9 septembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-81.008

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:CR01865

Texte de la décision

N° R 20-81.008 F-D

N° 1865




9 SEPTEMBRE 2020

SM12





RENVOI







M. SOULARD président,



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 9 SEPTEMBRE 2020


La société Beiser environnement et M. S... H... ont présenté, par mémoire spécial reçu le 10 juin 2020, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par eux contre l'arrêt de la cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 10 janvier 2020, qui, pour importation sans déclaration de marchandises prohibées, les a condamnés à des amendes douanières.

Un mémoire en réponse a été produit.

Sur le rapport de Mme Pinchon, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Beiser Environnement et M. S... H..., la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de l'administration des douanes et droits indirects du Bas-Rhin, et les conclusions de M. Petitprez, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 septembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Pichon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.






1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« L'article 706-43 du code de procédure pénale ne méconnaît-il pas l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en ce qu'il laisse à la discrétion du représentant légal de la personne morale poursuivi aux côtés de celle-ci pour des faits identiques ou connexes la décision de saisir ou non le président du tribunal judiciaire d'une requête aux fins de désignation d'un mandataire de justice en privant celle-ci des droits prévus par cette disposition ? »

2. La disposition législative contestée, en son premier alinéa, dernière phrase, dans sa version en vigueur, est applicable à la procédure dès lors que la société Beiser environnement, poursuivie devant une juridiction correctionnelle, pour les mêmes faits, avec son représentant légal qui l'a également représentée, s'est pourvue en cassation contre sa condamnation et fonde un moyen sur ce texte.

3. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

4. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

5. L'article 706-43 du code de procédure pénale fixe une exception au principe de la représentation de la personne morale pénalement poursuivie par son représentant légal lorsque les poursuites, pour des faits identiques ou connexes, sont également engagées à l'encontre dudit représentant. Dans cette hypothèse, il prévoit une procédure de désignation d'un mandataire de justice pour représenter la personne morale.

6. Alors que, dans sa version initiale, issue de la loi n°92-1336 du 16 décembre 1992, la désignation du mandataire ad hoc était obligatoire, elle est, depuis l'entrée en vigueur de la loi n°2000-647 du 10 juillet 2000, facultative et laissée à l'initiative de son représentant légal.

7. Il peut en résulter, si le représentant légal, également prévenu à titre personnel, s'abstient de demander la désignation d'un mandataire de justice, qu'il opère des choix au regard des droits de la défense de la personne morale, contraires aux intérêts de cette dernière, afin notamment de favoriser ses intérêts propres.

8. Dès lors, la disposition critiquée est susceptible de porter aux droits de la défense de la personne morale garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 une atteinte non proportionnée au but de recherche des auteurs d'infractions poursuivi par le législateur.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du neuf septembre deux mille vingt.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.