9 septembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-24.831

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:SO00668

Texte de la décision

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 septembre 2020




Cassation


M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 668 F-D

Pourvoi n° N 18-24.831





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 SEPTEMBRE 2020

M. P... F..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° N 18-24.831 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (9e chambre C), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. J... N..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société K et L,

2°/ à l'AGS, dont le siège est [...] ,

3°/ à l'UNEDIC délégation AGS-CGEA de Marseille, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de M. F..., après débats en l'audience publique du 10 juin 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 juillet 2018), M. F... a été engagé par la société K et L en qualité de coursier-livreur extra, à compter du 17 mars 2005, par un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel.

2. La société K et L a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 17 mars 2014 et M. N... a été désigné en qualité de liquidateur.

3. Le salarié a été licencié le 1er avril 2014 pour motif économique et a saisi la juridiction prud'homale le 2 septembre de la même année d'une demande tendant à qualifier son contrat de travail en contrat à temps complet ainsi que de diverses demandes pécuniaires.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt attaqué de juger prescrites ses demandes et comme telles irrecevables, alors « que l'action en requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet est une action en paiement du salaire soumise au délai de prescription prévu par l'article L. 3245-1 du code du travail ; que la cour d'appel en énonçant, pour juger les demandes salariales prescrites, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, que toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit, de sorte que le délai de prescription d'une action en requalification d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps complet, fondée sur l'absence d'une mention au contrat susceptible d'entraîner sa requalification, court à compter de la conclusion de ce contrat et que le salarié fonde sa demande en requalification du contrat de travail conclu le 2 mars 2005 sur le défaut d'indication, dans le contrat, de la durée du travail et de sa répartition, a violé, par fausse application, l'article L. 1471-1 du code du travail et, par refus d'application, l'article L. 3245-1 du code du travail, dans leur rédaction applicable en la cause. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1471-1 et L. 3245-1 du code du travail, dans leur rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 :

5. Aux termes du premier de ces textes, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit. Il résulte du second de ces textes que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

6. Pour déclarer prescrite la demande de requalification du salarié ainsi que toutes les actions qui pourraient en être la conséquence, l'arrêt énonce qu'il résulte de l'application de l'article L. 1471-1 du code du travail que le délai de prescription d'une action en requalification d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps complet fondée sur l'absence d'une mention au contrat susceptible d'entraîner sa requalification, court à compter de la conclusion de ce contrat.

7. En statuant ainsi, alors que l'action en requalification du contrat de travail en contrat à temps complet est une action en paiement du salaire soumise au délai de prescription prévu par l'article L. 3245-1 du code du travail, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juillet 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne M. N..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société K et L, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. N..., ès qualités, à payer à M. F... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour M. F...


M. F... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé prescrites ses demandes et comme telles irrecevables ;

AUX MOTIFS QU' il y a lieu de constater que l'ensemble des demandes de P... F... repose sur le postulat que son contrat conclu le 2 mars 2005 doit être requalifié à temps complet avec le salaire correspondant outre celui afférent aux heures supplémentaires qu'il a effectuées jusqu'au 21 juin 2005, date de son accident de scooter à l'occasion d'un livraison ; que c'est ainsi qu'il demande sur la base d'une requalification à temps complet - des dommages-intérêts à hauteur de 10.000 euros pour exécution fautive du contrat de travail, - une indemnisation de 44.328,82 euros représentant les indemnités journalières reconstituées qu'il aurait dû percevoir entre 2009 et 2014 sur la base d'une prescription quinquennale à partir du salaire qu'il a reconstitué, - des dommages-intérêts à hauteur de 3.000 euros pour n'avoir pas perçu les allocations chômage telles qu'elles auraient dû être, au titre de la période post-licenciement, - des dommages-intérêts à hauteur de 3.000 euros sur la minoration future de ses droits à la retraite résultant de l'absence de prise en compte de son salaire réel, - un rappel de congés payés (1.096,99 euros) sur la base du salaire qu'il aurait du percevoir, - un rappel d'indemnité de licenciement (1.582,78 euros) fondé sur le même motif, - un rappel d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents (4.217,67 euros) toujours sur le même motif ; que les intimés opposent à P... F... une fin de non recevoir tirée de la prescription qu'a retenue le conseil de prud'hommes pour l'ensemble des demandes ; que le salarié, rappelant les dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013 fait valoir que la prescription biennale ou triennale s'applique aux prescriptions en cours à compter du 14 juin 2013 sans que sa durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'il « en résulte qu'en matière de salaire une prescription quinquennale en cours le 15 juin 2013 est commuée en prescription triennale pour autant que sa durée ne soit pas augmentée » et que par conséquent « les demandes du salarié relatives tant à l'exécution du contrat de travail qu'à sa rupture n'étaient pas prescrites au jour de la saisine du conseil de prud'hommes soit le 2 septembre 2014 » ; qu'en application de l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; qu'il en résulte que le délai de prescription d'une action en requalification d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps complet, fondée sur l'absence d'une mention au contrat susceptible d'entraîner sa requalification, court à compter de la conclusion de ce contrat ; que le salarié fonde sa demande en requalification du contrat de travail conclu le 2 mars 2005 sur le défaut d'indication, dans le contrat, de la durée du travail et de sa répartition, mentions imposées par l'article L. 212-4-3 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'époque ; qu'il en résulte que la demande est prescrite ainsi que toutes celles énumérées plus haut qui en sont la conséquence ;

ALORS QUE l'action en requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet est une action en paiement du salaire soumise au délai de prescription prévu par l'article L. 3245-1 du code du travail ; que la cour d'appel en énonçant, pour juger les demandes salariales prescrites, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, que toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit, de sorte que le délai de prescription d'une action en requalification d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps complet, fondée sur l'absence d'une mention au contrat susceptible d'entraîner sa requalification, court à compter de la conclusion de ce contrat et que le salarié fonde sa demande en requalification du contrat de travail conclu le 2 mars 2005 sur le défaut d'indication, dans le contrat, de la durée du travail et de sa répartition, a violé, par fausse application, l'article L. 1471-1 du code du travail et, par refus d'application, l'article L. 3245-1 du code du travail, dans leur rédaction applicable en la cause.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.