la minute et les expéditions du jugement rectifié et notifié comme lui ;

Dit que le présent jugement sera notifié aux parties »

Ce jugement rectificatif a été notifié à chacune des parties le 16 octobre 2017, le formulaire de notification adressé le 12 octobre 2017 aux parties par le secrétariat greffe de la juridiction indiquant qu'il s'agit de la « notification d'une décision non susceptible de recours-rendue par le TASS ».

La caisse a le 25 octobre 2017 « interjeté appel des jugements rendus le 7 septembre 2017 et le 5 octobre 2017 respectivement notifiés le 13 septembre 2017 et le 12 octobre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny (...) »



Par ses conclusions écrites « en réplique et récapitulatives » déposées, soutenues et complétées oralement à l'audience par son conseil, la caisse demande à la cour de déclarer son appel des deux jugements recevable, d'infirmer le jugement rendu le 05 octobre 2017, de déclarer opposable à la société sa décision de prise en charge du 08 octobre 2015 concernant la maladie professionnelle de M. [G] et de condamner la société au paiement de la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Par ses conclusions écrites déposées, soutenues et complétées oralement à l'audience par son conseil, la société demande à la cour de :

-déclarer irrecevable comme étant tardif et à tout le moins sans objet et mal fondé l'appel de la caisse à l'encontre du jugement du 7 septembre 2017,

-déclarer irrecevable l'appel interjeté à l'encontre du jugement rectificatif du 05 octobre 2017,

-en tout état de cause, confirmer le jugement rectificatif du 05 octobre 2017,

-sur l'inopposabilité de la décision de prise en charge de l'affection déclarée par M. [G], juger que la décision de la caisse du 24 janvier 2015 de prendre en charge la maladie de M. [G] du 19 juin 2014 lui est inopposable.




SUR CE, LA COUR



Pour la recevabilité de l'appel des deux jugements, la caisse fait valoir que :

-elle a interjeté appel des deux jugements ;

-avant que n'intervienne le jugement rectificatif, elle ne pouvait pas faire appel du premier jugement, n'ayant pas intérêt à le faire puisque le dispositif de la décision lui donnait raison;

-la requête en rectification d'erreur matérielle a été déposée avant l'expiration du délai d'appel du premier jugement ;

-c'est une fois le jugement rectificatif intervenu qu'elle pouvait faire appel des jugements;

-compte tenu du contexte procédural, son appel est recevable pour le premier jugement et le second qui transforme le premier.



Pour l'irrecevabilité de l'appel des deux jugements, la société réplique que :

-la caisse n'a pas fait appel dans les délais du premier jugement ;

-la voie de recours contre le second jugement rectificatif était le pourvoi en cassation par application des dispositions de l'article 462 du code de procédure civile.



°°°°°°°°°°°



Si la décision rectificative, qui s'intègre par son régime juridique à la décision rectifiée, est soumise aux règles ordinaires et donc aux mêmes voies de recours que la décision rectifiée, selon qu'elle a été rendue en premier ou dernier ressort, il résulte toutefois des dispositions de l'article 462 dernier alinéa du code de procédure civile que, si la décision rectifiée est passée en force de chose jugée, la décision rectificative ne peut être attaquée que par la voie du recours en cassation.



Une décision est passée en force de chose jugée lorsque, en application de l'article 500 du code de procédure civile, elle n'est plus susceptible de recours suspensif d'exécution.



En l'espèce, le premier jugement (rectifié ) du 07 septembre 2017 a été notifié à chacune des parties le 19 septembre 2017, date de la distribution contre émargement à chacune des parties du courrier de notification du jugement les informant des délai, voie et modalités de recours, à savoir l'appel au cas d'espèce.

Lorsque la caisse a interjeté appel le 25 octobre 2017 ( date du cachet de la poste figurant sur l'enveloppe d'expédition de son courrier d'appel), le délai d'appel d'un mois fixé à l'article 538 du code de procédure civile était expiré, l'appel étant en conséquence tardif, étant précisé que le dépôt d'une requête en rectification d'erreur matérielle ne constitue pas une cause d'interruption ou de suspension du délai d'un mois courant à compter de la notification pour faire appel du jugement.



La décision rectifiée du 07 septembre 2017 étant passée en force de chose jugée lors de la formation du recours introduit le 25 octobre 2017 contre la décision rectificative, celle-ci ne pouvait être attaquée que par la voie du recours en cassation.

D'où il suit que l'appel tant de la décision rectifiée du 07 septembre 2017 que de la décision rectificative du 05 octobre 2017 est irrecevable.



Il n'apparait pas inéquitable de laisser à la société la charge des frais irrépétibles qu'elle a exposés.



PAR CES MOTIFS



LA COUR,



DECLARE irrecevable l'appel interjeté le 25 octobre 2017 par la CPAM du Maine et Loire.



DEBOUTE la CPAM du Maine et Loire de sa demande en frais irrépétibles.



DEBOUTE la société Lactalis Nestle Ultra-Frais Marques de sa demande en frais irrépétibles.



CONDAMNE la CPAM du Maine et Loire aux dépens d'appel.





La greffièreLe président

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